Poches vides à Québec, coffres pleins à Ottawa

2014/04/30 | Par Pierre Dubuc

Un jour, c’est le musée des horreurs à Québec. Pour venir à bout d’un déficit de 3,7 milliards $, on évoque, parmi d’autres calamités, un gel des salaires et un gel d’échelons pour les employés de la fonction publique.

Le lendemain, à Ottawa, on célèbre! Le déficit s’est évaporé! On parle même de surplus oscillant entre 7,8 et 9,1 milliards $ au cours des quatre prochaines années.

D’où proviendront ces surplus ? Premièrement, des coupures à l’assurance-emploi, dont une des conséquences est la prise en charge des chômeurs de longue durée par l’aide sociale, qui émerge au budget du Québec.

Deuxièmement, du report à 67 ans l’âge d’admissibilité à la sécurité de la vieillesse. Mais, surtout, troisièmement, des modifications aux modalités des transferts fédéraux aux provinces au chapitre de la santé.

Leur croissance sera dorénavant limitée à celle du PIB, ce qui représentera pour Ottawa des économies évaluées à plus de 30 milliards $ entre 2017 et 2024.

Que fera Ottawa avec ces surplus? Viendra-t-il en aide au Québec et aux provinces aux prises avec d’importants déficits budgétaires? Que non!

Ottawa veut augmenter le maximum admissible au CELI et permettre le fractionnement du revenu entre parents d’enfants mineurs. Le coût de cette dernière mesure est évalué à 2,5 milliards $. Deux mesures dont il a été démontré qu’elles profitent aux mieux nantis.

S’ajoute à cela l’achat, dont l’annonce ne saurait tarder, de F-35 dont les coûts ont oscillés entre 30 milliards et 45 milliards $, selon différentes estimations ! La guerre avant la santé !

Il ne faudrait pas trop compter sur le gouvernement Couillard pour parler de déséquilibre fiscal et réclamer une partie des 55 milliards $ que les contribuables québécois versent à Ottawa chaque année.

Le chroniqueur Michel David du Devoir souligne que les mots « revendication », « demande » et « exigence » sont bannis du discours du gouvernement libéral. Le ministre des Affaires intergouvernementales, Jean-Marc Fournier, préfère parler de « sujets » ou d’« enjeux », lorsqu’il évoque ses relations avec Ottawa.

Dans le cadre des négociations du Front commun, lorsque les ministres libéraux accueilleront les demandes syndicales en retournant leurs poches pour montrer qu’elles sont vides, une bonne stratégie serait de leur indiquer le chemin vers Ottawa où les coffres sont pleins.