Donald Trump a le dos large. Le Canada (anglais) s’élève comme un seul homme pour décrier Trump et s’opposer à ses tarifs et ses visées annexionnistes. D’une même voix, on annonce que les barrières non tarifaires seront abattues, que des corridors énergétiques (gazoducs, oléoducs, voies ferrées) seront établis pour faire plaisir surtout à l’Alberta et à la Saskatchewan.
Gare à vous si vous osez lever le doigt pour dire, « Un instant! Nous ne sommes pas à vendre, nous non plus! » On vous traitera aussitôt de « Trumpiste », voire de traitre.
« We are the greatest nation in the world and we are not for sale », a crié Michael Bublé à la récente cérémonie des prix Junos où la langue française se faisait très discret, aux dires de Klô Pelgag.
Dans cette orgie de nationalisme canadien, a-t-on consulté la « société distincte » au Canada, qui s’appelle le Québec? Mais vraiment consulter? Au-delà des quelques phrases prononcées par le premier ministre Legault? La réponse est non. Pas besoin.
L’idée qui doit circuler dans les officines politiques anglo-canadiennes est sûrement, « Ne jamais gaspiller une bonne crise! » Finissons-en pour de bon avec ces empêcheurs de tourner en rond au Québec.
Ça a déjà commencé avec l’annonce par les principaux partis de l’accélération de la construction d’un gazoduc vers un éventuel port méthanier au Saguenay et d’un oléoduc pour « libérer » le Québec et les provinces maritimes de leur dépendance au pétrole qui arrive de l’est américain. D’autres préfèrent des convois ferroviaires qui passeraient tous par le Québec.
Mais où est passé notre préoccupation climatique? L’élection de Trump aurait-elle rendu propre le pétrole des sables bitumineux, qui serait maintenant « libérateur ».
En construction, des entrepreneurs ontariens se plaignent souvent – et vivement – des « barrières non tarifaires » que représente la réglementation québécoise. Elle touche à la santé et sécurité au travail, à l’affiliation syndicale, à l’embauche, à la langue française et autres. Sommes-nous prêts à sacrifier des conditions obtenues de haute lutte? Je ne pense pas.
Les bêtes noires font surface
La langue et la Constitution avec sa clause nonobstant, bêtes noires historiques du Canada anglais, sont déjà à l’avant-scène de la campagne électorale, grâce au nouveau sauveur du Canada, Mark Carney, qui sait exactement ce qu’il fait. Et la liste s’allonge.
Pour le Québec, il n’y a rien de nouveau sous le soleil. Dès qu’on bat furieusement le tambour canadien, le Québec doit attacher sa tuque avec de la broche, sinon il écopera.
Les précédents sont nombreux. Allons aux deux plus saisissants.
Dans un élan de nationalisme britanno-canadien en 1917, le Canada a imposé la conscription malgré l’opposition véhémente du Québec et des Canadiens français. La loi sur la conscription a donné lieu à des chasses à l’homme massives au Québec et surtout à la tuerie de Pâques 1918 où des soldats anglophones déployés à Québec – on n’avait pas confiance en les soldats canadien-français – ont tiré sur les manifestants tuant sur le coup 4 manifestants avec des balles explosives proscrites.
Retour de la conscription en 1942 dans un autre élan de nationalisme britanno-canadien – le Canada politique était encore très attaché à l’empire britannique. On connaît la suite : les opposants à la conscription, concentrés au Québec où on ne partageait pas cette allégeance à la Couronne et à l’empire, ont été traités de zombies et avec le temps à des philonazis.