La chef du Parti vert, Elizabeth May, la députée libérale Jenica Atwin, le député du Bloc Québécois Mario Simard et le député néo-démocrate Alexandre Boulerice se joignent aujourd’hui à des représentants de la société civile pour exprimer leurs graves préoccupations au sujet de l’expansion de l’énergie nucléaire et du développement de petits réacteurs nucléaires modulaires (PRM).
Lors d’une conférence de presse non partisane à l’Amphithéâtre national de la presse, les quatre parlementaires demandent à Ottawa de faire une pause dans le financement fédéral pour développer des PRM expérimentaux jusqu’à ce que le Parlement et des experts scientifiques indépendants aient examiné ces plans de manière critique.
Des représentants de la société civile affirment que les PRM ne s’avèrent pas une option climatique rentable et intelligente. Le nouveau nucléaire est déjà beaucoup plus coûteux que les sources d’énergie renouvelables éprouvées comme l’éolien et le solaire, et il n’y a aucune garantie que ces expériences nucléaires produiront de l’électricité en toute sécurité et à un prix abordable. En attendant de savoir si la conception des PRM sera réussie, le Canada perd du temps qui devrait être consacré de toute urgence à une véritable action climatique.
« L’industrie nucléaire, dirigée par des sociétés et des entreprises américaines et britanniques en démarrage, exerce des pressions et fait de la publicité au Canada pour nous convaincre que les nouvelles conceptions de plus petits réacteurs résoudront d’une manière ou d’une autre la crise climatique et surmonteront les problèmes de coût exorbitant, de déchets radioactifs toxiques et d’accidents nucléaires qui affligent l’industrie nucléaire depuis des décennies », a déclaré Susan O’Donnell (Ph. D.), professeur et porte-parole de la Coalition pour un développement énergétique responsable au Nouveau-Brunswick.
« Au Nouveau-Brunswick, en Ontario, en Saskatchewan et en Alberta, les collectivités sont préoccupées par la pression exercée pour développer des réacteurs nucléaires qui pourraient éventuellement être abandonnés sur place, les transformant en sites contaminés par la radioactivité et en dépotoirs de déchets radioactifs », a ajouté Mme O’Donnell.
Ginette Charbonneau, physicienne qui est membre du Ralliement contre la pollution radioactive au Québec, a déclaré que des groupes de la société civile au Canada réclament de cesser les plans d’extraction du plutonium à partir du combustible nucléaire irradié. Elle ajoute que des experts en non-prolifération croient que le soutien du Canada à cette technologie risquée pourrait miner les efforts pour empêcher d’autres pays de développer des armes nucléaires.
« Cette idée est vendue comme étant un « recyclage » des déchets radioactifs, mais en pratique elle créera plus de plutonium et de nouveaux flux de déchets radioactifs extrêmement problématiques qui devront être tenus à l’écart de l’environnement pendant des millions d’années », a déclaré Mme Charbonneau.
Des groupes de la société civile demandent au gouvernement d’interdire le retraitement du plutonium et de cesser de financer les PRM. Ils disent qu’une surveillance parlementaire et indépendante accrue est nécessaire, y compris des évaluations d’impact fédérales complètes pour tous les nouveaux réacteurs expérimentaux.
Annoncée comme la Semaine « Non pas encore le lobby nucléaire! », ces groupes rencontreront à Ottawa des députés, des groupes de réflexion et des ONG et ils tiendront des événements publics pour divulguer l’autre facette de l’histoire de l’énergie nucléaire – notamment les problèmes et les risques dont les lobbyistes de l’industrie ne parlent pas.
