Respectivement président et secrétaire du SPQ Libre
Coup de tonnerre sur la scène politique. En pleine campagne électorale québécoise, Thomas Mulcair, le chef du NPD fédéral, annonce la création d’une succursale provinciale au Québec.
Le signal est double : le NPD est prêt à prendre la relève des Libéraux de Jean Charest en cas de déconfiture de ce parti, comme il l’a fait au Québec avec le Parti Libéral fédéral lors de la dernière élection fédérale. Deuxièmement, c’est un geste de désaveu à l’endroit de Québec solidaire avec lequel le NPD entretenait jusqu’ici des liens étroits.
« Il y aura un NPD provincial, mais aux prochaines élections » a affirmé sans détour M. Mulcair à l’occasion d’un dîner-conférence de l’École d’été de l’Institut du Nouveau Monde, rapporte Le Devoir et les autres médias ce matin, 18 août. Le nom du parti a été réservé au mois de juin auprès du Directeur général des élections et Mulcair affirme se préparer pour un rendez-vous électoral rapide advenant l’élection d’un gouvernement minoritaire.
Manifestement, dans les cercles fédéralistes, on prend acte de la désaffection de la population du Québec, et plus particulièrement de l’électorat anglophone, à l’égard du Parti Libéral et on n’exclut pas une totale déconfiture.
Avec « Sa famille a souhaité qu’il quitte la vie politique », comme titre coiffant l’entrevue de Denis Lessard avec Jean Charest et l’éditorial « l’arme rouillée de M. Charest » d’André Pratte, on comprend que La Presse s’apprête à fermer les livres sur l’ère Charest.
On doit également se demander dans les cercles fédéralistes si le Parti Libéral est récupérable ou s’il est condamné au même sort, au Québec, que son grand frère fédéral. Après tout, l’ampleur de la corruption, qui sera révélée par la Commission Charbonneau, dépassera de toute évidence le scandale des commandites.
Le pion Legault dans le grand jeu fédéraliste
L’arrivée annoncée d’un nouveau parti, pur, sans tache, propret, parrainée par le NPD fédéral, dont le chef a déjà été ministre libéral et avocat d’Alliance Québec, offrirait toutes les garanties que demandent les milieux d’affaires et la communauté anglophone.
Le scénario sur lequel semblent tabler les fédéralistes est un gouvernement minoritaire du Parti Québécois. Mais qu’on chercherait à renverser à la première occasion afin de provoquer rapidement de nouvelles élections où entrerait en piste le nouveau parti NPD-Québec.
Comme par hasard, c’est d’ailleurs exactement ce que propose François Legault! En cas de gouvernement minoritaire, le renverser à la première occasion.
Il est de plus en plus évident que la CAQ, dont il faut se rappeler qu’elle est sous la tutelle de Charles Sirois, président du conseil d’administration de la CIBC, n’est qu’un pion entre les mains des fédéralistes.
La fin de Québec solidaire?
Dans le Globe and Mail, Amir Khadir se dit étonné et surpris de l’annonce de Thomas Mulcair. Il faut dire que Québec solidaire se considérait comme le partenaire québécois du NPD fédéral. Amir Khadir a donné son appui au NPD lors de la dernière élection fédérale et a reconnu avoir lui-même voté pour la candidate NPD dans sa circonscription plutôt que pour Gilles Duceppe, le chef du Bloc Québécois. Et dans plusieurs circonscriptions, les membres de Québec solidaire ont fait campagne pour le NPD.
Mais la réciproque n’est pas vraie. Il y a bien eu ici et là une certaine collaboration entre les bureaux des députés NPD et des candidats de Québec solidaire (transmission de listes de pointage, etc.), mais Thomas Mulcair a ordonné à ses députés de ne pas se mêler de la campagne électorale québécoise.
Mulcair réalise que Québec solidaire ne va nulle part. Son programme est beaucoup trop radical, l’extrême-gauche en mène trop large en son sein et malgré le peu d’importance qu’il accorde à la question nationale, sa position officielle en faveur de l’indépendance du Québec est inacceptable.
Le chef du NPD espère sûrement rapatrier au sein du nouveau NPD-Québec les membres de Québec solidaire qui partagent le même point de vue.
La conséquence prévisible est une marginalisation complète de Québec solidaire, voire sa disparition.
D’autant plus qu’on peut sérieusement se demander si Amir Khadir ne sera pas tenté d’abandonner Québec solidaire et rallier le nouveau NPD-Québec.
Déjà, comme nous l’avons vu, il a appuyé et voté pour le NPD lors de la dernière campagne fédérale. De plus, sa récente déclaration « l’indépendance si nécessaire, mais pas nécessairement l’indépendance » montre qu’il prend ses distances avec la souveraineté.
Reste à savoir si Mulcair voudra de lui!