Le ministre des Finances du gouvernement du Québec avait laissé entendre qu’il déposerait un budget costaud, il déçoit. Ce budget reste dominé par une perspective étroite : le retour à l’équilibre budgétaire pour 2013-2014, peu importe ce qu’il adviendra d’une croissance économique qui, le gouvernement le reconnaît lui-même, donne déjà des signes de faiblesse.
« Le ministre aborde l’avenir en mode défensif, comme si la réduction de la dette était le seul moyen d’imaginer l’avenir. Le Québec a pourtant les moyens de bouger. C’est désolant de constater que rien n’est prévu pour relever les grands défis de l’économie québécoise. On se réjouit de la volonté du gouvernement d’intervenir dans l’industrie, mais on se désole de constater que les mesures s’additionnent sans plan d’ensemble », a déclaré l’économiste et directeur général de l’IRÉC, Robert Laplante
« Nous réclamons une politique industrielle globale et cohérente, en particulier en faveur des transports collectifs électrifiés. Or, rien de vraiment substantiel en matière de transport collectif. C’est notre métropole qui va beaucoup souffrir et l’on se demande comment on peut oser parler d’avenir sans se donner les moyens d’un essor véritable », a fait remarquer le directeur général de l’IRÉC.
Un budget confirmant le choc tarifaire et l’érosion du filet de protection sociale
Le budget s’inscrit dans la lignée des choix discutables effectués lors des deux exercices précédents. « Il n’y a rien de bien glorieux à prévoir une augmentation des revenus en provenance de la contribution santé qui passera à 200 $ par personne cette année. C’est une mesure régressive qui va à l’encontre de nos exigences de justice sociale. Il en va de même pour le maintien de la hausse des droits de scolarité. Il ne faut pas se leurrer, les annonces principales de ce budget ont déjà été faites. La hausse des tarifs d’Hydro-Québec, la hausse de la taxe sur le carburant, la hausse des tarifs pour plusieurs services gouvernementaux, tout cela vient constituer le fondement de ce budget », a constaté le directeur de l’IRÉC.
« Le gouvernement s’entête dans des choix qui érodent notre filet de protection sociale. L’établissement du régime volontaire d’épargne retraite va dans la direction opposée à celle qu’il faudrait prendre en renforçant notre régime public. Prôner des solutions individuelles revient à laisser jouer les inégalités sociales. C’est l’application du principe de l’utilisateur-payeur à la sécurité de nos vieux jours. En outre, les employeurs ne seront même pas tenus d’y cotiser. Le slogan que nous répète sans cesse le ministre - que chacun fasse sa juste part, selon l’anglicisme consacré – est plutôt mal choisi », a fait remarquer Robert Laplante.
La déception est grande également en ce qui concerne les mesures touchant les services aux personnes. « Il n’y a rien de nouveau pour les Centres de la petite enfance puisque le gouvernement annonce toujours les mêmes 15 000 places. Pour les aînés, il faut voir que derrière les montants avancés par le gouvernement, il n’y a que 850 nouvelles places d’hébergement dans les CHSLD. En outre, le gouvernement continue de privilégier les solutions individualisantes plutôt que les réponses collectives en privilégiant les crédits d’impôt pour les services d’aide à domicile plutôt qu’en misant sur un plus fort développement des entreprises collectives de services d’aide à domicile », a déploré l’économiste.
Plan Nord : des mesures inoffensives
Enfin, les mesures touchant l’amélioration du Plan Nord et le modèle de perception des redevances restent aussi timides qu’inoffensives. « Ajouter 500 millions $ pour des prises de participation, c’est encore nettement insuffisant quand on connaît l’ampleur des moyens que requièrent les projets miniers de cette envergure. Cela condamne le Québec à des rôles de subalterne. Les mesures annoncées ne laissent rien prévoir d’une ambition d’accroître la transformation des matières premières. Enfin, les mesures touchant les redevances concernant le gaz de schiste et les hydrocarbures passent à côté de l’essentiel : c’est la technologie d’extraction qui est en cause. Avant de penser à en tirer des revenus, il faut s’assurer qu’elle ne sera pas dévastatrice, ce qui est loin d’être démontré », a précisé le directeur de l’IRÉC.
Une profession de foi envers le marché
« Bref, a conclu Robert Laplante, ce budget ne porte pas une vision de l’avenir du Québec, il demeure une profession de foi dans le marché. On comprend mal le ministre d’y croire autant quand il prévoit lui-même une croissance faible. Nous avions besoin d’une intervention vigoureuse et imaginative de l’État, nous avons eu droit à un exercice d’intendance. C’est insuffisant. C’est inadéquat. Il n’y a dans ce budget rien de mobilisateur ».
Pour connaître les résultats des travaux de l’IRÉC, voir www.irec.net
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