Manifestement, la personnalité des deux commissaires que le gouvernement Charest a nommés au cours de la dernière année pour présider des commissions d’enquête est aux antipodes l’une de l’autre.
Autant l’ex-juge Michel Bastarache, qui a présidé l’enquête sur le processus de nomination des juges, a été bavard sur la place publique dès l’annonce de sa nomination; autant la juge France Charbonneau, appelée à présider la commission d’enquête sur l’industrie de la construction, a été muette comme une carpe depuis le 19 octobre dernier.
Ce silence soulève plusieurs points d’interrogation. La juge serait-elle en train de reconsidérer sa décision précipitée d’accepter de présider ce qui jusqu’ici s’avère être un simulacre d’enquête?
Entérine-t-elle les propos tenus par le premier ministre au congrès libéral le 21 octobre?
Est-ce qu’elle attend plutôt, avant de faire toute déclaration publique, d’être en mesure d’annoncer le choix des commissaires associés qu’elle aura choisis?
Cette incertitude crée un climat malsain au sein de la population qui risque de nuire grandement à la crédibilité non seulement de la commissaire et des travaux de la commission qu’elle doit présider, mais aussi de miner la confiance des citoyens envers notre système judiciaire.
Normalement, le gouvernement aurait dû modifier de lui-même son décret du 19 octobre pour accorder à la commission le pouvoir de contraindre les témoins notamment.
Mais le premier ministre Charest a plutôt décidé que c’est la juge Charbonneau qui devra quémander ce changement. Il soumet ainsi le pouvoir judiciaire au pouvoir exécutif alors que, selon le principe de la séparation des pouvoirs sur lequel repose notre régime politique, il doit exister une cloison étanche entre les deux et que le premier doit être totalement indépendant du second.
La situation actuelle laisse malheureusement planer des doutes à ce sujet. Qu’adviendrait-il, par exemple, si le gouvernement ou le parti libéral étaient pointés du doigt lors de l’enquête? Risquerait-on d’assister à du camouflage en bonne et due forme?
Il faut que la population soit rassurée immédiatement sur la capacité et la volonté de cette commission de livrer la marchandise. Ce n’est certes pas le gouvernement Charest qui peut le faire.
La balle est donc dans le camp de la juge Charbonneau qui jusqu’ici a joui d’une grande crédibilité qui, malheureusement, pourrait vite s’estomper à cause des manigances de politiciens plus préoccupés par leurs intérêts personnels et partisans que par l’intérêt général. Que la commissaire se manifeste, qu’elle cesse de se comporter comme un fantôme. Ce n’est certes pas trop lui demander trois semaines après sa nomination.
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