Il est fort heureux que le projet de loi 94, Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l’éducation et modifiant diverses dispositions législatives, insiste sur l’égalité entre les femmes et les hommes, une des valeurs phares du Québec, qui se doit d’être promue dans nos écoles pour assurer sa pérennité.
Au Québec, c’est la Charte des droits et libertés de la personne qui garantit l’égalité entre les femmes et les hommes (soit à son article 50.1) en interdisant notamment toute discrimination en fonction du sexe (article 10). La Charte québécoise reprend ainsi les principes énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, qui proclame que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit, sans distinction aucune, notamment de sexe.
Il est donc étonnant de constater que le PL 94 utilise de nouveaux concepts pour faire respecter l’égalité entre les femmes et les hommes dans ses institutions. En effet, ce dernier évite de nommer le « sexe », préférant l’expression « l’identité sexuelle ou de genre » lorsqu’il s’agit d’interdire toute forme d’intimidation ou de violence pour protéger le droit des femmes à l’égalité.
L’utilisation de cette expression est problématique en plus d’être juridiquement questionnable.
D’abord, qu’est-ce qu’une identité sexuelle ? Tous les êtres humains ont un sexe, mâle ou femelle. Il ne s’agit pas d’une « identité », mais bien d’une caractéristique intrinsèque et immuable de la personne.
Par ailleurs, en amalgamant l’identité sexuelle à l’identité de genre dans la même expression, le PL 94 ferme les yeux sur le fait que le sexe et le genre sont deux concepts distincts et reconnus comme tels dans la Charte, puisque nommés séparément.
Le sexe est une réalité biologique observable qui divise notre espèce en deux catégories strictes : mâle et femelle.
Le genre n’a pas d’existence intrinsèque, il est basé sur un ressenti qui peut évoluer dans le temps.
Selon le glossaire développé par le ministère de l’Éducation pour le programme Culture et citoyenneté québécoise, le genre est un « [p]rocessus social et historique de différenciation et de hiérarchisation des femmes et des hommes ainsi que du féminin et du masculin[1] . »
Rappelons qu’une hiérarchie est un classement des fonctions selon un rapport de subordination.
Il faut, bien sûr, respecter et accueillir les personnes s’exprimant ou s’identifiant à un genre différent de leur sexe, mais il semble contradictoire, dans de telles circonstances, d’associer l’égalité entre les femmes et les hommes à l’identité de genre.
La Charte québécoise reconnaît « le sexe » et « l’identité ou l’expression de genre » comme étant deux motifs distincts interdits de discrimination.
La reconnaissance du sexe, qui est à la base du droit des femmes à l’égalité, est primordiale pour protéger la séparation femmes-hommes dans les vestiaires et toilettes des écoles ainsi que dans le sport. Cette reconnaissance n’exclut pas pour autant la présence de toilettes et de vestiaires neutres, comme cela se fait actuellement dans les écoles[2], pour accommoder notamment les personnes vivant un mal être avec leur sexe biologique.
En ne mentionnant pas le sexe, parmi les éléments à prendre en considération, lorsqu’il s’agit d’offrir un milieu sécuritaire et exempt de toute forme d’intimidation ou de violence, le PL 94 invisibilise les filles et les femmes et participe, ce faisant, à l’effritement des mesures mises en place pour leur sécurité et leur participation dans le système scolaire québécois.
Chaque mot ayant son importance légale, il convient de respecter les termes de la Charte québécoise. Donc, il faut voir à ajouter le mot « sexe » dans la liste des motifs interdits d’intimidation ou de violence contenue dans le projet de loi 94 et remplacer l’expression « identité sexuelle ou de genre » par « l’identité ou l’expression de genre ».
Il s’agit, sans contredit, d’un élément du projet de loi 94 devant absolument être corrigé si l’on tient à assurer une véritable promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le système scolaire québécois.