Justice pour les prisonniers d'octobre '70

2023/08/16 | Par Droits collectifs Québec

La Cour suprême du Canada a annoncé aujourd'hui qu'elle refuse de se pencher sur la cause portée par M. Gaëtan Dostie (voir ici), dont les droits fondamentaux, tout comme ceux de dizaines de milliers de Québécoises et de Québécois, ont été bafoués par les autorités fédérales et policières lors de la Crise d'octobre '70.

Après avoir vu sa cause être rejetée tant par la Cour supérieure que par la Cour d'appel pour des raisons jugées fallacieuses, M. Dostie, qui fut soutenu par le regretté Frédéric Bastien et l'est toujours par des organismes tels l'Institut de recherche sur l'autodétermination des peuples et les indépendances nationales (IRAI) et Droits collectifs Québec (DCQ), portera donc sa cause devant le Comité des droits de l'Homme de l'Organisation des nations unies (ONU) afin d'obtenir justice, plus de cinquante (50) ans après les faits.
 

De la fin qui justifie les moyens

Ainsi, lors des fameux Événements d'octobre '70, alors que l'armée canadienne et les forces policières ont déployé des mesures qui normalement relèvent d'un véritable état de guerre, Gaétan Dostie est arrêté et détenu durant plusieurs jours sans inculpation aucune et sans droit de consulter un avocat ou une avocate. Les forces policières ont réservé le même sort à près de cinq cents (500) autres Québécoises et Québécois, sans compter les quelques trente-six mille (36 000) personnes qui ont été perquisitionnées injustement, abusivement et illégalement.

Ignorant toujours à ce jour les raisons qui poussèrent les autorités policières à procéder à son arrestation, il en gardera de graves séquelles psychologiques, le convaincant ainsi qu'il fut victime d'un important préjudice moral. « Bien que les chartes québécoises et canadiennes des droits et libertés de la personne n'existaient toujours pas au moment de l'arrestation et la détention abusives dont je fus victime, il est clair que mes droits fondamentaux ont été bafoués par les autorités canadiennes. Devant le refus prévisible de la Cour suprême d'entendre une cause gênante pour le Canada, la seule option restante afin d'avoir une autre occasion de le démontrer est de me tourner vers l'ONU » de lancer M. Dostie.
 

Du front commun des autorités formant l'État fédéral

Rappelons que, désirant obtenir justice auprès du gouvernement fédéral en voyant ce dernier reconnaître que ses droits constitutionnels ont été violés et lui offrir ses plus sincères excuses, M. Dostie avait entamé des démarches judiciaires en 2020, devant la Cour supérieure. La réaction du Procureur général du Canada était des plus prévisibles : refusant d'argumenter sur le fond de l'affaire, il demanda à la Cour de rejeter la demande d'action de M. Dostie, alléguant notamment que les délais de prescription étaient dépassés.

Malheureusement, le 22 novembre 2021, la tactique dilatoire du procureur du Canada remportait une première victoire, alors que le juge, évidemment nommé par Ottawa, rejeta la demande de M. Dostie aux motifs surprenants que les événements subis par ce dernier remontaient à trop longtemps et qu'il était inutile de se pencher sur une question de violation de droits constitutionnels plus de cinquante (50) ans après les faits.

Cette décision fut confirmée par la Cour d'appel le 5 décembre 2022, pour ensuite voir la Cour suprême annoncer aujourd'hui son refus d'entendre la cause. « Bien entendu, nous comprenons que les tribunaux, à l'instar des autres branches de l'État canadien, sont concernés par les intérêts généraux et supérieurs de ce dernier. Il n'en demeure pas moins que leur tâche est d'interpréter le Droit, et non pas de couvrir les exactions des autres pouvoirs relevant des autorités fédérales.

Convaincus de la justesse de la cause de M. Dostie et des centaines de Québécoises et Québécois illégalement arrêtés et détenus en octobre '70, nous accompagnerons ce citoyen exemplaire jusqu'à Genève, siège du Comité des droits de l'Homme, afin qu'il puisse enfin obtenir une réparation morale de la part de l'État fédéral. Le temps de l'impunité du Canada quant aux exactions commises à l'endroit de quelques-unes de ses minorités telles que les francophones, les Québécois et les nations autochtones, est terminé » de conclure le président de Droits collectifs Québec, M. Daniel Turp.
 

À propos de Droits collectifs Québec

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