Denis Monière propose («La convergence, pourquoi faire?») un programme commun de gouvernement (PQ-QS !) et une répartition mécanique des circonscriptions pour venir à bout du Parti libéral aux prochaines élections. Je pense que c’est illusoire, utopique et même contre-productif.
Il y a une autre manière, plus pragmatique et plus patiente, d’aborder la convergence entre souverainistes. D’abord, il faut en finir avec cette stratégie du pouvoir à court terme à tout prix. Il faut miser moins sur la prise du pouvoir que sur l’atteinte d’une majorité de 50 % pour l’indépendance, et cela, sans référendum !
Si en 2018 le PQ obtenait 38,1 % du vote et que Québec solidaire (QS) et Option nationale (ON) totalisaient 12 %, cela ferait bien 50 % + un ! Un référendum serait-il alors nécessaire si nos partis s’engagent à faire l’indépendance en proclamant qu’un vote PQ-QS-ON est un engagement dans ce sens ? Ne serait-ce pas là une approche consensuelle, évitant les désolants débats sur le référendum et autres « guidi-guidis » : registre de signatures, 1er ou 2e mandat, quand le peuple sera prêt, conditions gagnantes, programme commun de gouvernement, distribution aléatoire des circonscriptions, etc. Atteindre un tel seuil ne garantit pas la victoire du PQ, mais créerait une dynamique assez particulière.
Le PQ veut-il vraiment s’engager dans une stratégie d’équipe et rompre avec l’étapisme ? C’est habituel qu’un parti majoritaire au parlement n’ait pas 50 % des votes (Harper a eu 38 %, Couillard 42 %, Trudeau 38 %). À l’époque où le PQ était le seul parti souverainiste, la stratégie référendaire s’est imposée pour obtenir ce 50 %. La situation n’est plus la même. Un référendum ne plaît à personne, mais la menace de celui-ci accommode bien les libéraux. Promettre l’indépendance sans référendum si les partis souverainistes obtiennent ensemble 50 %, c’est neutraliser l’argument libéral et placer les électeurs face à un choix qui engage. Sur cet objectif commun limité, obtenir 50 % pour la souveraineté à l’élection, une stratégie commune est plus facile à élaborer, en trois points.
A. Les électeurs à rejoindre. D’abord déterminer les électeurs à rejoindre en priorité : ceux qui n’avaient pas le droit de vote en 1995, les 38 ans et moins, qui sont restés en marge du débat ; puis, les souverainistes abstentionnistes : au référendum de 1995, le taux de participation était de plus de 93 %, mais à l’élection 2008, il n’était que de 57 % ! On doit noter une corrélation entre la baisse de la participation et l’affaiblissement du PQ. Les jeunes votent moins, mais la participation des baby-boomers a baissé de près de 25 % entre 1985 et 2008 ! (Gélineau et Tessyer, Le déclin de la participation électorale au Québec, 1985-2008, UL, p. 49.) Sans exclure les autres électorats (ethniques, CAQ, conservateurs de la région de Québec, etc.), ce sont ces deux groupes, les jeunes et les baby-boomers abstentionnistes, qu’il faut cibler par des approches spécifiques.
B. Bilan du fédéralisme. Pour faire ce bilan, les éléments ne manquent pas : déséquilibre fiscal, Cour suprême et loi 101, représentation du Québec à l’étranger, commerce international… y compris ce programme d’assistance appelé péréquation. Il ne s’agit pas seulement de critiquer les gouvernements d’Ottawa et de Québec, mais de démontrer que le retard du Québec est le résultat structurel et systémique du fédéralisme canadien. Pourquoi un Québec si riche en ressources de toutes sortes est-il toujours à la traîne par rapport aux autres provinces ?
C. Ce qui devient possible. Ensuite, PQ et QS peuvent ensemble, sans programme commun, dire ce qui devient possible dans un Québec souverain : contrôle complet des impôts, de l’immigration, des institutions culturelles, environnement, ressources naturelles, etc.
Cette démarche pourrait rallier les militants de droite et de gauche. Cet effort non partisan, solidaire et lucide, serait mobilisateur et arriverait à point pour le 150e anniversaire du Canada en 2017. Surtout, ça préparerait tellement bien l’élection de 2018.
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