L’aut’revue de presse

2008/04/17 | Par Pierre Dubuc

Brouillard à La Presse

Tous les journaux du pays, de même que les chaînes de télévision, ont fait leur manchette avec la descente de la GRC dans les bureaux du Parti conservateur. Tous les journaux, sauf La Presse…

Pourtant, la GRC avait averti les médias pour qu’ils soient présents et y est retourné le lendemain pour que ceux qui, comme La Presse, auraient manqué l’événement puissent se reprendre.

Mais non. Dans La Presse du mercredi, 16 avril, la nouvelle est placée loin, en page A8. Dans l’édition du jeudi, 17 avril, on n’en fait même pas mention. La manchette de La Presse du mercredi était « Papier commercial - De gros clients se rebellent contre la Banque Nationale », une nouvelle qui n’en était pas une et que tous les autres journaux ont relégué loin dans les pages intérieures.

Dans sa chronique du 16 avril intitulée « Le brouillard conservateur », la journaliste Manon Cornellier rappelle que l’affaire avait été mise au jour en septembre dernier par l’Ottawa Citizen et Le Devoir et qu’elle « a été largement ignorée par les médias québécois, à part Le Devoir. »

Il faut croire que le brouillard conservateur enveloppe La Presse.

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Hillier se retire, la presse le pleure

Concert de louanges pour le général Hillier au lendemain de l’annonce de sa démission. Même l’« éditorialiste-philosophe » de La Presse, Mario Roy, y est allé de son petit boniment pour le général qui « n’a jamais tenté de cacher sous le manteau de la rectitude politique ce qu’est la vraie nature de l’action militaire ».

Personne n’a rappelé que c’est en grande partie à cause du général Hillier que le Canada est embourbé en Afghanistan. Dans le livre-choc The Unexpected War, Janice Gross Stein (une des politicologues les plus respectés au Canada anglais) et Eugene Lang (chef de cabinet du ministère de la Défense de 2002 à 2006), ont démontré que la présence du Canada à Kandahar vient des pressions de l’état-major canadien qui mène une cabale pro-américaine depuis le 11 septembre.

Les auteurs racontent que le premier ministre Paul Martin se serait laissé manipuler par l’establishment militaire jusqu’à ce que Kandahar apparaisse comme la seule option pour le Canada.

Le général Hillier était très familier avec l’armée américaine. De 1998 à 2000, il a été général commandant-adjoint canadien du IIIe Corps blindé de l’armée des États-Unis, à Fort Hood, au Texas.

La palme de l’indécence journalistique concernant son départ revient sans doute à la journaliste Christie Blatchford du Globe and Mail. Son article paru en page frontispice du Globe est coiffé du titre : « He was a decent man, doing a decent job for indecent politicians ».

Un titre qui prend parti pour le général dans la principale polémique l’entourant, soit qu’il ait favorisé la primauté des militaires sur les politiques, qu’il ait été un MacArthur canadien. On se rappellera que le président Truman avait dû démettre dans les années 1950 le général Douglas MacArthur parce qu’il voulait élargir la guerre de Corée à la Chine, avec l’utilisation au besoin d’armes nucléaires.

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Les Français seront 3 500 dans le bourbier afghan

La France enverra 700 soldats supplémentaires en Afghanistan, déclarait le président Sarkozy au Sommet de l’Otan. Mais selon l’enquête du journaliste Claude Angeli du Canard Enchaîné, c’est plutôt 3 500 Français qui « seront envoyés dans ce bourbier ».

Dans un article intitulé « Les renforts cachés de Sarko ‘‘l’Afghan’’ », Claude Angeli aligne les chiffres suivants obtenus auprès de sources proches de l’état-major français. En plus des 2 380 hommes déjà sur le terrain et des 700 autres annoncés par Sarkozy, Paris enverra « clandestinement » 300 officiers membres des forces spéciales, une cinquième équipe de 80 instructeurs insérés dans l’armée afghane et participant aux combats.

Au fait, combien y a-t-il exactement de militaires canadiens en Afghanistan?

