Striketober: le mouvement de grève aux États-Unis

2021/11/17 | Par Luc Allaire

En octobre dernier, aux États-Unis, un mouvement de grève s’est étendu dans les services de santé et les entreprises. Les travailleuses et travailleurs ont déclenché des grèves pour obtenir des augmentations de salaires et de meilleures conditions de travail. Pour être entendus à l’étendue du territoire, ils ont appelé leur mouvement « striketober ».

C’est ainsi qu’à l’usine John Deere en Iowa, les travailleurs ont convaincu les camionneurs de ne pas franchir leurs piquets de grève. Ils étaient plus de 10 000 travailleurs à tomber en grève le 14 octobre après avoir rejeté une offre patronale qui incluait une hausse de salaire variant entre 5 et 6 % pour la première année de leur convention collective. Ils ont répondu que ce n’était pas suffisant.

Face à des employeurs qui désespèrent à combler les postes vacants, de nombreux travailleurs veulent tirer profit de la pénurie de main d’œuvre et faire des gains. Alors que certaines personnes préfèrent quitter leur emploi s'il ne paye pas suffisamment, d’autres décident de se battre pour obtenir des augmentations de salaires. C’est le cas des 1 400 travailleurs de Kellogg qui ont déclenché la grève dans ses usines implantées au Michigan et dans quelques autres États.  

L’employeur veut réduire les vacances et retirer des congés ont dénoncé les employés de l’entreprise céréalière qui tente par tous les moyens de maintenir le même niveau de production malgré la rareté de main-d’œuvre. Les travailleurs qui produisent les Corn Flakes et Spécial K refusent une proposition de leur employeur qui veut leur imposer un régime à deux vitesses, en réduisant les salaires et les avantages des nouveaux employés. « C’est pourquoi nous sommes en grève, parce que nous voulons de meilleurs salaires et un régime de retraite pour tous les employés, pas seulement pour un groupe d’entre eux », ont déclaré des employés en grève lors d’une émission sur Vermont Public Radio.

Sur la côte Ouest, des travailleurs de la santé de Kaiser Permanente sont, eux aussi, en colère face à leur employeur qui propose, lui aussi, un système à deux vitesses entre autres choses. Leur syndicat détient un mandat de grève. Les travailleurs se plaignent d’avoir dû travailler doublement pendant la pandémie alors que leur employeur engrangeait les profits.

Toujours sur Vermont Public Radio, un thérapeute occasionnel chez Kaiser à Los Angeles affirme avoir travaillé avec des patients atteints de la COVID, les aidant à retrouver leurs moyens pour qu’ils puissent réaliser des activités aussi élémentaires qu’aller à la toilette seul. Pour lui, la menace de grève chez Kaiser est une question de solidarité. Un système à deux vitesses signifierait deux classes de travailleurs dans la même entreprise. Il se retrouverait à travailler avec des collègues qui gagneraient beaucoup moins que lui.

Selon lui, deux personnes qui font le même travail, qui ont une formation équivalente et qui ont les mêmes dettes d’études devraient gagner le même salaire. Les travailleurs en poste craignent également qu’un tel système ferait en sorte qu’il soit plus difficile d’embaucher du personnel et de les garder, ce qui entraînera des conséquences négatives pour les patients.

De son côté, Kaiser répond que les soins de santé sont de moins en moins abordables, et que les salaires élevés font partie du problème. La compagnie prétend que ses employés gagnent 26 % de plus que le salaire moyen de l’industrie. Un système à deux vitesses permettrait de réduire la masse salariale sans couper dans les salaires des travailleurs actuellement à l’emploi, affirme l'entreprise.

C’est un argument que les trois grands de l’automobile ont utilisé en 2007, quand un tel système a été implanté à Détroit. Mais les temps ont changé, répliquent les organisations syndicales. La survie de l’industrie automobile était en péril, et les travailleurs étaient heureux d’avoir un emploi.

Aujourd’hui, ce système n’est plus appliqué dans l’industrie automobile. Tant les compagnies automobiles que les syndicats ont compris que cela avait des effets désastreux sur le moral des travailleurs. Les nouveaux travailleurs qui gagnaient moins que les anciens avaient l’impression d’être volés. Les syndicats ne veulent plus revivre ces épisodes.

Les infirmières à l’hôpital Kaiser à Fontana, Californie, disent que ce qu’elles veulent maintenant, c’est la reconnaissance et du soutien. Il y a beaucoup d’infirmières qui souffrent d’épuisement professionnel à cause du manque de personnel. La situation risque d’empirer si une entente acceptable n’est pas conclue avec l’employeur.

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