L’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC) publie aujourd’hui une étude qui cartographie la répartition des revenus, des déductions, des crédits d’impôt, des cotisations et des impôts des particuliers au Québec. Une des conclusions importantes, c’est que dans son ensemble, le système fiscal au Québec est manifestement progressif. « En 2011, le revenu total moyen des contribuables au Québec était de 40 600 $. La moyenne de l’impôt fédéral et de l’impôt provincial brut incluant les cotisations sociales avec les taxes à la consommation totalisait 17 400 $, soit 42 % du revenu disponible. Toutefois, une fois soustrait les 7700 $ en diverses déductions et crédits d’impôt, seulement 24 % du revenu total était perçu en impôts, en taxes et en cotisations. Cela signifie qu’en moyenne, 76 % du revenu net restait dans les poches de monsieur et madame tout le monde. Nous sommes loin de l’enfer fiscal que l’on s’acharne à nous décrire », a expliqué Nicolas Zorn, chercheur associé à la Chaire de recherche du Canada en économie politique internationale et comparée (CRÉPIC-ÉNAP).
« Autrement dit, la ponction fiscale est somme toute modérée puisque la part du revenu disponible est de loin la portion la plus importante du revenu total, variant entre 94 % et 61 % du revenu total. En fait, la ponction fiscale moyenne varie entre 6 % et 39 % du revenu total. Ce taux effectif maximal de 39 % ne s’applique qu’aux contribuables ayant un revenu supérieur à 250 000 $. L’idée selon laquelle il reste peu d’argent dans les poches des contribuables, malgré une protection sociale importante et des services publics généreux et largement accessibles, ne correspond pas aux faits », a-t-il poursuivi.
En ayant rassemblé les différents types de revenus et quantifié les effets redistributifs du système fiscal québécois pour l’ensemble des contribuables, l’auteur de l’étude a obtenu une image étoffée et nuancée des différents revenus de l’ensemble des déclarants (contribuables) québécois répartis selon leur position dans l’échelle des revenus. En effet, cette étude est basée sur les statistiques fiscales des particuliers les plus récentes, rassemblant plus de 9000 points de données différents.
La plupart des contribuables paient des impôts
L’étude permet ainsi de constater que près des deux tiers des contribuables paient des impôts sur leurs revenus, ce qui signifie que seulement 36,6 % n’en paient pas. Ce chiffre descend à 17,3 % lorsque sont prises en compte les cotisations sociales. De plus, la presque totalité des contribuables paie des taxes à la consommation. « L’idée selon laquelle 40 % à 50 % des particuliers ne paient pas d’impôts ne tient pas la route, surtout lorsqu’est prise en compte la mobilité sociale sur plus d’une année », a-t-il précisé.
D’autres résultats intéressants
- Les prestations et les transferts profitent à la grande majorité de la population, même les plus nantis. Bien que les revenus liés à l’emploi soient inégalement répartis, le niveau d’inégalités au Québec est beaucoup moins prononcé qu’ailleurs en Amérique du Nord.
- Les entrepreneurs se situent à tous les niveaux de l’échelle des revenus, reflétant le nombre important de petites et moyennes entreprises au Québec. Toutefois, les revenus d’entreprise et les revenus de capital sont principalement concentrés chez des contribuables les mieux nantis.
- Quant aux déductions et aux crédits d’impôt, ils ont profité à l’ensemble des contribuables, bien que leur répartition varie selon leur revenu total.
- Les déductions liées au travail sont des mesures progressives et ont profité à la grande majorité des contribuables. Celles liées à la retraite varient beaucoup selon la déduction. Les montants sont beaucoup plus importants pour les déclarants de ces déductions ayant un revenu élevé.
-Les déductions liées au capital ne profitent qu’à une minorité de contribuables ayant également un revenu élevé.
- Les déductions sociales bénéficient à un grand nombre de contribuables et sont généralement progressives dans leur application, bien que les montants en jeu soient peu importants et qu’elles ne profitent pas aux 20 premiers centiles ayant de faibles revenus de moins de 13 300 $.
- Les impôts sur le revenu provincial et fédéral sont progressifs dans leur application, alors que les taxes à la consommation sont régressives.
- Les cotisations du régime des rentes du Québec (RRQ) sont relativement progressives et les autres cotisations sociales (régime québécois d’assurance parentale [RQAP] et assurance emploi) sont relativement régressives. Les revenus privés de retraite (sans le RRQ ou les prestations de sécurité de revenu) sont en grande partie situés dans les trois quarts des contribuables les mieux nantis
En conclusion
Pour finir, Nicolas Zorn a précisé qu’il espérait que le débat public bénéficie de ce portrait aux multiples couleurs, brossé à grands traits. « Nous avons constaté, a-t-il dit, que les revenus des contribuables et la redistribution fiscale au Québec se déclinent en nuances sociologiques, économiques et méthodologiques ».
Il est possible de télécharger l’étude Portrait des revenus et de la redistribution fiscale au Québec sur le site de l’IRÉC au www.irec.net .
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