Le 9 juin dernier, les Intellectuels pour la souveraineté organisait un colloque sur le bilan des dernières élections québécoises. Nous vous présentons un résumé de l’intervention de Pierre Drouilly.
Pierre Drouilly a fait alterner le froid et le chaud. Plus souvent le froid que le chaud. Son propos était plutôt pessimiste. Les principales remarques que l’on peut retenir de son analyse sont les suivantes.
- L’ADQ est peut être en train de faire au PQ ce que ce dernier avait fait à l’Union Nationale dans les années 1970, c’est-à-dire le remplacer. C’est ce que Drouilly qualifie de « réalignement ».
- Les sondages ne se sont pas trompés en ce qui concerne les scores du PQ et du PLQ. En revanche, ils ont fortement sous-estimé le vote de l’ADQ.
- La performance de Québec Solidaire et du Parti Vert est plutôt décevante. Le vote pour ces partis est un vote « parking », c’est-à-dire dû au mécontentement envers les autres partis. Les verts ont profité du vote anglophone, et quant à QS, son score de 3,7% est, d’après Drouilly, catastrophique.
- Le vote libéral est de plus en plus concentré dans les régions à forte proportion anglophone ou allophone. L’abstention a cependant été très forte chez ces populations. Dans le Québec francophone, cela devient très alarmant pour les libéraux.
- Le PLQ est le grand perdant de cette élection. Il a perdu 500 000 votes. C’est sa pire performance depuis 1867. Les votes libéraux perdus sont surtout allés à l’ADQ.
- Le vote péquiste est plus fort dans l’est de Montréal, dans le Québec périphérique (Abitibi, Saguenay, Gaspésie…) et, à un degré moindre, sur la rive sud de Montréal.
- Il ne semble pas y avoir beaucoup de péquistes qui ont voté ADQ. La chute du PQ est due, selon Drouilly, à l’abstention très forte depuis l’élection de 2003 (500 000 personnes, dont une grande partie seraient plutôt péquistes). En fait, à cette élection le PQ n’a perdu que 140 000 voix. Deux tiers des voix sont allées à l’ADQ et le reste aux tiers partis.
- L’ADQ est forte dans le centre du Québec. Très forte autour de Québec. Ce sont des régions où le PQ a été traditionnellement faible et même très faible.
Il est intéressant de constater que plus le taux de participation est fort, plus l’ADQ « performe ». Par exemple, la Beauce a voté à plus de 80 %. À noter également que les nouveaux électeurs ont très majoritairement voté ADQ ainsi que sa présence accrue en périphérie de Montréal. Cela pourrait aider à « décomplexer » les gens qui hésitaient à voter pour ce parti en raison de son image négative. Mais c’est inquiétant pour le PQ.
Selon Drouilly, Mario Dumont profite du glissement à droite de l’électorat, particulièrement dans les banlieues, où les jeunes ménages se reconnaissent moins dans les politiques sociales québécoises. Mais c’est un vote « fragile » qui peut disparaître. Les gens ont voté par mécontentement, sans la plupart du temps vraiment connaître les programmes.
Pour finir sur une note optimiste, le sociologue note que le vote souverainiste régresse depuis 1995. Il semble y avoir là une tendance lourde. Mais en contrepartie, l’appui à l’option souverainiste demeure stable à 40 – 45 %. Il semble donc s’être installée, là aussi, une tendance lourde pour cette option.
Beaucoup de gens ne voteraient pas PQ mais voteraient Oui à un référendum. C’est peut-être à partir de ce paradoxe que les souverainistes doivent asseoir leur démarche future. Ils doivent également s’efforcer de récupérer une bonne partie des 500 000 abstentionnistes de 2003. S’ils peuvent relever ces défis, alors tout est encore ouvert.