Soirées portes-ouvertes de Trans Canada : grossière propagande

2015/12/22 | Par Louise Morand

L’auteure est membre du Comité vigilance hydrocarbures Lanaudière

Le personnel de Trans Canada ne recule devant aucun mensonge pour convaincre la population que son projet de pipeline Énergie Est, qui doit acheminer le pétrole des sables bitumineux à travers le Québec en vue de son exportation, est parfaitement sécuritaire.

Lors de la soirée d’information organisée par Trans Canada à Terrebonne le 15 décembre dernier, un représentant de la compagnie, nommé John, m’a offert une leçon de lobbyisme.

Questionné sur les impacts du projet sur les gaz à effet de serre, John m’a assuré qu’Énergie Est n’augmenterait pas la production des sables bitumineux. Au contraire, il favoriserait même une diminution des émissions de gaz à effets de serre (GES). Comment? Tout simplement parce que le pipeline remplacerait les trains!

Difficile de trouver un meilleur exemple, en si peu de mots, de malhonnêteté intellectuelle, pour ne pas dire carrément de fraude et d’abus de confiance envers la population.

De la même façon que le groupe Friends of sciences1 cherche à invalider les preuves scientifiques de la responsabilité humaine dans la crise climatique, les représentants de Trans Canada tentent de cacher les faits concernant les impacts dévastateurs anticipés de leur projet de pipeline.

L’Association canadienne des producteurs de pétrole n’a jamais caché l’intention de l’industrie d’accroître la production de pétrole issu des sables bitumineux. Selon un rapport de juin 20152, la production des prochaines années devrait dépasser la capacité du réseau existant de pipelines et de chemins de fer. D’où la nécessité du pipeline Énergie Est.

Et comme le souligne le Comité vigilance hydrocarbures de Montréal: «L’industrie a l’intention d’utiliser tous les modes existants à pleine capacité et d’accroître les infrastructures de transport afin de continuer à accroître ses exportations»3.

Les compagnies Suncor et Valero au Québec, ainsi que Irving au Nouveau Brunswick ont d’ailleurs investi des millions de dollars depuis 2013 pour augmenter la capacité de livraison de bitume dilué par train vers leurs raffineries4. Et c’est sans parler du projet Chaleur Terminal, qui vise à acheminer chaque jour 220 wagons de bitume dilué de l’Ouest jusqu’à Belledune, Nouveau-Brunswick, pour l’exportation.

Les gouvernements fédéral et provincial refusent d’étudier les impacts liés aux GES du projet Énergie Est, alors que les scientifiques reconnaissent que ce type d’infrastructure est incompatible avec les objectifs fixés pour contrôler le réchauffement climatique5.

Il est évident que John et ses collègues de TransCanada sont payés pour dire ce qu’ils disent. S’ils commençaient à se montrer critiques et changeaient de discours pour tenir compte de la réalité, ils perdraient leur emploi. Ils devraient pourtant savoir que par leur abdication aveugle devant le pouvoir de l’argent, c’est la génération de leurs propres enfants et petits-enfants qu’ils conduisent vers une fin prématurée.

1 Charles Montgommery. Nurturing doubt about climate change is big business. The Globe and Mail. 12 août 2006. http://goo.gl/p0P4mH

2 Canadian Association of petroleum Producers. 2015 crude oil forecast, markets and transportation. http://www.capp.ca/publications-and-statistics/crude-oil-forecast

3 Énergie Est : un projet déraisonnable auquel la CMM doit opposer un NON retentissant. Mémoire. Comité vigilance hydrocarbures de Montréal. 2 octobre 2015, p.14. http://cmm.qc.ca/fileadmin/user_upload/consultation/oleoducTranscanada/M...

4 Idem p.8.

5 Des scientifiques demandent un moratoire sur l’expansion des sables bitumineux. http://www.oilsandsmoratorium.org/10-reasons-fr/