Emir est un film musical. Réalisé par le Philippin Chito S. Roño. L’histoire se passe dans l’univers totalement fictif d’un émirat du Moyen-Orient. Un pur régal pour les yeux et un enchantement pour les amateurs de musique rythmée et de chorégraphies à la façon bollywoodienne. Le choix du tagalog comme langue principale du film ajoute au dépaysement et au charme.
Comme ses parents, Amélia (prodigieuse Frencheska Farr), une ouvrière agricole, elle est confrontée à la misère qui afflige la population qui travaille dans les champs. L’énorme responsabilité de partir à l’étranger retombe sur ses épaules.
Arrivée à destination, Amélia est embauchée comme bonne (yaya) au service d’un émir et de sa famille. Son caractère bienveillant et son sens aigu du devoir lui vaut la confiance de l’épouse du Sheikh qui lui confie l’éducation de Ahmed, son nouveau-né et fils unique de la famille.
Il grandira au milieu des servantes philippines de qui il apprendra les coutumes et la langue. Lorsque la guerre éclate – visiblement celle du Golfe – Amélia s’enfuit avec l’enfant pour le conduire dans un lieu où il sera en sécurité. Après douze ans de dur labeur, elle retourne dans son pays où tout a changé.
Emir est un magnifique hommage aux Philippines qui quittent leur pays pour aller servir les riches de ce monde. L’argent de ces « OFW, Overseas Filipino Workers, l’acronyme pour désigner ces femmes » est essentiel à leur famille qui doit s’en remettre à leur fille pour survivre dans un pays dont la situation politique est chaotique. Il ne faut pas oublier que de nombreuses femmes issues de cette communauté ethnique font ce travail ici même au Québec.
Grâce à des interprètes d’une grande valeur, au scénario confié à Jerry Gracio, honoré cette année d’un prestigieux prix de littérature au Palanca Awards à Manille, et à l’Orchestre philarmonique des Philippines, le film de Chito S. Roño, présenté dans la section Regards sur les cinémas du monde, est très réussi.
La carrière de Chito S. Roño doit être soulignée. Il fait ses débuts en 1986 avec Private Show, une œuvre acclamée aux Philippines et sélectionnée au Festival international des films de Chicago la même année. Depuis, sa feuille de route est constellée de nombreux prix, notamment celui du Festival international des films de Toronto en 1998 avec son film The Woman Without Rest qui marquait sa troisième participation à ce festival. Il a en tout trente réalisations à son actif dont un deuxième pour l’année 2010 (Hula) et Dagaw, attendu en 2011.
Emir est présenté les 3 et 4 septembre au cinéma ONF.
Appréciation :
Du même auteur
Pages
Dans la même catégorie
2024/11/29 | Désespérances d’idéaux déchus |
2024/11/14 | Doublé théâtral, sagesse clairvoyante |
2024/11/06 | Jovette Marchessault vue par Julie Vincent |
2024/10/24 | L’indépendance : 35% : le chiffre maudit! |
2024/10/04 | La bataille de Saint-Léonard de Félix Rose |