Louise Chabot, présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
Josée Scalabrini, présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ)
Éric Pronovost, président de la Fédération du personnel de soutien scolaire (FPSS-CSQ)
Johanne Pomerleau, présidente de la Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation du Québec (FPPE-CSQ)
Alors que le Québec affirme vouloir parler de réussite en éducation plutôt que de brassage de structures, nous semblons assister enfin à un vent de changement dans la vision du gouvernement avec le lancement des consultations sur la réussite éducative.
Nous avons salué la mise en place de ces consultations que nous réclamions depuis des années. Il était plus que temps que le gouvernement tende l’oreille aux experts sur le terrain : personnel enseignant, de soutien et professionnel, dont les 130 000 membres que nous représentons en éducation, qui accompagnent chaque jour nos élèves dans leur cheminement scolaire.
Toutefois, ce pas dans la bonne direction ne nous fait pas oublier le projet de loi no 105, modifiant la Loi sur l’instruction publique, actuellement discuté en commission parlementaire à l’Assemblée nationale.
Non seulement les changements proposés dans le projet de loi par le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, ratent la cible, mais ils sont également présentés à un très mauvais moment.
En effet, ils devancent les consultations récemment annoncées qui visent justement à réfléchir aux enjeux prioritaires en éducation. Nous sommes d’avis qu’il serait beaucoup plus logique de réfléchir avant et de proposer des changements après, en phase avec ce dont nous avons réellement besoin.
Pour la Centrale des syndicats du Québec, même si certaines idées ont été élaguées du nouveau projet de loi, ce dernier demeure encore insatisfaisant puisqu’il conserve des problèmes importants dénoncés lors des travaux entourant le projet de loi no 86.
En effet, les changements proposés ont pour effet de nier l'expertise du personnel en permettant qu’on lui impose des moyens inscrits au projet éducatif, limitant ainsi leur autonomie professionnelle. De plus, le pouvoir que l’on prétend donner aux établissements ne se rend pas au personnel et est menotté par les pouvoirs accrus du ministre. Enfin, en toute incohérence, les changements proposés entraîneront une consécration de la gestion axée sur les résultats scolaires, alors que, par définition, la réussite éducative des élèves va bien au-delà des statistiques à court terme.
Également, la forme de décentralisation proposée met en péril l’application du principe d’équité et l’organisation cohérente des services. De plus, le transfert de budgets directement vers les établissements entraînera aussi un recours accentué à la sous-traitance, ce qui risque de nuire à la continuité et à la qualité des services, conditions essentielles pour répondre aux besoins des élèves. Les élèves en sortiront perdants.
En ce sens, nous sommes persuadés que l’organisation des services éducatifs doit demeurer une prérogative de la commission scolaire si nous voulons assurer une répartition équitable des ressources entre les établissements.
Bref, le projet de loi no 105 ne répond pas aux enjeux actuels de l’éducation et à l’idée de la réussite éducative.
Par ailleurs, nous espérons que les consultations annoncées sur la réussite éducative constituent une réelle occasion de traiter des orientations prioritaires pour une éducation de qualité : assurer de meilleures conditions d’apprentissage et de réussite pour toutes et tous, mettre fin à la concurrence pour privilégier la coopération, améliorer les conditions d’exercice pour une éducation de qualité et valoriser le travail du personnel de l’éducation.
Après autant de compressions depuis 2010, un réinvestissement massif est nécessaire. Le gouvernement doit impérativement en tenir compte dans les prochains gestes qu’il posera en éducation s’il souhaite réellement en faire une priorité.
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