L’introduction de mécanismes d’assurance qualité dans les collèges et universités du Québec, mise aujourd’hui de l’avant par le gouvernement en vue du Sommet sur l’éducation supérieure de l’hiver, ne règlera en rien le problème de l’augmentation des dépenses bureaucratiques et publicitaires dans les universités.
De plus, celle-ci participe d’un processus de mise en marché du secteur de l’enseignement supérieur et constitue une menace pour la mission des universités. C’est ce que révèle une étude publiée par l’Institut de recherche et d’informations socio-économique (IRIS) sur les dangers d’adopter l’assurance-qualité.
L’assurance qualité en éducation est un processus permanent et continu de « contrôle de la qualité » visant à évaluer la performance des établissements et des programmes d’enseignement supérieur.
L’objectif est d’ajuster le « prix » de la formation à la « qualité réelle » du débouché sur le marché du travail.
Devant la difficulté de mesurer la « qualité » des contenus, c’est le prix des diplômes et la réputation communicationnelle (branding) des universités qui serviront d’indicateurs.
Cela entraînera une pression à la hausse sur les frais de scolarité, de même qu’une augmentation des dépenses de marketing et de publicité dans les universités.
De plus, cela créera une pression sur les cégeps et universités pour s’assurer que les différents programmes soient arrimés aux exigences immédiates du marché du travail.
Cela mettra en péril l’autonomie et l’indépendance du système d’enseignement supérieur en le rendant vulnérable aux injonctions des marchés.
« Avec raison, le ministre Duchesne dit s’interroger quant à la réalité du prétendu « sous-financement » universitaire. Il devrait aussi mettre en doute la pertinence de mettre en place des mécanismes d’assurance qualité préconisés par l’OCDE. Ici, le terme trompeur de « qualité » joue le rôle de « Cheval de Troie » afin de permettre la mise en marché du secteur de l’éducation. Cela se traduira en retour par une pression à la hausse sur les frais de scolarité et sur les coûts de gestion. Par exemple, les États-Unis et la Grande-Bretagne, où la logique de l’assurance qualité est en place depuis longtemps, ont vu leurs coûts administratifs et de publicité exploser au fil des ans », affirme Eric Martin, co-auteur de l’étude.
« L’assurance qualité est présentée comme une façon d’améliorer le contenu de l’enseignement. Or, quand on l’étudie de plus près on constate qu’il s’agit plutôt d’un mélange entre une opération généralisée de marketing pour les organisations universitaires et une façon de faire coller plus encore le contenu des cours aux intérêts du marché. Les universités en viennent à dépenser beaucoup de ressources et d’énergie pour nous dire qu’elles sont les meilleures et se tailler une place dans les classements, mais pendant ce temps elles ne se concentrent pas à offrir effectivement un enseignement de qualité. De plus, le jugement sur ce qui constitue de la « qualité » se base le plus souvent sur des critères économiques afin que les diplômes s’adaptent le plus possible aux besoins des entreprises, au détriment de la mission de l’université » constate Maxime Ouellet, co-auteur de l’étude.
L’étude Les mécanismes d’assurance qualité dans l’enseignement supérieur est disponible gratuitement sur le web au www.iris-recherche.qc.ca.
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