Il était prévisible qu’une semaine de grèves tournantes du Front commun allait exciter les chroniqueurs-gérants-d’estrade et les économistes-mercenaires de nos médias. Dans le Journal de Montréal du 27 octobre, l’ineffable J. Jacques Samson se dit déjà tanné avant que ça commence!
« Finissons-en au plus vite! », titre-t-il sa chronique. S’inspirant de ce qu’il comprend être la situation ontarienne, il propose ni plus ni moins un gel des salaires. Pas sûr que ça permettrait d’en « finir au plus vite », si on en croit l’article de sa collègue journaliste Dominique Scali, paru dans la même édition du journal, coiffé du titre « SANS PRÉCÉDENT DEPUIS 40 ANS. La mobilisation des syndiqués contre le gouvernement est assez forte pour mener à un long bras de fer ».
Quelques pages plus loin, le chroniqueur Michel Girard, pressé, lui aussi, de régler, propose un compromis : « Réglons pour 1,5 % par année ». Qui dit mieux?!
Vailles se fait planter royalement
À la veille du Forum des idées du Parti libéral du Québec, à Saint-Lambert, le chroniqueur économique Francis Vailles de La Presse avait pondu un article intitulé « Chronique ‘‘ plate’’ pour l’éducation », dans lequel il tirait dans les pattes des syndicats en proclamant que les dépenses en éducation avaient augmenté de 67 % pour la période 2004 à 2014, alors que l’augmentation de la richesse collective n’avait progressé que de 38 % au cours de la même période.
Bien sûr, le Premier ministre Couillard a brandi avec enthousiasme les chiffres de Vailles au Forum des idées de Saint-Lambert.
Mais Vailles s’est fait rapidement taper sur les doigts par l’économiste Pierre Fortin. Dans un article paru sur le site du magazine L’Actualité du 9 octobre, Fortin a démontré que Vailles avait tout faux parce qu’il « n’a pas tenu compte d’un changement majeur dans la présentation des états financiers dans les Comptes publics à partir de 2009-2010 ».
On vous fait grâce des détails de la démonstration de Fortin, mais toujours est-il qu’il évalue à 35 % plutôt qu’à 67 % l’augmentation des dépenses en éducation! Soit près de la moitié moins! Méchante erreur!
Le surlendemain, Vailles refaisait ses devoirs et dans un erratum publié dans La Presse, il reconnaissait en partie son erreur et réévaluait l’augmentation des dépenses en éducation à 50 % plutôt que 67 %.
Mais Fortin est coriace. En bon prof, il revient à la charge pour corriger à nouveau la copie de Vailles. C’est 35 %, pas 50 % ! Point à la ligne !
Vailles n’a d’autre choix que d’y aller d’un nouveau « mea culpa » dans un texte intitulé « Chronique ‘‘plate’’ pour l’éducation (2) », publié le 27 octobre dans La Presse. Si le mot « plate » de la première chronique s’adressait, de toute évidence, au monde de l’éducation, on a l’impression qu’il fait plutôt référence, dans cette nouvelle chronique, à Vailles lui-même.
Mais, pour ne pas perdre complètement la face, Vailles s’échine sur de nouveaux calculs. Répudiant sans explication la méthode de Fortin, il concocte deux autres méthodes de son cru pour arriver, dans les deux cas, à une hausse des dépenses en éducation de 41 % !
La beauté de l’affaire est que ce 41 % a l’avantage d’être supérieur au 38 % de l’augmentation de la richesse collective!
Il peut donc continuer à affirmer – avec moins de panache, toutefois, que dans première chronique « plate » – que le gouvernement ne peut répondre aux demandes syndicales sans s’endetter ou augmenter les taxes et impôts.
En se croisant les doigts que Pierre Fortin ne vienne pas tailler en pièces, dans les prochains jours, ses deux nouvelles méthodes!
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