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New York renonce à un port méthanier

Le 16 avril, le Globe and Mail nous apprend dans un article qui fait une demi-page avec une grande photo que le gouverneur de l’État de New York vient de bloquer la construction d’un port méthanier projeté par TransCanada Corporation et Royal Dutch Shell.

Le gouverneur David Paterson a utilisé une expression intéressante pour justifier son refus. Il a déclaré qu’il était « fondamentalement erroné de privatiser les eaux ».

Il a ajouté qu’il voulait protéger le Long Island Sound, cette partie de territoire entre le Connecticut et Long Island. « Tous ceux qui ont été sur ces côtés et qui ont pu contempler ce magnifique paysage marin comprennent que ce n’est pas la place pour un projet industriel. »

On pourrait peut-être l’inviter à l’île d’Orléans pour avoir son avis sur le projet Rabaska. Mais parions que nos journaux n’en feraient pas mention.

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Le show Al Gore n’impressionne pas Yakabuski

Le journaliste Konrad Yakabuski du Globe and Mail n’a pas été impressionné par le grand show médiatique orchestré par La Presse lors de la visite de Al Gore au Québec. Yakabuski commente la photo pleine page de La Presse montrant Al Gore entouré de Guy Crevier, l’éditeur de La Presse, et André Desmarais de la direction de Power Corporation coiffée du tire « L’effet Gore ».

Il souligne que Power Corporation et ses filiales canadiennes ne sont pas inscrites sur la liste des entreprises ayant refusé de participer au « Carbon Disclosure Project » (CDP), une enquête réalisée auprès des entreprises du FT500 (les 500 plus grandes entreprises du monde en termes de capitalisation boursière) pour le compte des investisseurs institutionnels, afin de collecter des informations concernant leurs émissions de gaz à effet de serre et leur politique sur ce sujet.

Bien entendu, rappelle le journaliste du Globe, les entreprises de Power Corporation en Amérique du Nord opèrent surtout dans le secteur financier, un secteur qui produit peu d’émissions de gaz carbonique.

Mais la situation est différente en Europe. Avec son associé le belge Albert Frère, Power Corporation est un des principaux actionnaires de trois grands émetteurs de gaz à effet de serre : la pétrolière Total, le géant gazier Suez, également producteur d’électricité et les ciments Lafarge. Paul Desmarais Jr siège sur le conseil d’administration de ces trois entreprises qui généraient en 2006 235 millions de tonnes de gaz à effet de serre, soit autant que toute l’Alberta!

Ces trois compagnies sont cotées sur le Carbon Disclosure Project. Total obtient un médiocre 56 sur une échelle de 100 et Lafargue 51. À titre de comparaison, mentionnons que Alcan obtient un score de 80,7.

Ah! Si seulement Al Gore avait su cela…

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Le racket des indices

Le magazine Harper du mois de mai publie un très intéressant article du réputé politicologue Kevin Philipps intitulé « Numbers Racket : Why is the Economy is Worse Than We Know ».

Dans cet article, Philipps explique comment, au cours des ans, l’administration américaine a trafiqué les indices sur le chômage, les prix et produit intérieur brut avec de nouvelles « définitions ».

Selon ses calculs, le taux de chômage réel serait de 8% plutôt que le taux officiel de 5%, l’inflation serait de 5% plutôt que de 2% et la croissance de 1% plutôt que de 3 ou 4% comme le veut le discours officiel.

À quand un pareil exercice pour le Canada et le Québec?

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La domination des financiers chiffrée

Dans un dossier sur Wall Street par dans le magazine The Economist (22 mars 2008), on apprend que le secteur des services financiers aux États-Unis s’est accaparé en 2007 plus de 40% de l’ensemble des profits des corporations. En 1980, cette part s’établissait à 10%.

Selon l’étude citée par le magazine londonien, le secteur des services financiers américains compte pour seulement 15% de l’ensemble de la valeur ajoutée par les corporations et n’emploie qu’un maigre 5% de tous les emplois du secteur privé.

Le titre de l’article est éloquent : « What Went Wrong ».