Ayant couvert le conseil national de Québec solidaire, qui s’est déroulé à Québec du 27 février au 1er mars, les courriéristes parlementaires du Devoir et de The Gazette ont fait passer au second plan les discussions et les décisions prises par les délégués pour mettre plutôt en vedette, dans leurs articles publiés le 2 mars, le fait que le député Amir Khadir se soit absenté durant ces assises.
Ce dernier, d’origine iranienne comme on le sait, a en effet participé à une activité de l’Association des étudiants iraniens de l’Université de Toronto, samedi le 28, après s’être adressé aux militants de son parti et avoir fraternisé personnellement avec eux lors de la séance d’ouverture du conseil vendredi soir le 27.
« Khadir rate le conseil national » déplorait même Le Devoir dans une manchette de page 1. Le journaliste Antoine Robitaille a consacré plus de 60 % de son article à ce fait divers laissant entendre que le député de Mercier ne s’intéressait pas aux débats et snobait les militants. L’article de The Gazette était de la même eau.
Ce festival de la désinformation s’est poursuivi dans La Presse, mardi le 3, alors que la chroniqueuse Lysiane Gagnon a continué à s’en prendre au député de Mercier pour cette absence. Cette dernière en a même profité pour reprocher à M. Khadir d’avoir donné rendez-vous à une journaliste dès 8h15 le lendemain matin de la journée du scrutin plutôt qu’à une heure plus décente.
Mme Gagnon ignore-t-elle que le nouveau député devait alors se rendre rapidement travailler à l’hôpital Legardeur dont il avait dû s’absenter pendant la campagne électorale? Mais toujours aussi ineffable cette dernière a commenté méchamment : « Le besoin d’être dans le spotlight doit être vraiment très fort chez cet homme-là! ».
Une autre tactique est de plus en plus fréquemment employée par certains journalistes : tenter d’opposer les deux porte-parole du parti, Françoise David qui n’a pu se faire élire dans Gouin et Khadir qui l’a été dans Mercier.
Voici un autre extrait de la chronique de Mme Gagnon qui l’illustre bien : « On comprend qu’il (Khadir) ait trouvé plus intéressant d’être en vedette à Toronto (plutôt) que de se contenter d’écouter sagement les interventions des militants de son parti pendant deux longues journées en étant flanqué, par-dessus le marché, d’une coprésidente à laquelle il aurait tout de même dû céder le crachoir de temps à autre ».
Ce ton journalistique, cynique et persifleur, est à la mode depuis plusieurs années sur la colline parlementaire québécoise. Il contribue beaucoup à maintenir la morosité ambiante dans les cercles politiques qui déteint maintenant dans l’ensemble de la population. Au lieu de rapporter correctement et de commenter de façon pertinente le contenu des politiques mises de l’avant par les différents partis, on s’arrête souvent à des aspects superficiels de l’actualité en s’efforçant d’écorcher la personnalité des politiciens qui les préconisent et en ne se privant surtout pas de leur faire des procès d’intention si les circonstances le permettent.
Un nouveau parti de gauche idéaliste comme l’est Québec solidaire, dont le programme se démarque des partis traditionnels, constitue certes une cible de choix pour ceux et celles qui pratiquent ce genre de journalisme qui se veut ‘cool ’, mais qui traduit souvent leur incompétence professionnelle, leur paresse intellectuelle ou leurs préjugés.
L’auteur est ex-courriériste parlementaire du Devoir et membre de Québec solidaire
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