Comment devrait gouverner le Parti Québécois

2013/06/04 | Par Léo-Paul Lauzon

Le Parti Québécois prétend être un parti souverainiste. Faut que ce parti arrête de faire du millage avec le leurre de l’indépendance du Québec. Je vous le dis, un Québec indépendant du reste du Canada ne serait pas plus souverain face à la véritable menace que représentent pour la démocratie et la souveraineté les grandes entreprises nationales et étrangères qui, souvent, forment des cartels organisés.

Ce sont elles qui menacent le plus la liberté et le bien-être des Québécois.

Ces compagnies, souvent plus grandes et plus riches que des États, reçoivent de leurs politiciens, qu’elles soudoient, encore plus de pouvoir par des traités de libre-échange qui font que l’État s’efface au profit des transnationales et de leur peuso-marché.

Ces mammouths économiques mettent alors en concurrence tous les pays et tous les travailleurs de la terre pour le plus petit commun dénominateur.

Elles ont tous les droits de fermer sans préavis et sans pénalité leurs usines et de les déménager dans des pays plus «compréhensifs» qui leurs offrent plus de souplesse.

Par la suite, elles nous expédient leurs produits, dorénavant fabriqués ailleurs, sans qu’on ait le droit de lever des droits de douanes ou d’imposer leurs revenus sur ce qu’elles vendent ici au pays et dans la province.

Avec les nouvelles règles qu’elles ont dictées, les pays peuvent privatiser – et sont encouragés à le faire – tous leurs services publics, leurs ressources naturelles et leurs instruments collectifs.

Mais impossible de nationaliser quoi que ce soit, sans leur verser des fortunes en fonds publics. Et elles peuvent poursuivre les gouvernements, si elles se sentent lésées par des lois trop contraignantes pour leurs affaires.

Moins d’État qu’elles clament sauf pour les subventions, et plus de policiers et de militaires pour protéger leurs biens et leurs droits ici et ailleurs, quitte à envahir militairement des pays non soumis et à financer des guerres civiles.

On a signé le traité de libre-échange avec les Etats-Unis sans aucun débat public et contre la volonté de la majorité de la population. Qu’à cela ne tienne, on refait actuellement la même chose avec l’éventuel traité de libre-échange avec l’Europe : «Les négociations sans débat, un outrage au Parlement» (Le Devoir, 12 avril 2011).

Votre beau pays démocratique n’est qu’une vue de l’esprit et une illusion. C’est Stephen Harper lui-même qu’il l’a dit en 2011 : « La démocratie est une ‘‘distraction’ dont les Canadiens ne se soucient guère, estiment les troupes de Harper » (Le Devoir, 11 mars 2011). Vraiment.

Un sondage mené en 2007 par le Financial Times de Londres et reproduit dans le Journal de Montréal du 23 juillet 2007 concluait que : « Mondialisation. Les Occidentaux de plus en plus contre », et majoritairement contre aux États-Unis, en Allemagne, en Grande-Bretagne et en France.

Contrairement à ce que prétendent les lucides intéressés, les économistes de la Banque CIBC l’ont admis : « La mondialisation est réversible » (Journal de Montréal, 28 mai 2008).

Il y avait l’imposant, physiquement s’entend, ex-président de la Caisse de dépôt, Henri-Paul Rousseau, qui nous a fait perdre collectivement plus de 40 milliards $ avec ses placements débiles, qui lui, par contre, avait prétendu que la mondialisation était « incontournable » (Le Journal de Montréal, 9 mai 2007). Tout un commis de l’État qui a été repêché par Power Corp.

Dans un autre sondage international publié dans le Journal de Montréal du 3 janvier 2008, le titre de l’article se voulait très explicite : « Grandes entreprises. Un pouvoir excessif ». Et il y a l’ONU qui, en 2002, concluait que : « L’influence de la grande entreprise. Une menace contre la démocratie » (Le Devoir, 25 juillet 2002).

Ça ne peut pas être plus clair pour le PQ et sur ce qu’il doit faire pour contrer l’emprise des maîtres économiques, surtout pour un petit pays comme le Québec. Faut-il faire un dessein à ces élus d’un gouvernement souverainiste?

À ce jour, le gouvernement péquiste, depuis qu’il est au pouvoir, n’a rien fait pour accroître l’indépendance du Québec face à ces multinationales qui continuent de faire ce qu’elles veulent et quand elles le veulent.

Puis-je suggérer au ministre péquiste des Finances, l’universitaire Nicolas Marceau, de lire dans ses temps libres des publications d’économistes américains comme Joseph Stiglitz et Paul Krugman, deux prix Nobel.

Monsieur Marceau et Madame Marois, pourquoi ne pas lire aussi l’excellent reportage publié dans la revue américaine Business Week du 11 septembre 2000, intitulé : « Too much corporate power? Most Americains think corporations have excessive influence over their lives ».

Bout de réglisse noire, vous ne pouvez tout de même pas m’accuser de proposer les politiques préconisées par des communistes ! Croyez-moi, l’Organisation mondiale du commerce (OMC), l’Organisation internationale du travail (OIT), le Fonds monétaire international (FMI) et l’Organisation des nations unies (ONU), sont loin de porter à gauche sur l’échiquier politique.

En gros, pour limiter l’emprise néfaste des transnationales sur la souveraineté et la démocratie des pays, et encore plus pour les pays en voie de développement et les petits pays comme le Québec, l’OMC et l’OIT recommandaient ceci en 2007 : « Mondialisation : l’État doit intervenir pour limiter les dégâts » (Le Devoir, 21 février 2007).

Pas moins d’État, pas plus de privé, pas de laisser-faire, mais bel et bien l’intervention de l’État. Puis, l’ex-directeur du FMI mentionnait  que : « la crise aux États-Unis plaide pour plus d’État et moins de libéralisme » (5 avril 2011).

Enfin, il y a l’ONU qui vantait « l’interventionnisme à la chinoise pour les pays en développement » (Le Devoir, 1er septembre 2006).

Ce qu’il faut faire pour rendre le Québec plus démocratique, et plus souverain, les Québécois plus libres, et pour atténuer les inégalités économiques et mieux répartir la richesse, passe inévitablement par plus d’État comme l’ont recommandé l’OMC, l’OIT, le FMI et l’ONU.

Mais j’ai bien peur que le PQ ne fera pas grand chose à cet égard, et que l’exploitation de la classe dominante se poursuivra. La combinaison du pouvoir immense du patronat, de la corruption généralisée des élus, et du manque de moyens de la population et des groupes sociaux fera que ce sera business as usual et l’État au service des intérêts supérieurs de la classe dominante.