Depuis la publication de la « Feuille de route des PRM » en 2018, le gouvernement canadien a apporté son soutien aux PRM et à des initiatives connexes par les moyens suivants :
- environ 100 millions de dollars en subventions à des entreprises nucléaires des États-Unis et du Royaume-Uni pour développer leurs expériences nucléaires au Canada sans preuve indépendante d’un examen scientifique préalable
- un prêt à faible taux d’intérêt de 970 millions de dollars à Ontario Power Generation pour développer la conception d’un réacteur américain
- exemption de la plupart des PRM de l’application de la Loi sur l’évaluation d’impact, limitant ainsi considérablement la surveillance par les communautés des Premières Nations et de la société civile
- soutien des procédés expérimentaux d’extraction du plutonium à partir des déchets radioactifs stockés dans la baie de Fundy
- un contrat d’un milliard de dollars par année à SNC-Lavalin et à deux sociétés américaines pour exploiter les Laboratoires de Chalk River et d’autres installations fédérales (avec pratiquement carte blanche pour mener des expériences sur les déchets radioactifs et les PRM)
La Semaine « Non pas encore le lobby nucléaire! » est organisée par des groupes tels que le Regroupement pour la surveillance du nucléaire, la Fondation Sierra Club Canada, la Coalition pour un développement énergétique responsable au Nouveau-Brunswick, Northwatch, Ontario Clean Air Alliance, Concerned Citizens of Renfrew County and Area, l’Inter-Church Uranium Committee Educational Co-operative, la Coalition for a Clean Green Saskatchewan, Concerned Citizens of Manitoba et le Ralliement contre la pollution radioactive.
La semaine se poursuivra avec un débat le soir du 25 avril à l’Université d’Ottawa où Gordon Edwards, président du Regroupement pour la surveillance du nucléaire et expert des questions nucléaires depuis près de 50 ans, affrontera Chris Keefer, président de l’association Canadiens pour l’énergie nucléaire, sur le thème : Faut-il développer l’énergie nucléaire pour lutter contre le changement climatique?
CITATIONS
« Les prétentions selon lesquelles le Canada a besoin de nouveaux projets nucléaires pour contrer la dégradation du climat sont simplement fausses. Les soi-disant « petits réacteurs modulaires » ne sont pas éprouvés; ils sont extrêmement coûteux et suscitent des risques accrus de prolifération des armes nucléaires. En vérité, l’énorme pouvoir de lobbyisme de SNC-Lavalin (qui a tenté d’éviter un procès de pots-de-vin et de corruption en Libye) est à l’œuvre pour enrichir grassement ses entreprises nucléaires. »
- Elizabeth May, chef du Parti vert du Canada et députée de Saanich-Gulf Islands
« Pour assurer un avenir durable, j’estime que nous devons nous concentrer sur l'amélioration de notre efficacité énergétique tout en investissant dans des technologies qui sont actuellement opérationnelles. La gestion des déchets radioactifs est un problème non résolu et les risques sont ultimement ingérables. L'industrie projette le mirage qu'elle est indispensable alors qu'en fait, elle détourne l'attention qui devrait être portée à des solutions efficaces, sûres et à long terme. »
- Jenica Atwin, députée de Fredericton (Parti libéral)
« C’est une aberration de considérer les petits réacteurs modulaires comme une source d’énergie propre permettant de décarboner l’économie. Ces réacteurs ne sont pas rentables et le prix de leur développement est nettement supérieur à celui des énergies renouvelables. L’énergie des petits réacteurs coûterait presque 10 fois plus cher que le solaire et l’éolien. Sachant que dans son budget de 2023 le gouvernement prévoit 36,8 milliards sur 10 ans pour la filière énergétique, on ne peut qu’être inquiet! Le gouvernement doit se retirer de la chimère nucléaire et concentrer ses efforts sur de vrais projets verts. »
- Mario Simard, député de Jonquière (Bloc Québécois)
« L’énergie nucléaire ne peut pas être la solution miracle à la crise climatique. Il existe des énergies plus propres et moins coûteuses, c’est dans celles-ci que le gouvernement doit investir. L’élimination des gaz à effet de serre ne doit pas se faire au détriment de l’environnement en créant des déchets encore plus dangereux. »
- Alexandre Boulerice, député de Rosemont-La Petite-Patrie – NPD
« Les petits réacteurs modulaires sont une distraction sale et dangereuse de la lutte contre le changement climatique, et non pas une solution. Nous devons cesser de poursuivre des chimères nucléaires et continuer avec des technologies éprouvées déjà disponibles et abordables. »
- Gordon Edwards, président du Regroupement pour la surveillance du nucléaire.
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