La gratuité scolaire est au fond des grosses poches

Arrêtez messieurs, la coupe est pleine et le vase déborde !

Pour justifier l’invraisemblable politique d’endettement de 103 millions $ des étudiants du Québec, on en a eu droit à des vertes et des pas mûres de l’artillerie lourde du gouvernement Charest et de sa suite royale composée des éditorialistes de La Presse, de leurs économistes attitrés et de leurs p’tits amis du patronat, comme : « L’argent ne pousse pas dans les arbres »; « pour le bien des générations futures »; « par solidarité envers les plus pauvres »; « par compassion pour la situation financière précaire du Québec ».

Arrêtez messieurs, la coupe est pleine et le vase déborde ! C’est tout de même drôle, j’entends encore les élus répéter, pour justifier l’aide gouvernementale de 325 millions $ accordée à la construction de résidences secondaires au Mont-Tremblant, des condos à plus de 300 000 $ chacun, que ces ridicules subventions constituaient un « investissement » pour le Québec.

Si je comprends bien la logique du présent gouvernement, allonger des milliards de dollars en fonds publics au privé constitue, en tout temps, un investissement et crée de la bonne dette publique alors que mettre de l’argent public dans l’éducation, la santé, les garderies, les transports en commun, les aqueducs, les autoroutes, etc. représente des dépenses d’épicerie qui engendrent de la très mauvaise dette publique. Pourtant, il n’y a pas plus grand investissement économique et social pour une nation que d’investir massivement dans ses programmes sociaux publics.

C’est drôle aussi, j’entendais l’autre jour des politiciens et des économistes dire qu’aucune étude ne démontrait que la hausse des frais de scolarité diminuait la fréquentation à l’université et dans les collèges.

Plus menteur ou plus ignorant que ça, tu meurs, car il y en a eu plusieurs qui ont démontré le contraire, entre autres deux études de Statistique Canada, réalisées en 1998 et en 2000, qui ont été résumées dans le Devoir du 9 décembre 1998 sous le titre : « L’endettement étudiant est devenu un sérieux problème social » et dans La Presse du 6 septembre 2000 sous le titre de : « Études universitaires : les familles aisées d’abord ».

Et que dire de cette autre étude de l’Association des collèges communautaires du Canada, effectuée en 1999 et retransmise dans La Presse du 6 août 1999 sous le titre révélateur de : « Les études ou la maison ? Des parents mettent en danger leur propre avenir pour assurer celui de leurs enfants ».

Tout de même bizarre, ce sont les mêmes charlatans qui recommandent fortement la hausse des tarifs d’électricité afin de réduire la consommation et qui viennent nous dire après que la hausse des frais de scolarité ne réduira pas cette fois la consommation d’études universitaires en termes de fréquentation et d’accessibilité. Il me semble que ça prend pas une lumière pour comprendre que si tu augmentes les frais et la tarification d’un service public, cela va affecter à la baisse sa consommation, principalement celle des classes moyennes et des pauvres.

Et, faut surtout pas hausser les taxes et les impôts des compagnies et des riches, car cela va affecter négativement leur comportement, ce qui ne sera pas du tout le cas pour les étudiants universitaires si on augmente leurs frais de scolarité et leur endettement. De vulgaires préjugés que l’on essaie de nous faire passer pour de savantes théories économiques.

Avec un minimum de volonté politique, le gouvernement du Québec pourrait aller chercher demain matin 10 milliards de dollars qui lui permettraient d’assurer la gratuité scolaire à l’université et au collège ainsi que d’investir massivement dans la santé et dans les autres programmes sociaux. Et c’est pas moi qui le dit comme vous allez le constater. Car quand ça vient de moi, certains doutent et se disent : « on sait bien, ça vient du communiche à Lauzon ».

Premièrement, dans le Journal de Montréal du 9 mars 2005, la fiscaliste Brigitte Alepin, qui travaille pour un bureau de comptables agréés, a constaté, en consultant les statistiques fiscales du Québec, qu’en 2004 il y avait 4191 grandes entreprises au Québec qui ne payaient qu’un maigre taux d’impôt de 1,7 % alors que le taux statutaire imposé aux autres entreprises variait de 8,9 à 16,25 %.

Elle a dit : « Nous sommes en droit de demander à notre gouvernement de corriger cette situation. En ajustant le taux d’imposition à un taux encore intéressant de 8,9 %, ce serait au moins 4 milliards de dollars de plus chaque année dans les coffres du Québec ». On ne dit pas de surtaxer quiconque, mais bel et bien de faire payer leur juste part surtout à ceux qui en ont les moyens.

Le patronat a fait abolir la taxe sur le capital en prétendant que cette taxe supposément injuste, devait être payée même quand les entreprises subissaient des pertes. Mais, lorsqu’elles réalisent des profits, pourquoi s’opposeraient-elles à un impôt minimum ? Est-ce normal que de très grandes entreprises milliardaires ne paient qu’un taux d’impôt réel de 1,7 % alors que nos finances publiques sont à sec ? Et est-ce normal aussi que nos gouvernements passent sous silence cette injustice criante et ne leur imposent pas un impôt minimum à payer ?

On le sait trop bien, quand les compagnies subissent des pertes, elles exigent qu’on les aide financièrement à même les deniers publics et, lorsqu’elles réalisent des profits, elles ne veulent pas payer d’impôts et demandent en plus des subventions gouvernementales.

Allons chercher maintenant deux autres petits milliards de dollars de rien du tout et se sans se fatiguer, encore une fois. Dans un article du journal Les Affaires du 1er novembre 2003 intitulé : « La compétitivité du Québec reste intacte, soutient Yves Séguin », l’ex-ministre libéral des finances du Québec a affirmé ceci : « Je m’adresse à la communauté d’affaires : est-ce normal que le gouvernement du Québec verse 5 milliards $ en aide gouvernementale, soit 3 milliards $ de plus qu’en Ontario pour des entreprises dont la majorité sont prospères ? »

Supposons que l’on réduise l’aide gouvernementale du Québec de 2 milliards $ à ces entreprises très prospères, qui ne paient en moyenne qu’un maigrichon taux d’impôt réel de 1,7 %, ne l’oublions pas, on verserait toujours 1 milliard $ de plus en subventions qu’en Ontario, et le Québec serait encore très compétitif, comme l’a si bien dit Yves Séguin qui a été viré parce qu’il disait trop souvent des vérités qui déplaisaient royalement au patronat et à leurs faire-valoir que sont Jean Charest, Michel Audet, Monique Jérôme-Forget et cie. Le patronat a applaudi l’arrivée de Michel Audet, ex-président de la Chambre de commerce du Québec, au ministère des Finances en remplacement d’Yves Séguin, et on comprend très bien pourquoi.

Vous voyez bien que sans surtaxer personne, et tout en maintenant la compétitivité fiscale du Québec, comment il serait facile, avec un minimum de volonté politique et une bonne dose de pragmatisme, d’assurer la gratuité scolaire au collège et à l’université en plus d’investir substantiellement dans nos services publics comme la santé.

Mais non, on a des gouvernements qui sont là principalement pour desservir les intérêts supérieurs de la minorité privilégiée et qui, de ce fait, fonctionnent uniquement sur une base idéologique, sans jamais confronter leurs préjugés aux faits, vantant grossièrement les mérites de l’État minimal, de la déréglementation, de la défiscalisation, de la privatisation.