Contestation identitaire victorieuse

2022/06/03 | Par Pierre Jasmin

Votre chroniqueur musicien à l’aut’journal, à défaut de pouvoir se déplacer à Trois-Rivières admirer la créativité symphonique de Serge Fiori, signe aujourd’hui une deuxième incursion en cinq ans dans le domaine sportif : mon premier article à ce titre avait attiré l’attention des lecteurs sur le fabuleux jeu défensif, peut-être hérité d’un bref séjour à Düsseldorf, d’un héros alors en émergence, le Québécois de 5 pieds 7 Samuel Piette. Il s’impose depuis comme co-capitaine et porte-parole francophone de l’équipe de soccer de Montréal et comme joueur défensif pour l’équipe nationale du Canada, qui pour la première fois en 36 ans sera admise au Qatar à concourir pour la prestigieuse coupe du monde FIFA, plus populaire que les Olympiques.

Les partisans trop turbulents (y compris lors d’escarmouches avec des partisans de Toronto!) ne digérant pas le retrait du nom de leur équipe l’Impact se sont vus parfois refuser l’accès au stade Saputo, sacrifiant même leur cloche nommée 1642 pour marquer l’histoire de leur ville, haute de cinq pieds, large de 44 pouces et pesant 1576 livres, utilisée pour célébrer chaque but compté par l’équipe. Même si cet épisode peu glorieux est maintenant résolument du passé, remercions ces irréductibles fans de la première heure pour avoir contesté pendant deux années ardues les décisions corporatives qui les privaient de l’identité québécoise de leur club favori, pourtant la seule équipe professionnelle à Montréal dont une grande partie des joueurs sait s’exprimer dans une langue française claire et articulée : gloire à l’éloquent nouveau président et ancien joueur Gabriel Gervais, au propriétaire Joey Saputo et à l’entraîneur Wilfried Nancy dont l’immense talent est de faire ressortir les efforts collectifs de son équipe!

Gloire aussi aux joueurs francophones Zachary Brault-Guillard, Mathieu Choinière et Rudy Camacho ainsi qu’au directeur sportif Olivier Renard, l’entraîneur de la défense Laurent Ciman et les brillants ex de l’équipe tels Mauro Biello, Patrick Leduc, Thierry Henry, Didier Drogba, sans parler de ceux dont on goûte aujourd’hui les commentaires si appréciés, le « capitaine honoraire » Patrice Bernier et Hassoun Camara.

Appuyée par TVA (Quebecor), l’équipe revendiquera désormais son appartenance québécoise en 2023 avec un nouveau logo créé par l’Agence Pigeon, une fleur de lys centrale supportée par un bouclier, signe de force non agressive. « Nous avons écouté nos employés, nos partenaires et nos partisans et nous en sommes venus à la conclusion qu’un changement était nécessaire », a humblement admis le propriétaire Saputo. Le bleu revient donc en force, tandis que le flocon de neige drab et anecdotique a fondu.

À ceux qui regrettent encore l’acronyme IMPACT inclusivité – mémoires – passion – ambition - collectivité – talent, consolons-les avec la présence de l’accent aigu sur le e de Montréal, imposé malgré son absence dans les dactylos de la ligue nord-américaine et l’originalité de l’appellation CF en français, alors qu’en France anglophile, on privilégie encore l’appellation FC pour Football Club.

Enfin, les deux cercles concentriques représenteraient la grande valeur autochtone de l’unité non hiérarchique et l’inscription de 1993, date de la fondation du club, permettra d’en fêter avec éclat le 30e anniversaire, Impact et CF confondus! Samedi dernier, avant une pause internationale de trois semaines, par sa victoire 4-3 sur Cincinnati, le CF Montréal a grimpé au 3e rang de la section Est, avec une fiche de buts (gonflée par le Hondurien Romell Quioto) au 2e rang de toute la MLS!