Ainsi, donc, s’il faut en croire Christian Rioux du Devoir (22/01/16), nous serions des « pissous » parce que le Canada a annoncé qu’il retirerait bientôt ses chasseurs CF-18 des frappes de la coalition en Syrie et en Irak.
Selon Rioux, nous serions « à contretemps de ce qui se passe aujourd’hui dans le monde » et le Canada n’aurait rien trouvé de mieux que « de prendre la poudre d’escampette ». La décision du Canada « risque de passer à l’histoire comme une forme de couardise ».
Rioux reprenait, quasiment mot pour mot, l’argumentaire développé en éditorial par Antoine Robitaille (20 janvier 2016). Au nom du « réalisme », Robitaille s’inscrit dans le camp des va-t’en guerre et affirme que le Canada « a lâché ses alliés ».
Rioux et Robitaille s’offusquent que le Canada n’ait pas été invité à la rencontre des « grandes puissances » sur la situation au Moyen-Orient.
Les deux se font l’écho de Mme Camille Carrier, la mère d’une des six victimes canadiennes des attentats terroristes de Ouagadougou au Burkina Faso, qui demandait au premier ministre Trudeau d’engager le Canada dans les combats.
On peut comprendre la réaction d’une mère éplorée, mais est-ce cela qui doit définir la politique étrangère du Canada ?
Bombarder, mais qui? Daesch (État islamique)? Ou Al-qaïda, qui a revendiqué les attentats au Burkina Faso? Mais, attention, selon le Canard Enchaîné, qui a ses entrées au sommet de la direction de l’armée française, la Coalition dirigée par les États-Unis ne bombarde pas Al-qaïda!
Au contraire, selon le journaliste Andrew Cockburn du magazine Harper’s, les États-Unis font à nouveau équipe avec Al-qaïda contre Daesch, comme aux beaux jours de la lutte contre l’Union soviétique en Afghanistan (A Special Relationship. The United States is teaming up with Al Qaeda, again. Harper’s, janvier 2016).
Nous pourrions ajouter que nous avons vu les conséquences de la politique des bombardements en Libye menée par l’OTAN, sous le commandement du général canadien Charles Bouchard. Les armes de Kadhafi se sont retrouvés, entre autres, dans les mains des groupes islamistes nord-africains, se frayant un chemin à travers le Niger et le Mali jusqu’au Burkina Faso.
Une véritable politique de lutte contre Daesch serait d’intervenir auprès de la Turquie qui laisse pénétrer armes et combattants djihadistes en Syrie et achète du pétrole de l’État islamique, ou encore auprès du Qatar ou de l’Arabie saoudite qui financent les djihadistes.
Si on veut véritablement que le Canada joue un rôle pour la paix dans cette région, un premier geste serait d’exiger l’annulation du contrat de vente de véhicules militaires d’une valeur de 15 milliards $ – le plus important de l’histoire du Canada – à l’Arabie saoudite, plutôt que de demander au gouvernement Trudeau de reprendre à son compte la politique du gouvernement Harper.
Depuis déjà un bon moment, des chroniqueurs du Journal de Montréal et du Devoir préparent l’opinion publique québécoise à une participation à la guerre de grande envergure que les grandes puissances préparent au Moyen-Orient.
Espérons que le nouveau directeur du Devoir, Brian Myles, saura recentrer la politique du journal sur la tradition pacifiste du journal et des Québécoises et des Québécois.
Soulignons, au passage, que le terme « pissous » dans le sens de « peureux, lâche », viendrait, selon certains, du terme anglais « pea soup », utilisé par les anglophones pour parler des « Canadiens français », reconnus pour manger de la soupe aux pois… et s’opposer aux guerres impériales !
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