Avec la présentation du budget viennent les spéculations sur l’ampleur du déficit. On manque littéralement d’argent pour perpétuer le financement de services publics de plus en plus exigeants au regard d’une population qui s’attend à ce qu’on les renfloue de façon constante.
On n’ose poser honnêtement la question des revenus puisqu’on l’associe à une hausse d’impôt que l’on a rendu impopulaire à cause d’une remise en cause de l’intervention de l’État que l’on affirme toujours plus encombrant. Pourtant à chaque élection des gens, enviant la situation des détenteurs du pouvoir, se présentent avec la prétention de solutionner mieux que les autres les problèmes de l’État si seulement on les laisse accéder aux postes de pouvoir.
Sans imagination, les futurs détenteurs du pouvoir n’ont de cesse de proposer des solutions éculées à cet endettement forcé que provoque leur volonté de remplir leurs promesses alléchantes pour les citoyens-votants afin d’être reconduit mieux que leurs adversaires. Les déficits récurrents, qui nous obligent à emprunter sur des marchés financiers voraces, nous mettent à la merci des banques privées pour la plupart dont le seul motif d’existence est d’engranger les profits pour leurs actionnaires.
Cette mécanique infernale ne semble pas avoir d’issue. En fait, on nous cache une solution qui a été tentée maintes fois par plusieurs États et qui demande un certain courage politique pour affronter un statu quo qui veut que l’État n’intervienne que le moins possible pour orienter la société vers son propre bien. C'est-à-dire la sortir des intérêts privés afin de faire valoir le bien commun.
Cette intervention de l’État irait, selon des solutions prometteuses envisagées, dans le sens d’une socialisation des grands moyens de production et d’échange comme on en a vu une durant la Révolution tranquille avec la nationalisation de l’hydroélectricité. En dépit des crises récurrentes, les différentes compagnies privées ou étrangères, comme il en était de la maitrise de l’électricité au Québec, engendrent des profits qui pourraient être socialisés comme source de revenus pour un État interventionniste. Cela signifie que l’on se libérera du carcan d’une conception de l’État minimal.
De toute façon, l’État québécois intervient dans des secteurs non militaires qu’on le veuille ou non et tous les tenants de l’État minimal veulent eux aussi accéder au pouvoir avec une volonté de ne pas handicaper l’État outre mesure puisque celui-ci leur permet, une fois au pouvoir, de faire valoir une volonté politique qui ne va pas au-delà des insatisfactions que provoqueraient des coupures exagérées dans les services à une population qui les apprécie hautement quand il s’agit de choisir où sera investi l’argent public. L’appui majoritaire aux revendications des syndicats du secteur public le démontre amplement.
Alors comment faire tomber le tabou de l’intervention de l’États en vue de nationalisations massives ? Répéter ad vitam aeternam ce que les différents gouvernements socialistes ont appris et fait au cours de leur histoire ne suffira pas. Dire que le Mexique et la Bolivie ont nationalisé leurs mines de lithium n’aura que peu d’influence. Scander que le bien commun doit prévaloir n’empêchera pas les politiques de le répéter sans en tirer les conséquences pour une intervention de l’État dans le sens de tirer de nouveaux revenus de nationalisations. Envoyer des lettres aux lecteurs allant à contre-courant, qui ne seront de toute manière pas publiées pour influencer l’opinion, ne servira pas non plus.
Je pense somme toute que ceux qui partagent ce point de vue, avant d’entrevoir à l’avance toutes les objections, devraient se concerter pour faire de leurs groupes de pression, syndicats, groupes populaires, associations citoyennes… des relais de ce point de vue. Bien sûr, les plus réticents manifesteront tout de suite que la revendication est trop élevée, qu’elle contrevient à l’ambiance générale de l’État minimal imposé par la droite, qu’elle est par trop radicale, etc., etc. On peut se déclarer perdant en partant et renoncer à une certaine unanimité dans nos rangs, mais il n’y a que les convaincus qui finissent par convaincre. Si on est persuadé avoir raison, il n’y a pas de doute que l’idée de nationalisation pourrait redevenir populaire et gagner du terrain parmi ceux qui veulent accéder au pouvoir. Les grandes réformes n’ont pas connu d’autre chemin que celui de la persuasion et de l’éducation de masse.
Je commence par cet article. Qui dit qu’il ne sera pas lu par quelque convaincu qui en reprendra le thème? Qui dit que mon envoi aux partis politiques ne suscitera pas l’intérêt pour être ajouté aux programmes? Ou du moins partiellement à commencer par une simple nationalisation de petite envergure pour l’essayer?
J’ignore comment influencer l’opinion au-delà des clichés habituels des hommes et des femmes politiques traditionnels, mais mon idée n’est pas nouvelle. Elle a été expérimentée avec succès dans différents pays pour renflouer les coffres d’États renaissants après le fascisme ou une révolution. Certes, nous ne sommes pas dans de grandes périodes de bouleversement, mais qui y renonce en partant ne proposera jamais rien d’audacieux ou d’innovateur en politique. Je ne veux pas renoncer à propager mon message pour contrecarrer la résignation générale devant des déficits dont tout le monde parle comme d’une calamité. Alors des solutions existent qui ont fait leurs preuves. Il ne s’agit que de bousculer certaines idées reçues qui n’ont plus leur place pour des solutions rationnelles dont la population ne peut pas exclure qu’elles viendront à point nommé.
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