Dans une importante note d’intervention sur la démographie, l’économiste Gilles L. Bourque remet les pendules à l’heure. « Lorsque nous regardons les tendances démographiques à plus long terme dans le monde et au Québec, a-t-il déclaré, nous constatons que le Québec est en phase avec ce qui va se passer ailleurs. Nous allons vivre une transition démographique qui se rapproche de celle de la moyenne des pays industrialisés. Il est inconcevable de laisser entendre que nous devrions connaître, année après année, une répétition de déficits publics dans les décennies à venir en raison du vieillissement de la population et de la perte de la compétitivité de l’économie québécoise ».
« Ce discours apocalyptique associant vieillissement de la population et difficultés économiques n’est pas crédible. Cet alarmisme n’a pas d’assise scientifique solide. Il simplifie abusivement la relation complexe qui s’établit entre le potentiel humain et la capacité productive. D’ailleurs, nous avons connu entre 1971 et 2006 une diminution graduelle du rapport de dépendance de la population québécoise en raison d’une baisse de la natalité et d’une évolution assez stable du nombre de personnes de 65 ans et plus. Mais cela ne s’est pas traduit par un Âge d’or des surplus budgétaires! » a poursuivi l’économiste de l’IRÉC.
2011 : une année de transition démographique
L’année 2011 aura été un moment important de l’évolution démographique québécoise : les premiers baby-boomers ont en effet franchi le cap des 65 ans, pendant que les plus jeunes d’entre eux l’atteindront en 2030. Le Québec est entré de plain-pied dans une phase de transition importante vers un nouveau régime démographique.
Selon le chercheur de l’IRÉC, le Québec se trouvera dans une position avantageuse. En effet, dans les pays développés, les changements démographiques ont été plus faciles à absorber et les réformes ont pu être faites progressivement, de telle sorte que l’adaptation au nouveau régime démographique est relativement bien supportée par la population.
« Le véritable défi se situe dans les pays du Sud, en raison du rythme bien plus rapide du vieillissement démographique à venir. D’autant plus qu’ils n’ont ni le même patrimoine accumulé, ni les solides institutions démocratiques pour bien gouverner ce phénomène », a constaté l’économiste.
À partir du début des années 2040, la transition serait sensiblement achevée pour les pays développés. Les effectifs des trois principaux groupes d’âge vont se stabiliser avec une population active correspondant à un peu moins du double des effectifs des 65 ans et plus.
« Le ratio de soutien démographique au Québec c’est-à-dire le nombre de personnes en âge de travailler pour chaque personne de plus de 65 ans qui était de plus de quatre dans les années 2000, passera donc légèrement sous la barre du deux à partir des années 2050. C’est exactement le ratio vers lequel convergera l’ensemble de la planète pour la même période », a indiqué le chercheur de l’IRÉC.
« D’ailleurs, a-t-il souligné, les plus récentes perspectives démographiques de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) réalisées en 2009 sur la base du recensement de 2006 ont été changées de façon significative. Sur l’horizon 2056, on prévoit une population de 9,1 millions de personnes au Québec, soit 1,6 million de plus qu’en 2006, ainsi que 4,2 millions de ménages. Le nombre de ménages augmente plus rapidement que la population puisqu’on assiste à la diminution du nombre moyen de personnes par ménage. Ce dernier passe en effet, entre 2006 et 2036, de 2,39 à 2,17 personnes par ménage, puis demeure à ce niveau jusqu’en 2056. La croissance plus forte du nombre de ménages est importante puisque c’est le nombre de ménages qui joue le rôle le plus significatif pour le développement des sociétés ».
Enfin, une étude de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) le confirme : les principaux pays de l’OCDE devraient connaître une forte convergence des ratios au cours des quarante prochaines années. En 2050, la moyenne du ratio de soutien démographique des pays membres de l’OCDE sera de 2,1. À cette date, 13 des 35 pays membres devraient avoir un ratio sous la barre de 2. Avec 1,9, le ratio du Québec se situe encore une fois très près de la moyenne.
Soulignons que l’auteur fera paraître sous peu une deuxième note approfondissant les principaux enjeux socioéconomiques liés au vieillissement pour le Québec.
Pour connaître les résultats des travaux de l’IRÉC, voir www.irec.net