Racismes royaux et autres

2020/06/08 | Par Pierre Jasmin

L’auteur est membre des Artistes pour la paix

1- La Gendarmerie royale avec six cas investigués pour violences envers des Inuits

Nouvelles de l’APTN news : six cas investigués pour les seuls premiers mois de l’année en cours! Un autochtone du Nunavut à Kingait a été renversé lundi le 1er juin à l’aide d’une porte de camionnette en mouvement conduite par un agent de la Gendarmerie royale.

Plus graves, trois morts d’autochtones aux mains de policiers de la GRC depuis le début de 2020 font l’objet d’enquêtes distinctes de la part de la police d’Ottawa : le premier mort alors que la GRC le transportait vers une institution mentale; le second à Kingait le 26 février et un troisième à Clyde River le 5 mai furent abattus par la police ; un enfant à Pond Inlet fut accidenté le 30 mars par une voiture de police alors qu’il glissait en toboggan, tandis qu’un dernier adulte a reçu des blessures par balles d’un officier, au village Iqaluit d’Apex.  

2- Deux autochtones de Colombie-Britannique tués par la GRC

Chantel Moore (photo), armée d’un couteau, est morte jeudi à Edmunston au Nouveau-Brunswick d’un tir d’un policier venu vérifier à la demande d’une amie son état de santé mentale.

Le ministre des Services autochtones Marc Miller, lors d’une conférence de presse le 5 juin à Ottawa, s’est déclaré sous le choc, « incapable de comprendre comment une personne peut mourir pendant un contrôle de vérification policière pour son bien-être. J’ai pensé qu’il s’agissait d’une blague morbide. »

Selon le grand chef Stewart Phillip, président de l’association de chefs autochtones de la Colombie-Britannique, la mort de la jeune mère de famille découle d’un manque historique d’action des autorités contre le suprémacisme blanc dans les services policiers, déclarant qu’il faut réviser le système de fond en comble pour améliorer les choses.

Sa déclaration fait aussi écho à la « bonne nouvelle » cette semaine que le Bureau des Enquêtes Indépendantes a recommandé que des accusations soient enfin déposées contre cinq officiers de la Gendarmerie Royale impliqués en 2017 dans la mort du jeune Dale Culver (photo) APRÈS son arrestation à Prince George, B.C..


3- Le chef Allan Adam tabassé le 10 mars à Fort McMurray, Alberta

Lors d’une conférence de presse organisée samedi le 6 juin à Fort McMurray, le chef de la Première Nation des Chipewyan de l’Athabasca Allan Adam a donné sa version d’événements survenus en mars pendant lesquels il aurait été tabassé par des agents de la GRC, après que l’un d’eux eut empoigné le bras de son épouse atteinte d’arthrite rhumatoïde : « tout ça à cause d’une plaque d’immatriculation expirée ».

La Première Nation a fourni une photo du visage tuméfié du chef prise après l’altercation avec la GRC. Des vidéos de l’arrestation auraient été prises par un témoin. Un à un, d’autres chefs de Premières Nations de la région ont apporté leur soutien à Allan Adam.

Le ministre Miller a déclaré qu’il approuverait le port de caméras par les agents de la GRC. Le premier ministre Trudeau a pour sa part déclaré qu’il agirait – bientôt – pour vérifier et le cas échéant réinvestiguer chaque cas non résolu examiné par L'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées dont les résultats ont été déposés il y aura un an la semaine prochaine. Il nous semble que l’ancienne ministre de la Justice Jody Wilson-Raybould, une autochtone renvoyée par Trudeau il y a un peu plus d’un an, aurait agi avec plus de diligence.


4- Trudeau-Legault et les anges gardiens

Des centaines de demandeurs d’asile engagés depuis des mois pour améliorer la situation critique dans nos CHSLD et scandalisés à bon droit face à la différence de traitement offert aux futurs 10 000 préposés qui seront formés aux frais du gouvernement québécois, manifestaient samedi le 6 juin pour réclamer un engagement sérieux de la part de ce dernier : le  moins qu’ils attendent du gouvernement pour avoir mis leurs vies en danger au plus fort de la pandémie est de voir le Canada régulariser leur statut de réfugié en immigrant reçu.

Le président et fondateur du groupe Debout pour la dignité, Wilner Cayo, s’est écrié : « Nous demandons une mesure extraordinaire pour accueillir tous les travailleurs essentiels demandeurs d’asile. C’est une question d’humanité, d’équité, de justice ». M. Cayo, doctorant en théologie, a rappelé au gouvernement que « ces gens ne sont pas un fardeau pour la société québécoise puisqu’ils travaillent tous dans des postes essentiels et extrêmement difficiles à combler. Ils sont plutôt un cadeau ! On a vu comment ils se sont battus, comment ils se donnent et répondent présents ».

La manifestation s’est tenue devant les bureaux de la circonscription fédérale de Justin Trudeau, en présence du chef par intérim du Parti québécois Pascal Bérubé, qui estime que l’on a « un devoir de gratitude » envers « ces personnes venues d’ailleurs qui nous ont aidés durant la pandémie ». Est-ce une autre manifestation de racisme anti-immigrants ?


Au cours des prochaines semaines, les Artistes pour la Paix publieront une série d’articles rappelant leurs nombreux engagements en solidarité avec les autochtones, culminant avec un rappel historique du trentenaire de leurs actions aux côtés des Mohawks lors de la crise de Kanesatakeh, avec Alanis Obomsawim et l’érection d’une murale au centre-ville dénonçant les vols militaires à basse altitude au Nitassinan. À suivre, donc.