Le gouvernement du Québec, dans la présente ronde de négociation pour le renouvellement des conventions collectives des travailleurs et travailleuses de L’État, a la ferme intention de modifier les conditions du régime de retraite de ses employés.
Le président du Conseil du trésor Martin Coiteux, responsable politique de la négociation, veut modifier un régime de retraite, le RREGOP, qui est en très bonne santé financière. Il est capitalisé à près de 100%.
Pourtant, la proposition patronale est de faire passer l’âge de la retraite sans pénalité actuarielle de 60 à 62 ans. De plus, cet âge pourrait changer selon l’évolution de l’espérance de vie. On souhaite presque que la science cesse ses activités de recherche qui nous ont permis collectivement de vivre plus longtemps et idéalement en santé. Ce ne sera plus Liberté 55 mais Liberté 85 parce que nous aurons une espérance de vie d’au moins cent ans.
Le gouvernement souhaite aussi augmenter la pénalité actuarielle de 4% à 7,2% si un employé décidait de quitter avant l’âge requis. Pas la peine de vous dire que plusieurs employés ont commencé sérieusement à réfléchir à quitter leur emploi avant que cette modification entre en vigueur.
Ce n’est pas tout, la proposition patronale prévoit que le calcul de la rente sera établi sur le traitement moyen d’une période de huit ans. Cette période est actuellement de 5 ans.
Le gouvernement répète souvent qu’il ne veut pas faire porter le fardeau de la dette sur les épaules de la prochaine génération. Il a assurément raison. La dette sera, à toute fin pratique, éliminée par l’appauvrissement programmé de cette prochaine génération parce que le gouvernement aura modifié les conditions de leur régime de retraite.
Comment contrer cette volonté politique d’appauvrissement collectif?
Il est tout de même ahurissant que le gouvernement modifie ou ait la volonté de modifier les conditions du RREGOP sans vraiment consulter ceux et celles qui sont propriétaires de leur régime de retraite à 50%. En effet, les employés de l’État contribuent pour la moitié au RREGOP.
On pourrait même affirmer qu’ils y contribuent pour un peu plus de la moitié puisque les impôts versés à l’État, par l’ensemble des employés du secteur public, permettent au gouvernement employeur de verser sa quotepart de 50% au RREGOP.
Comment les travailleurs et travailleuses du secteur public pourraient-ils faire valoir leur droit d’être consultés quand l’autre partenaire dans ce régime de retraite y propose des modifications ?
Comment les actionnaires majoritaires de leur fonds de retraite, le RREGOP, pourraient-ils, d’autorité, bloquer toutes propositions qui n’auraient pas préalablement obtenu leur accord?
Comment s’expliquer que le RREGOP soit un des sujets de la négociation pour le renouvellement des conventions collectives du secteur public? Le RREGOP est une loi comme d’autres régimes de retraite du secteur public ont leur propre loi.
Je suis d’avis que ce sujet ne devrait pas faire partie de la négociation de la convention collective des employés du secteur public, mais plutôt que la Loi du RREGOP identifie les parties contractantes et l’étendue de leurs responsabilités dans l’administration de leur régime.
Le RREGOP est le deuxième plus important déposant à la Caisse de dépôt et de placement du Québec (CDPQ) avec une valeur de 55,7 milliards de dollars. Ce qui signifie que les travailleurs et travailleuses du secteur public détiennent la moitié du RREGOP, soit 27,85 milliards de dollars. Cela est loin d’être négligeable.
Comment les syndicats pourraient-ils s’imposer et utiliser ce levier pour forcer le gouvernement-employeur à ne pas modifier les conditions du RREGOP sans leur approbation?
Cela mériterait que la loi sur le RREGOP soit modifiée afin de prévoir qu’aucune des conditions du RREGOP ne puisse être modifiée sans l’accord des syndicats représentant les cotisants à ce régime.
Il n’est pas inutile de rappeler, malgré l’importance des avoirs des travailleurs syndiqués du secteur public (RREGOP), qu’il n’y a aucun représentant des travailleurs syndiqués du secteur public au conseil d’administration de la CDPQ. Ce qui est une aberration.
Est-ce qu’une représentation au CA de la CDPQ pourrait être satisfaisante afin que les intérêts des travailleurs syndiqués du secteur public soient respectés? Ou, au contraire, est-ce que ces travailleurs ne devraient pas commencer à réfléchir à l’idée de créer une Caisse qui leur appartiendrait? Cette caisse pourrait alors porter le nom de Caisse des travailleurs et travailleuses du secteur public du Québec.
Les travailleurs et les travailleuses du secteur public détiendraient alors un puissant levier économique pour faire valoir leurs intérêts. Les syndicats FTQ et CSN ont réussi à créer le Fonds de solidarité du Québec et le Fondaction. Il est donc raisonnable de rêver à la création d’une Caisse des travailleurs et des travailleuses du secteur public du Québec à l’image du Régime de retraite des enseignants de l’Ontario (RREO).
Le peu de respect à l’endroit des travailleurs et travailleuses du secteur public dans la détermination des conditions de leur régime de retraite, lors de la présente ronde de négociation, milite certainement en faveur d’une telle possibilité.
Il est particulièrement insultant que le capital des retraités et futurs retraités du secteur public soit utilisé sans que ceux-ci aient leur mot à dire, tant sur les conditions de leur régime de retraite que sur la direction économique donnée à leur investissement par la CDPQ.
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