Celui – ou celle, on ne sait jamais – qui, pour la première fois, a lancé ce dicton a singulièrement manqué de respect à un animal dont la vie tout entière est consacrée à notre plaisir.
Dans la vraie vie en effet, le cochon n’est pas celui auquel on pense. Il m’a été donné d’en voir arriver plusieurs centaines dans un abattoir. D’entendre leurs cris d’effroi à l’odeur de la mort toute proche. Des yeux qui parlent presque, qui disent : Sortez-moi d’ici… Ces cochons ont rendu à l’humanité de très précieux services. On ne peut pas en dire autant de certains petits pharaons de passage qui viennent régulièrement polluer notre quotidien.
Ils sont nombreux ceux que les gouvernements gavent de subventions, de prêts remboursables aux calendes grecques, d’abattements d’impôt. Si les génies retors qui inventent constamment de nouveaux trucs pour échapper à leurs responsabilités mettaient autant d’efforts pour améliorer la vie en société, de vouloir le bien des gens plutôt que leurs biens, qui sait si on ne finirait pas un jour par manquer de problèmes tellement les solutions pleuvraient !
Des gens d’affaires, des banquiers, des financiers véreux, des entreprises qui peuvent s’évader sans risque dans des paradis fiscaux alors que le gagne-petit, lui, est collecté à la source. Une source bien vite tarie tant les iniquités fiscales font loi.
Récemment, le site des Éditions vie économique faisait état d’une recherche du Centre canadien des politiques alternatives portant sur les plus riches de ce pays. Jamais depuis les années 1920, y constate-t-on, les riches n’ont accaparé une part aussi importante de la richesse produite.
De 1997 à 2007, le groupe de 1 pour cent le plus riche a mis la main sur 32 pour cent de la richesse. En comparaison, de 1950 à 1960, les plus riches avaient vu leur richesse augmenter de 8 pour cent. Idem pour l’impôt. En 1946, le taux d’imposition marginal des plus riches était de 80 pour cent. Il est aujourd’hui de 42,9 pour cent, un taux qui rejoint celui des années 1920.
Quand on les voit apparaître sur la place publique, ces matamores qui font la loi en s’imposant aux gouvernants font la plupart du temps preuve du plus total irrespect à l’égard de ceux et celles qui ont le malheur d’être dans leur entourage. C’est leur marque de commerce, l’irrespect, fils cadet du mépris.
Vous vous souvenez de quelle manière les 1300 travailleuses et travailleurs de la compagnie Electrolux ont appris la fermeture de leur usine, implantée à L’Assomption depuis 10 ans ? En écoutant un boss leur annoncer la chose dans la langue du vrai pouvoir, la langue anglaise, en présence d’une trentaine de colosses unilingues chargés de s’assurer que les autochtones se tiennent bien tranquilles et qui fouillaient dans les boîtes à lunch de ces terroristes potentiels.
Bill Benson, ci-devant Vice-President Exploitation, Electrolux Major Appliance North America, leur a parlé d’une conjoncture difficile. Mais ce sont plutôt les millions de la ville de Memphis, au Tennessee, qui ont amené cette entreprise à se vendre au plus offrant.
Présent à Davos, le ministre Clément Gignac s’est fait dire par la compagnie qu’elle n’avait pas le temps de le rencontrer. Sans doute le ministre voulait-il parler du remboursement d’une subvention accordée par le gouvernement du Québec ? Un résiduel de quelque 2 millions $.
Il y a une dizaine d’années, Bombardier, qui n’est ni de Londres, ni de New York, ni de Pékin mais de Valcourt, PQ., réunissait les travailleurs de l’usine de Saint-Laurent pour leur annoncer que 2500 d’entre eux seraient mis à pied pour une période indéterminée.
On leur remettait une lettre du President and Chief Executive Officer, Bob Brown, qui indiquait : « We will be working to ensure that all the employees are treated with dignity and respect during this period of incertainty… »
À un travailleur qui avait demandé pourquoi la lettre n’était pas disponible en français, on avait répondu que la compagnie n’avait pas eu le temps de la traduire. Je vous le demande : y a-t-il une entreprise davantage subventionnée que Bombardier ? À coups de centaines de millions $.
Avouant que son lock-out au Journal de Montréal était « violent, mais incontournable », Pierre Karl Péladeau n’a surtout pas insisté, en commission parlementaire, sur le fait qu’il a bâti son empire avec pas moins de 3,2 milliards $ qui lui ont été filés par la Caisse de dépôt.
Me semble qu’aurait été de mise un petit remerciement à l’endroit des travailleuses et des travailleurs qui font sa fortune, comme à l’endroit des contribuables qui le financent aussi lourdement.
La dignité… Le respect… C’est justement ce qu’avaient invoqué les gars de Canadian Gypsum à Joliette quand, en 1973, l’entreprise de Chicago avait obtenu d’un juge une injonction interdisant le piquetage à moins de 1000 pieds de l’usine. Rédigée dans la seule langue anglaise, l’injonction !
À votre avis, qui vient chier sur le perron ? Non, c’est pas le cochon…
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