L’auteur est l’ex-député fédéral de Montmorency-Orléans (1974-1984). Il réside à Sainte-Pétronille de l’île d’Orléans.
De toute évidence, c’est par pur opportunisme électoral que le chef de la CAQ, François Legault, a pris l’engagement de construire dans la précipitation un troisième lien entre Québec et Lévis, s’il devenait premier ministre. Comme il s’est bien gardé de préciser où ce troisième lien devrait être construit, il est nécessaire de lui expliquer pourquoi une telle infrastructure n’a pas sa place dans l’est de la région de Québec, à plus forte raison si on devait utiliser l’île d’Orléans comme tremplin entre les deux rives comme le proposait récemment son shérif en chef, Éric Caire.
Pour faire l’éducation de François Legault en la matière, il faut d’abord lui expliquer que dès les premières heures du matin, du lundi au vendredi, le tronçon de l’autoroute Félix-Leclerc allant de Beauport, (souvent à partir de la rue Seigneurial ) à l’autoroute Robert-Bourassa est le théâtre d’une congestion de la circulation, qui met à rude épreuve la patience des automobilistes provenant de Beauport, de la Côte-de–Beaupré et de l’île d’Orléans. Pour sa part, l’autoroute Dufferin-Montmorency connait dans une moindre mesure la même problématique, l’embouteillage du matin transformant parfois le tronçon compris entre le boulevard Henri-Bourassa et l’avenue Honoré-Mercier en un véritable terrain de stationnement. À la lumière de ces faits, on peut comprendre pourquoi le maire Régis Labeaume ait manifesté ses réticences à l’endroit d’un troisième lien à l’est, option insensée qui le serait doublement si on devait porter atteinte à l’intégrité physique de l’île d’Orléans.
C’est dans un tel contexte que de brillants esprits font agressivement la promotion d’un projet de troisième lien à l’est, selon lequel la pointe ouest de l’île d’Orléans, soit les berges de Sainte-Pétronille, serait le lieu où se ferait la jonction d’un tunnel prenant naissance sur la rive sud, avec échangeur donnant accès à l’île d’Orléans, avec un pont à quatre voies allant vers Québec. À ce sujet, le maire de Sainte-Pétronille et préfet de la MRC de l’île d’Orléans, Harold Noël, déclarait à juste titre au journal La Presse en novembre 2017: « Il faut que ce soit un pont construit pour la capacité de l’île d’Orléans. Ça ne peut être quatre voies, parce qu’après on tombe dans les petites routes de l’île. Ça va faire un effet d’entonnoir ».
Le préfet de la MRC faisait alors sans doute allusion au fait que la réalisation du projet appelé « Axa Orléans » signifierait l’abandon du projet de construction d’un nouveau pont à deux voies, situé immédiatement à l’ouest du vieux pont de l’île, que l’actuel gouvernement s’est engagé à bâtir d’ici à 2024 pour assurer la sécurité non seulement des automobilistes de l’île d’Orléans, mais également des 650,000 touristes qui s’y rendent annuellement.
S’il y a lieu de souligner cette importante affluence touristique, c’est pour dénoncer et mettre en lumière le manque de sérieux de l’ineffable conseiller municipal de Québec, Jean-François Gosselin, un complice de François Legault dans ce dossier, qui déclarait avec mépris et outrecuidance sur le site du Huffington Post en juillet 2017: « La population de l’île étant d’environ 6500 personnes, bâtir un nouveau pont aussi coûteux (400 millions) pour si peu de clients ne serait pas efficient ».
Cela étant dit, ces brillants esprits ne semblent pas se rendre compte que, quel que soit le nombre d’automobiles et de véhicules lourds qui emprunteraient ce troisième lien le matin à partir de la rive sud, cette circulation additionnelle ne ferait qu’empirer une situation déjà irritante à ces heures matinales sur les autoroutes Félix-Leclerc et Dufferin- Montmorency, nouvel achalandage que les déplacements de véhicules de Québec vers la rive sud ne sauraient compenser.
À ce sujet, l’ex-conseillère municipale Julie Lemieux ,qui a représenté le district Chute-Montmorency-Seigneurial pendant plusieurs années, déclarait fort pertinemment au Soleil le 7 novembre dernier: « pour les gens de Beauport, un troisième lien à l’est ne serait pas nécessairement un avantage. Ils seraient probablement encore plus dans le trafic ». C’est sans doute ce qu’avait à l’esprit le chroniqueur du Soleil, François Bourque, lorsqu’il écrivait le mois dernier: « La thèse d’un pont/tunnel à l’est pour soulager la congestion ne tient tout simplement pas la route. Il y a une sorte de malhonnêteté intellectuelle à continuer à soutenir le contraire à des fins électoralistes ».
Compte tenu de la logique implacable des arguments démontrant qu’un troisième lien à l’est n’est rien d’autre qu’une vue de l’esprit qui ne règlerait aucunement le problème de la congestion de la circulation automobile dans notre région, il est impératif que l’entourage de François Legault et ses candidats dans la région de Québec à l’élection du 1er octobre prochain puissent le ramener à la raison. Il devrait notamment s’engager, de même que sa candidate dans Charlevoix-Côte-de-Beaupré, à respecter en tout état de cause l’intégrité du territoire de cette perle de la nature qu’est l’île d’Orléans et à donner suite, s’il devenait premier ministre, à l’engagement du gouvernement Couillard de procéder à la construction d’un nouveau pont à proximité du vieux pont qui date de 1935 et qui est parvenu au terme de sa vie utile. De nombreux électeurs et de nombreuses électrices de l’île auront cet enjeu en tête le jour de l’élection.
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