Le Rassemblement pour la laïcité (RPL) se réjouit de la demande faite par le ministre de la Justice du Québec, Simon Jolin-Barrette, à son homologue fédéral, Arif Virani, d’abroger l’exception religieuse en matière de propagande haineuse dans le Code criminel.
Il s’agit des alinéas alinéas 319(3)b et 319(3.1)b stipulant que nul ne peut être déclaré coupable de fomenter volontairement la haine contre un groupe identifiable s’il « a, de bonne foi, exprimé une opinion sur un sujet religieux ou une opinion fondée sur un texte religieux auquel il croit, ou a tenté d’en établir le bien-fondé par argument ». Cette protection particulière accordée au discours religieux susceptible de fomenter la haine est non seulement injustifiable dans un État de droit, mais elle est surtout dangereuse. En particulier, il est probable qu’elle ait guidé la DPCP dans sa décision de renoncer à la poursuite d’Adil Charkaoui pour avoir, lors d’une manifestation à Montréal, prié Allah de «recenser et exterminer» tous les « ennemis du peuple de Gaza ».
« Dans le contexte extrêmement tendu de la guerre entre Israël et le Hamas, il est particulièrement important de se donner les moyens de réprimer toute tentative d’importation de la haine ici au Québec et au Canada, et de ne pas laisser aux agitateurs la possibilité de se disculper sous couvert de la religion » de déclarer Nadia El-Mabrouk, présidente du RPL.
Ce n’est pas la première fois que la société civile se lève contre cet article inique du Code criminel, tant s’en faut. En 2017-2018, plus de 1 500 personnes avaient déjà demandé l’abrogation de cette exception religieuse en déposant alors une pétition à la Chambre des communes. À l’époque, la réponse du gouvernement avait été inadéquate, la ministre de la Justice ayant cité une version antérieure de l’alinéa, ce qui lui permettait d’éluder la question.
En effet, rappelons que, loin d’être abrogé, l’alinéa en question a plutôt été renforcé en 2003 par le projet de loi C-250, rajoutant la protection contre les discours fondés sur un texte religieux. Outre cette modification, le projet de loi se limitait à une seule autre demande : l’ajout de l’orientation sexuelle à la liste des groupes identifiables protégés contre la propagande haineuse. « Peut-on croire à une simple coïncidence? Comment ne pas y voir le souci de calmer les inquiétudes religieuses de plusieurs députés insatisfaits de la protection octroyée à l’orientation sexuelle? On ne peut envisager un mobile moins légitime ou plus cynique que celui-là » de rajouter David Rand, membre du RPL et président de l’association des Libres penseurs athées.
La demande du ministre Simon Jolin-Barrette fait écho au projet de loi déposé par le Bloc québécois en novembre 2023, et redéposé en février 2024 à la Chambre des communes, mais qui n’a toujours pas été retenu pour examen. «Ce mutisme de la part des élus fédéraux est troublant. Ont-ils un malaise à reconnaitre les limites de la liberté religieuse? Elle ne devrait, en aucun cas, servir à exempter des propos qui fomentent la haine ou le génocide. C’est une position qui devrait faire consensus» de renchérir Etienne-Alexis Boucher, vice-président du RPL.
Pour toutes ces raisons, le RPL appuie sans réserve la demande du ministre de la Justice d’abroger cet article du Code criminel inconciliable avec une société démocratique et laïque, et qui représente une position intenable pour un gouvernement qui veut faire de la lutte contre le discours haineux une priorité.
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