Le projet minier Horne 5 : un projet inacceptable!

2025/01/10 | Par Marc Nantel

L’auteur est porte-parole du Regroupement Vigilance Mines Abitibi-Témiscamingue (REVIMAT)

Concernant le projet Horne 5 à Rouyn-Noranda, le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement a déposé son rapport le 7 janvier 2025 au ministère de l’Environnement. Le BAPE conclut que le projet, tel qu’il est présenté, ne satisfait pas aux exigences minimales en matière de sécurité, de santé publique, de protection de l’environnement et d’internalisation des coûts. Ce projet n’est donc pas acceptable dans l’état actuel des connaissances portées à son attention.

Voici en substance les positions des différents groupes lors de l’audience.

Pour le projet

Les entrepreneurs régionaux vantent l’apport économique du projet, qui devrait créer 500 emplois durant sa phase d’exploitation et être en service pendant environ 15 ans. Ils voient les enjeux environnementaux encourus par ce projet comme étant tout simplement un beau défi.

Comme une certaine quantité de cuivre et de zinc sera extraite, le promoteur affirme que ce projet répond à la stratégie des métaux stratégiques et critiques du gouvernement.

Un autre avantage soulevé par le député Daniel Bernard est la restauration d’un parc à résidus miniers.

Contre le projet

L’enjeu principal pour la population est que  le développement de la mine Horne 5 se situe dans une zone urbaine sous  la Fonderie Horne. Cette mine polymétallique va exploiter une ancienne mine à une profondeur de 1 à 2 km et projette déjà d’exploiter plus profondément.  Elle se situe dans une région où beaucoup d’autres galeries de mines abandonnées affaiblissent la masse rocheuse.

Depuis quelques années, plusieurs tremblements de terre (mouvement sismique induit) ont été déclenchés par la mine La Ronde et la mine Goldex en Abitibi à la hauteur de 1,5 à 4,5 à l’échelle de Richter. Ces tremblements de terre se produisent en région parce que les gisements exploités sont de plus en plus profonds, ce qui amplifie les tensions sur le roc.

Cette tension se libère de façon imprévisible et provoque des tremblements de terre. À partir de 1 km de profondeur, ces phénomènes sont fréquents. C’est donc prévisible que des phénomènes géologiques soient déclenchés par la mine Horne 5.

Il ne faut pas oublier que des affaissements de terrain se sont produits au cours des années dans notre région minière. On pense, entre autres, à l’affaissement de la route 117 longeant le projet Goldex à Val d’Or ou encore à l’apparition d’un trou béant d'une largeur de huit mètres et de trois mètres de profondeur qui s'est formé dans la colline face au terrain de baseball du parc Mouska de Rouyn-Noranda situé sur le site de l'ancienne mine Chadbourne.

On peut facilement imaginer l’ampleur de la catastrophe environnementale qui pourrait se produire si ces événements se produisaient sous la Fonderie Horne. Il est important de souligner que cette usine a des infrastructures désuètes. On y retrouve des réserves d’acide sulfurique ainsi que des réserves de multiples produits toxiques rentrant dans les procédés de l’usine.

Les mortalités pouvant être causées par les émissions de l’acide sulfurique advenant des bris sur les structures sont bien documentées depuis les années 2000. Un tremblement de terre et un affaissement de terrain pourraient provoquer des ruptures dans les infrastructures de la fonderie et provoquer un désastre. La Fonderie Horne reconnaît indirectement cette possibilité en exigeant du promoteur de la prochaine mine d’avoir des assurances de 250 millions de dollars pour la dédommager en cas de bris.

La qualité de l’air est aussi un enjeu majeur pour la population. Plusieurs contaminants potentiellement cancérigènes et cancérigènes sans seuil contaminent déjà la ville de Rouyn-Noranda et dépassent les normes. La documentation est abondante sur le sujet depuis le début des études de biosurveillance de 2018 et 2019 et des études de l’INSPQ qui ont suivi.  

Donc, en vertu de l’article 197 du Règlement sur l’assainissement de l’atmosphère (RAA), le projet Horne 5 ne peut pas être mis en opération, car cette mine ajoute des contaminants dans l’air:

Article 197. Il est interdit, à compter du 30 juin 2011, de construire ou de modifier une source de contamination ou d’augmenter la production d’un bien ou d’un service s’il est susceptible d’en résulter une augmentation de la concentration dans l’atmosphère d’un contaminant mentionné à l’annexe K au-delà de la valeur limite prescrite pour ce contaminant à la colonne 1 de cette annexe ou au-delà de la concentration d’un contaminant pour lequel cette valeur limite est déjà excédée.

La Direction de la santé publique de l’Abitibi et du Témiscamingue (DSPU) affirme, pour sa part, que les périmètres d’urbanisation devraient être d’emblée considérés comme des territoires incompatibles avec l’activité minière afin de favoriser la santé et le bien-être des populations. Elle est défavorable à l’implantation de tout projet minier à l’intérieur de ces limites.

Plus spécifiquement, elle souligne que les traitements offerts au centre de radio-oncologie requièrent la plus haute précision. Ils sont administrés par un appareil de radiothérapie qui tourne autour du patient. La rotation de l'appareil se fait autour d'un point spécifique dans l'espace, l'isocentre. Cet isocentre ne doit pas varier de plus de 1 mm en tout temps. Ces critères sont nécessaires pour assurer la sécurité des traitements de radiothérapie.

Une variation dudit isocentre de plus d'un millimètre pourrait entraîner une irradiation involontaire des organes sains à proximité, ce qui pourrait être associé à des toxicités pouvant aller jusqu'à entraîner le décès d'un patient. Donc tout tremblement de terre pourrait provoquer ces déplacements.

En ce qui concerne la sismicité induite, la DSPU est d’avis que la nature imprévisible de ce type d’événement est incompatible avec les traitements de radio-oncologie qui requièrent la plus grande précision. Le promoteur n’est pas en mesure de faire la démonstration que son projet ne générera aucun risque de sismicité induite.

Les études de prévisibilité citées publiquement par le promoteur, qui soulignait qu’il n’y avait aucun danger pour les traitements au centre de radio-oncologie concerneraient uniquement les vibrations des sautages journaliers et non la sismicité induite (tremblement de terre).

Dernièrement, l’équipe de Horne 5 a pris entente avec la DSPU afin de faire faire des études indépendantes pour répondre à leurs inquiétudes.

Dans le discours promotionnel de la Horne 5, les promoteurs parlent sans arrêt de leur engagement  à réduire les risques. La simple utilisation de l’expression « réduire les risques » implique qu’il y a des risques pour la population. Dans le contexte d’une mine, qui va opérer dans une zone urbaine et la possibilité très forte de tremblements de terre, aucun risque, si petit soit-il, ne peut être envisagé.

Malgré la position du BAPE, je crains que le gouvernement ne prenne une décision déraisonnable en donnant son aval au projet Horne 5 pour des raisons purement économiques.  L’aveuglement volontaire est inacceptable.