L’auteur est un ancien haut fonctionnaire du gouvernement Allende et ex-député fédéral du Bloc Québécois
Le coup d'État du 11 septembre 1973, entraînant la mort du Président Salvador Allende, est un événement marquant de l'histoire du Chili. Je dois signaler tout de suite qu'il faut condamner également l'attentat du World Trade Center, à New York, le 11 septembre 2001, dont les médias parlent beaucoup à la même occasion. Les Chiliens, aussi bien à l'intérieur du pays qu'à l'étranger, commémorons, cette année, le 50e anniversaire de ces deux événements tragiques qui ont laissés des traces profondes dans nos vies.
Le régime du général Pinochet instaura un système de terrorisme d'État et de violations systématiques des droits humains dans le pays. C'était la fin de la voie chilienne vers le socialisme, une expérience unique en Amérique latine.
En 1970, le médecin et sénateur Salvador Allende avait été démocratiquement élu Président de la République, élection confirmée par le Congrès. Cette victoire avait été obtenue grâce à l'appui de milliers de travailleurs, paysans et habitants des bidonvilles, ainsi que d'une vaste coalition de partis de gauche, appelée Unité populaire (UP).
Allende avait mis en place un programme de profondes transformations économiques, sociales, politiques et culturelles. Ce programme de gouvernement inédit comprenait, entre autres, la création d'un important secteur d'économie sociale entre l'État et le secteur privé, la nationalisation du cuivre, la réforme agraire , la mise du crédit au service du peuple et de la petite et moyenne entreprise, la distribution gratuite aux écoliers, dans chaque école et à chaque jour, d'un demi-litre de lait, la hausse substantielle du salaire minimum, la participation et syndicalisation massive des travailleurs, etc.
Ce programme de justice sociale était ambitieux et un peu idéaliste. Des erreurs ont été commises. La collaboration des partis de l'Unité populaire fut insuffisante à plusieurs égards et pas toujours dans la bonne direction. Malgré tout, les réalisations du gouvernement Allende ont été évidentes, dans plusieurs domaines. Cependant, les raisons les plus importantes de la chute d'Allende ont plutôt été reliées à l'intervention des États-Unis, du Président Richard Nixon, de son secrétaire d'État Henry Kissinger et de la CIA, ainsi qu'à l'opposition féroce de la bourgeoisie chilienne et des militaires putschistes.
Le 11 septembre 1973, les forces armées décident de renverser le président constitutionnel en assassinant des milliers de personnes et en bombardant le palais présidentiel de La Moneda, où se trouvait le Président Allende. C'était la fin du rêve de millions de personnes, notamment de militants politiques, comme moi, de construire au Chili une société juste, digne, égalitaire, solidaire et inclusive. La dictature a duré 17 ans, jusqu'en 1990.
Programme de commémoration à Montréal
Dans notre métropole, la communauté chilienne et particulièrement la Fondation Salvador Allende de Montréal (FSAM) organisent une série d'activités, qui auront lieu en septembre et octobre prochains, visant à commémorer les 50 ans de ces événements tragiques.
De plus, nous célébrerons, cette année, l'arrivée au Québec de quelque 15 000 réfugiés et immigrants chiliens qui ont fait et continuent de faire une contribution importante à la société québécoise. Dans l'opinion de beaucoup de Québécois, les Chiliennes et les Chiliens constituent une histoire et un exemple d'immigration et d'intégration parmi les plus réussis au Québec. Enfin, nous profiterons de l'occasion pour exprimer toute notre gratitude au peuple québécois pour l'accueil solidaire, généreux et fraternel de milliers de Chiliens arrivés ici depuis 1973.
Dans ce contexte, la FSAM a élaboré un programme d'activités gratuites et ouvertes au public, qui auront à la fois un caractère historique, artistique, culturel et social. Elles comprendront notamment des expositions d'art visuel, la présentation de livres d'écrivains chiliens d'ici, la projection de films et documentaires, des conférences, des spectacles de musique, parmi lesquels se trouve un concert en plusieurs langues intitulé « 50 chansons pour Allende ». La plupart de ces activités se dérouleront à l'Écomusée du Fier monde, situé au 2050, rue Atateken, à Montréal.
Ce 50e anniversaire constitue une occasion exceptionnelle de revisiter l'Histoire, de réaffirmer notre idéal de démocratie et de justice sociale et de le partager avec les nouvelles générations de Québécoises et de Québécois. Salvador Allende est devenu l'une des personnalités les plus remarquables du XXe siècle. Son héritage est énorme et toujours valide et d'actualité.
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