Manifestation devant le bureau montréalais de Justin Trudeau

2016/09/23 | Par Artistes pour la paix

Izabella Marengo, Pierre Jasmin, Daniel Gingras, Gurkan Ormangoren, chef militant kurde et Nathan McDonnell dans le vestibule du bureau de la rue Jarry du député Justin Trudeau.

Nathan McDonell (éditeur-adjoint Black Rose books) y a lu à haute voix la déclaration de Solidarité Rojava Montréal, rejoint par Gurkan Ormangoren, le co-président du Centre communautaire kurde de Toronto (qui a dû prendre la route vers Montréal de Toronto à 4h du matin !), Daniel Gingras, Pierre Jasmin et Izabella Marengo, respectivement président, vice-président et secrétaire et finalement Dimitri Roussopoulos, co¬fondateur des Artistes pour la Paix et participant d’une délégation de huit nations en février 2016 à Istanbul, en Turquie, promouvant les droits du chef de file kurde, Abdullah Öcalan, perçu comme le ‘Nelson Mandela kurde’.Photo

Médias présents : Montréal Gazette, Nouvelles Parc-Extension, McGill Daily et Bizim Anadolu (journal turc montréalais) et nous avons été contactés par Radio-Canada. Tous ont eu en leur possession la lettre endossée par l’Assemblée générale annuelle des Artistes pour la Paix, qui a aussi circulé parmi les médias montréalais. Une action coordonnée internationalement à l’occasion de la Journée de la paix mondiale des Nations Unies.

 

 

Honorable Stéphane Dion 20 septembre 2016

Sujets abordés : les Kurdes, les bombes nucléaires et l’exportation d’armes canadiennes

Monsieur le ministre des Affaires mondiales, Les Artistes pour la Paix, réunis à Montréal en assemblée générale annuelle le 12 septembre dernier en la salle Claude Robinson (UDA), y ont entendu les allégations sérieuses suivantes, exprimées par leurs amis Kurdes auxquelles notre site avait déjà prêté foi1 :

« Nous faisons appel à vous, en tant que citoyens canadiens très préoccupés par la situation de l'invasion turque en Syrie. Premièrement, nous sommes outrés que les journaux rapportent la nouvelle biaisée que l'invasion turque signifie la fin de Daesh, alors qu'en réalité nous avons amplement de preuves que Daesh jouit de la liberté de circulation à travers les frontières de la Turquie. Nous savons que le parti d’Erdogan cherche depuis déjà des décennies la purification raciale au sein de ses frontières et donc l’élimination des Kurdes, soit physiquement soit culturellement, en ayant aussi recours à l'emprisonnement. C’est sans doute pour cela que le gouvernement turc n'aime pas que les Kurdes du nord de la Syrie continuent de combattre Daesh avec succès en gagnant du terrain. Or, nos médias ne semblent rapporter que la version des communiqués de presse turcs, alors que la Turquie est entrée en Syrie pour y massacrer des Kurdes Syriens, sans même toucher à l'État islamiste. M. Dion, il est inacceptable que le Canada soit silencieux sur cet enjeu alors qu’il est le deuxième plus grand exportateur d'armes au Moyen Orient, alimentant des États qui violent les droits de la personne. M. Dion, nous vous prions d’agir dans le bon sens pour l'avenir de nous tous. »

Nous souscrivons à ce nouveau compte-rendu daté du 3 septembre et à l’urgence d’agir qui vous y est adressée, aussi appuyée par MM. Nathan McDonnell et Dimitri Roussopoulos (ancien vice-président des APLP, éditeur de Black Rose Books), bien informés suite à leur infortunée mission de paix en Turquie en février dernier. Au moment où notre premier ministre ouvre chez nous la porte aux revendications des Premières Nations et accueille avec bienveillance des réfugiés syriens contrairement à la communauté européenne qui, sauf l’Allemagne et la Grèce, les a commodément relégués à la Turquie, il serait anachronique que votre ministère, sous prétexte d’entretenir de bonnes relations diplomatiques, feigne d’ignorer les exactions anti-démocratiques du président Erdogan, particulièrement envers les communautés Kurdes, établies tant à Rojava en Syrie qu’en Turquie même.

