Le Mouvement Montréal français appelle à la mobilisation

2007/08/24 | Par Patrick Sabourin

Au lendemain du jugement de la Cour d’appel sur la loi 104 et à la veille du 30e anniversaire de la Charte de la langue française, le Mouvement Montréal français a tenu une conférence de presse pour dénoncer le jugement et rendre publique une Déclaration signée par 30 personnalités appelant à l’application rigoureuse et au renforcement de la Loi 101.

Le président du MMF Mario Beaulieu a rappelé que plus de 200 amendements apportés à la Charte depuis son adoption l’ont considérablement affaiblie et l’ont détournée de son objectif principal.

« La Charte, a déclaré M. Beaulieu, s’inscrivait dans le mouvement de libération nationale du Québec et avait pour objectif de donner aux francophones la place qui leur revient. » Il a rappelé qu’à l’époque seuls deux groupes ethniques sur 14 présents au Québec avaient des revenus inférieurs aux francophones.

Le président du MMF a souligné l’importance des mesures scolaires de la Charte pour freiner le déclin démographique des francophones, mesures une nouvelle fois remises en cause par le jugement de la Cour d’appel sur la loi 104 qui permet de contourner les dispositions de la loi 101 et donne l’accès à l’école anglaise aux élèves qui auraient fréquenté une école privée anglaise non-subventionnée ne serait-ce que pendant un an. Ce passe-droit permet également l’accès à l’école anglaise aux frères et sœurs de l’élève, de même qu’à leurs descendants.

Un rappel des objectifs de la Loi 101 par un de ses auteurs

Le sociologue Guy Rocher, un des auteurs de la Loi 101, a enchaîné en soulignant que « l’objectif principal de la Charte de la langue française était d’établir l’école française commune et de faire du français la langue normale et habituelle du travail ».

« Or, selon M. Rocher, le jugement de la Cour d’Appel invalide un article important de la loi qui empêchait les élèves d’avoir recours à l’école privée anglaise pour ensuite réclamer le droit de fréquenter l’école publique anglaise ».

M. Rocher affirme que ce jugement, en plus d’être une entorse à la Loi 101, « constitue une injustice sociale puisqu’il permet aux plus fortunés de se soustraire à la loi en fréquentant une école privée souvent hors de prix pour les familles à budgets modestes ».

Selon le sociologue, « les problèmes rencontrés au Québec s’inscrivent dans un contexte mondial où les langues nationales doivent lutter pour éviter d’être écrasées par le pouvoir d’attraction de l’anglais, la langue qui s’impose comme langue normale et habituelle ».

Un jugement rédigé uniquement en anglais contre la loi 101

Pour Jean Dorion, le président de la SSJB-Montréal, nous sommes devant « un autre affaiblissement de la Charte imposé par une instance dont les juges sont nommés exclusivement par le gouvernement fédéral ».

Il a rappelé qu’un autre jugement invalidait déjà un chapitre qui faisait du français la seule et unique langue de la justice. Comble d’ironie, la décision du juge Hilton rendue cette semaine a été rédigée uniquement en anglais !

Pour illustrer l’importance du jugement de la Cour d’Appel, M. Jean Dorion a montré, chiffres à l’appui, que la part du secteur anglophone avait augmenté constamment au cours des dix années précédant l’adoption de la loi 104 et que cette tendance s’est inversée par la suite.

L’anglais, toujours plus payant

Pour sa part, Jean-Paul Perreault, le président d’Impératif français, a démontré en s’appuyant sur les chiffres d’une étude de l’Institut C.D. Howe rendue publique récemment que, même trente ans après l’adoption de la Loi 101, les hommes unilingues anglais gagnent annuellement encore en moyenne 5 000 $ de plus que les hommes unilingues français. La différence est de 2 000 $ chez les femmes, toujours en faveur des unilingues anglais.

M. Perreault a déploré une situation où 45% des allophones travaillent encore principalement en anglais et qu’une majorité (54%) des allophones s’assimilent à la minorité anglophone.

Il s’en est pris au gouvernement du Québec qui légitime l’idée que l’anglais et le français sont toutes les deux des langues officielles au Québec – contrairement à la Charte de la langue qui ne fait que du français la langue officielle – avec sa politique de messages bilingues sur les répondeurs téléphoniques des services gouvernementaux.

Pour ces raisons, les intervenants jugent crucial de mobiliser à nouveau la population pour défendre la Charte de la langue et la survie du français au Québec. Ils se joignent au MMF pour inviter la population à venir marcher pour le 30e anniversaire de la Loi 101 dimanche le 26 août à 13 heures. Le point de départ est le métro Mont-Royal à Montréal.