Le Journal de Montréal a fait paraître [le 3 octobre] en page 28 un article signé de ma main portant le titre racoleur : «Nationaliser les médicaments?».
Plusieurs m'ont demandé des explications sur le sujet, étonnés d'apprendre que Québec Solidaire (QS) voudrait nationaliser les compagnies pharmaceutiques. [Or, en lisant l’article publié par le Journal de Montréal], vous constaterez qu'il n'est nullement question de nationaliser les pharmaceutiques, ce qui n'est en ce moment ni souhaitable, ni faisable.
QS propose plutôt la création d'une entreprise pharmaceutique sous contrôle public - Pharma Québec - qui s'inspire beaucoup des principales recommandations de la commission Romanow en matière de médicaments, soit d'établir une Agence du médicament « pour contrôler les coûts, évaluer les médicaments actuels et nouveaux et assurer la qualité, la sécurité et l’efficience de l’ensemble des médicaments d’ordonnance ».
Pharma Québec aurait donc pour buts:
1- Tout d'abord de mieux négocier le prix des médicaments à l'échelle du Québec pour les achats couverts par la Régie de l’assurance-maladie du Québec (RAMQ), dans le régime public d'assurance-médicament (actuellement 3 milliards par année, en croissance de 300% en 8 ans).
La Nouvelle-Zélande pratique ce modèle depuis environ 10 ans avec un succès remarquable, ayant réussi à baisser ses coûts de médicaments de 60%. C'est le « modèle Kiwi » que décrit Jean-Claude St-Onge dans son ABCédaire des médicaments chez Écosociété.
Au Québec, les hôpitaux regroupés « qui négocient les prix des médicaments de façon centralisée obtiennent de meilleurs prix que ce que la Régie de l’assurance-maladie du Québec paie. Or, la RAMQ ne négocie pas les prix. Les écarts sont importants. Par exemple, La Presse rapporte que les hôpitaux paient des flacons de Captopril 92$ alors que pour le même médicament, la Régie de l’assurance-maladie du Québec paie 279$, le Ranitidine se vend 33$ aux hôpitaux de Montréal, et 202 $ à la RAMQ. » (Source : Coalition Solidarité Santé, Demande d'enquête publique sur les pratiques commerciales douteuses de l’industrie pharmaceutique au Québec, mai 2003).
Si la RAMQ négociait comme nos hôpitaux, les économies réalisées seraient de l'ordre de 1 à 2 milliards par année, ce qui équivaut à 30 à 60% de réduction (estimés basés sur le spectre des économies réalisées par des consortiums d’achat groupés d’hôpitaux québécois et celles réalisées dans le modèle Kiwi ). Ce qui est encore en deçà de l'analyse de la commission Romanow qui démontrait que les provinces achètent leurs médicaments 3 à 6 fois trop chers.
2- Avec les économies réalisées, d’investir dans la recherche et le développement de produits novateurs par Pharma Québec, au bénéfice de la collectivité. Le Québec regorge de talents et de compétences en matière d'innovation pharmaceutique. Mais ces talents bénéficient actuellement à des multinationales avides d'enregistrer leurs brevets dans les paradis fiscaux.
[Un bon exemple est celui] de Merck, avec Singulair, développé à Montréal, mais breveté par une filiale de Merck aux Barbades et dont les ventes ont généré un bénéfice tel que Revenu Canada estime l'impôt non payé sur ce seul produit à 2 milliards de dollars!
Amir Khadir, 4 octobre 2007
(Photo: QS)
Pas de nationalisation des médicaments
2007/10/08 | Par Amir Khadir