Quand on parle d’environnement au fédéral, on ne peut que constater que le gouvernement Trudeau fait semblant d’agir et ce qu’il fait, il le fait du bout des lèvres. Un gouvernement conservateur ne sera pas plus enclin à bouger.
Les PDG des cinq grandes pétrolières canadiennes et ceux des cinq banques ont comparu en juin dernier au Comité permanent de l’environnement et du développement durable de la Chambre des communes. Je suis membre de ce comité. J’ai donc été témoin de leurs propos que je qualifie d’indécents. Autant les uns que les autres se moquent éperdument des émissions de GES, des engagements du fédéral dans l’Accord de Paris et conséquemment de la crise climatique.
Alors que le secteur pétrolier défend ses profits records et sa volonté d’augmenter la production, le secteur bancaire reconnait le rôle important qu’il doit jouer et assure que nous devons progressivement détourner l’économie de l’utilisation intensive de carbone... Mais, déclare le PDG de la Banque Royale, nous n’en sommes pas encore là.
Comme si on avait du temps devant nous, comme si les forêts ne brûlaient pas déjà, comme si les inondations n’étaient pas courantes sur notre planète, comme si les pluies abondantes ne faisaient pas assez de dommages ici même au Québec, comme si la santé des populations n’était pas en jeu, comme si la perte de biodiversité n’était pas drastique, comme si les terres agricoles n’étaient pas menacées par les changements climatiques.
D’où vient l’assurance des pétrolières que le gouvernement écoute? D’où leur vient la justification d’accroître la production de pétrole?
Des témoignages
Écoutons M. Kruger de Suncor lors de son témoignage devant le Comité :
« Le Canada a la chance d’avoir une abondance de pétrole et de gaz, soit la quatrième réserve de pétrole la plus importante au monde. Il s’agit d’une quantité que les Canadiens ne pourraient consommer en plus d’un siècle. C’est ici que les occasions entrent en jeu. Fournir de l’énergie abondante, abordable et produite de façon responsable, avec des taux d’émissions plus faibles, aux personnes partout dans le monde, dont les alliés qui s’inquiètent de plus en plus de la sécurité énergétique. »
Rappelons que Suncor a vendu ses parts dans l’éolien et le solaire.
Et que dit M. Jon McKenzie de Cenovus Énergy inc.?
« Tandis que le bouquet énergétique mondial se diversifie, toutes les études crédibles indiquent que nous continuerons d’avoir besoin de toutes les formes d’énergie, notamment de pétrole, pour aider à répondre à la demande croissante d’énergie dans le monde. Ce pétrole, il faudra le produire quelque part et ce devrait être au Canada, où nous avons certains des règlements les plus rigoureux au monde et des valeurs environnementales, sociales et de gouvernance qui dominent l’industrie. »
En même temps que M. McKenzie nous parle de règlements plus rigoureux, certains PDG se sont plaints de trop de règlementation. Cherchez l’erreur. En fait, il n’y a pas d’erreur. On veut moins de règlementation, plus de production et tant pis pour la crise climatique.
Les pétrolières veulent nous convaincre que le pétrole des sables bitumineux est du pétrole vert. Le gouvernement abonde dans le même sens et annonce cinq mesures fiscales totalisant 82 milliards $ d’ici 2035 pour les aider dans leurs fausses solutions.
Au Canada, les cinq banques canadiennes sont toutes classées dans le premier tiers du palmarès mondial du financement des hydrocarbures. Leurs investissements représentent 13 % du financement mondial dans un pays qui compte pour 0,5 % de la population.
Leurs arguments sont les mêmes que ceux des pétrolières, leurs solutions également : nucléaire, captage et stockage de carbone, et de l’argent public pour l’utilisation des énergies renouvelables. Pas étonnant quand on connaît le chevauchement qui existe entre certains administrateurs des banques et ceux des entreprises de combustibles.
Dans les deux derniers budgets, des milliards $ seront consacrés à des technologies prisées des pétrolières et des banques : la capture et le stockage de carbone, le nucléaire. Ces solutions, qui sont celles de l’industrie, coûtent une fortune aux contribuables alors que des alternatives existent.
Les énergies renouvelables comme l’hydroélectricité et les énergies éolienne et solaire sont moins coûteuses que les énergies fossiles selon une étude de l’Agence internationale de l’énergie et le nombre d’emplois dans les énergies renouvelables s’accroît dans le monde. Quand les libéraux vont-ils baser leurs politiques sur la crise climatique plutôt que sur les pleurnichages des pétrolières?
Au Québec, notre énergie est renouvelable, propre, issue d’une ressource reconnue comme faisant partie du bien commun et elle est nationalisée.
L’autrice est députée du Bloc Québécois