Les 13 et 14 octobre dernier, l’association étudiante de sciences humaines de l’UQAM (AFESH) organisait un forum sur le syndicalisme étudiant. Réputée être l’association la plus militante et la plus radicale du Québec, il n’est pas surprenant qu’une telle initiative émane d’une association étudiante ayant pignon sur rue au sein des murs bruns de l’institution quarantenaire.
Plusieurs sujets à l’ordre du jour ont attiré une variété de participants, dont plusieurs cégépiens qui ont vécu une politisation accélérée avec le printemps érable.
Le samedi, les organisateurs désiraient faire aboutir la réflexion sur les raisons expliquant l’impossibilité du mouvement étudiant de mettre en branle une véritable grève sociale.
Lorsque la deuxième et dernière ronde de négociation s’est terminée dans l’impasse, la CLASSE a appelé à une grève sociale, invitant les syndicats et organisations de la société civile à embarquer dans la lutte pour faire plier le parti au pouvoir.
Cette grève ne s’est pas avéré et les panélistes ont évoqués différentes hypothèses pour expliquer cet échec : manque de mobilisation en dehors des cercles étudiants, laxisme des centrales syndicales, mauvaise presse dans les médias, etc.
Un autre atelier s’est intéressé à une particularité de la grève de 2012 par rapport aux grèves précédentes : les groupes affinitaires.
En effet, que ce soit «Profs contre la hausse», «Mères en colères», «École de la montagne rouge» ou encore du groupe de musique «Mise en demeure», le mouvement a connu une étonnante diversité d’appui en dehors de la gauche traditionnelle (partis politiques, syndicats, groupes communautaires).
Cet appui a renouvelé la légitimité du mouvement à mesure que le conflit s’éternisait. Il a également permis de politiser de nouveaux citoyens tout au long de la grève.
Un des ateliers les plus originaux était certainement celui intitulé «Que faire après et en dehors du mouvement étudiant ?»
Les organisateurs du Forum ont invité 4 panélistes qui ont été activement impliqués dans le mouvement étudiant au cours des 10 dernières années et qui sont maintenant actifs ailleurs dans d’autres mouvements sociaux et syndicaux.
Un constat plutôt négatif faisait consensus auprès des panélistes : une fois rendu en dehors du mouvement étudiant, on ne retrouve plus le niveau d’intensité et de qualité du débat intellectuel que l’on avait avant.
Dans le mouvement syndical, on se bat pour la hausse de salaire de la convention X, dans le mouvement logement on se bat à la régie contre une hausse de loyer Y, etc.
Finis les grands débats, finis les grands idéaux, l’après-mouvement étudiant serait plus terre-à-terre, plus «réaliste».
À voir l’étincelle dans les yeux des panélistes lorsqu’ils évoquaient leurs belles années de militantisme étudiant, difficile de ne pas leur donner raison.
Sans vouloir transformer cet atelier du Forum en foire d’emploi militant, les organisateurs voulaient plutôt lutter contre les drop out, ces militants engagés qui, une fois leurs études terminées, on ne revoit nulle part, comme si le militantisme avait un début et une fin, et que cette dernière se terminait une fois le diplôme obtenu.
Ces dernières années, le rapprochement de l’ASSÉ avec les organisations syndicales et les diverses coalitions sont des signes encourageants à ce chapitre.
Le forum s’est conclu sur un débat étonnant, à savoir si le syndicalisme étudiant était corporatiste ou s’il était plutôt un véhicule révolutionnaire. Discussion presque surréaliste, car si la CLASSE est l’étalon de mesure du corporatisme, qui peut sérieusement prétendre ne pas être corporatiste?
Une étonnante diversité de panéliste, incluant l’auteur de cette chronique, ont tour à tour livré leur point de vue sur l’État du syndicalisme étudiant post printemps érable.
Une chose faisait consensus, il est difficile de militer pour un groupe ou un parti politique tout en militant dans une organisation de masse comme l’est l’ASSÉ ou une centrale syndicale.
Il faut garder en tête les intérêts supérieurs du syndicat sans pour autant complètement mettre de côté ses convictions profondes et ainsi être malheureux dans son militantisme.
La force du mouvement de grève 2012 s’explique en la capacité qu’ont eue les différentes tendances au sein de la gauche étudiante de miser sur leurs points communs. «Ce qui nous unit est plus fort que ce qui nous divise» disait l’Union des forces progressiste (UFP). L’avenir du mouvement étudiant dépend de cette maxime.
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