Nous nous demandons aussi avec inquiétude ce qu’il advient des armes nucléaires entreposées par l’OTAN en Turquie, suite à l’arrestation du militaire turc qui en était responsable2. Une manière d’agir responsable, face au fléau nucléaire encore plus menaçant suite à la 5e explosion qui vient d’être effectuée par la Corée du Nord, attend bientôt votre prochain vote à l’ONU, où les prises de position canadiennes nous ont jusqu’à présent terriblement déçus (voir notre article dans le quotidien MÉTRO du 29 août, reproduit à la fin de cette lettre). Pouvons-nous vous rappeler respectueusement que notre mémoire du 29 juillet au ministre de la Défense3 recommandait au Canada le retrait de l’OTAN irresponsable et militariste et émettait l’hypothèse d’une mission de Casques bleus en protection des Kurdes?

Enfin, tout en félicitant votre gouvernement pour l’intention annoncée de ressusciter les Casques bleus en question4, nous réitérons notre condamnation sans appel des exportations d’armes canadiennes vers des pays tels que l’Arabie Saoudite, en guerre au Yémen et impliquée en Syrie et en Irak dans l’armement de factions sunnites proches d’Al-Quaeda et de Daesh.

Nous vous prions d’agréer, monsieur le ministre, l’expression de nos vives préoccupations,

Pierre Jasmin5, vice-président, appuyé par Christian Morin, webmestre

Prise de position votée à l’unanimité par l’AGA du 12 septembre des APLP qui en a confié le texte définitif au nouveau Conseil d’administration APLP (réuni le 19 septembre)

c.c. Justin Trudeau, premier ministre; Rona Ambrose, parti conservateur; Hélène Laverdière, NPD; Michel Boudrias, Bloc québécois; Elizabeth May, Parti vert.

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Journal MÉTRO Courrier des lecteurs du 29 août 2016 (il existe aussi une version web)

 

Accompagné d’une photo des explosions nucléaires à Hiroshima et Nagasaki avec la légende suivante : Un lecteur critique le refus récent du Canada d’appuyer un traité favorisant l’abolition de l’arme nucléaire. Chaque année, pourtant, le monde se rappelle la dévastation causée à Hiroshima et à Nagasaki, au Japon, par la bombe atomique.

«Trudeau trahit l’objectif d’un monde sans bombes nucléaires». L’honorable Douglas Roche, chercheur principal du Réseau canadien pour l’abolition des armes nucléaires (CNANW) et coanimateur, avec l’ex-président américain Jimmy Carter, de la Middle Powers Initiative, a déploré en ces termes le vote aberrant du Canada le 19 août dernier. Le Canada a en effet rejeté le rapport produit par le Groupe de travail à composition non limitée de l’ONU à Genève. Justin Trudeau réussirait donc à se trouver complice de 22 pays opposés à l’effort actuel de négociations adopté par 68 pays et avec des réserves de la part de 13 abstentionnistes, dont la Norvège et les Pays-Bas, pays membres de l’OTAN, et à renier l’héritage de son père Pierre Elliot, qui, en pleine guerre froide (1983), avait eu le courage de mener une mission à Moscou et à Washington pour réclamer un traité réduisant le nombre des armes nucléaires américano-russes aux 14 000 actuelles.


Pourtant, les négociations prévoyaient des mesures essentielles pour notre sécurité, dont l’abandon d’une «première utilisation» (que Trump envisagerait contre Daesh !) et la désactivation de 1 500 bombes déclenchables en moins d’une minute, malgré les risques de terrorisme ou de maldonne technique, par exemple une réaction précipitée à une fausse alerte lancée par un radar défectueux.

À la mi-octobre, les Nations unies procéderont à New York à un vote officiel sur le rapport de Genève, où M. Trudeau aura la chance de se reprendre : le Canada votera-t-il encore selon l’opinion de fonctionnaires obtus nommés au ministère des Affaires internationales par Harper, ou MM. Dion et Trudeau se réveilleront-ils alors, forts de l’appui de plus des quatre cinquièmes des Canadiens et de 139 pays (selon le dernier vote de l’Assemblée générale de l’ONU, l’automne dernier) qui veulent en finir avec ces armes nucléaires ?

3 Idem, page 6 (Casques bleus au secours des Kurdes) et pages 13 à 18 (retrait du Canada de l’OTAN)

4 Lire sur notre site à ce sujet : http://www.artistespourlapaix.org/?p=11706

5 Pierre Jasmin est aussi membre exécutif du Réseau canadien pour l’abolition des armes nucléaires