Le magicien Reid transforme les bourses en prêts

Dès septembre prochain, l’endettement des étudiants doublera

Les effets du budget Séguin commencent à faire des remous dans les cégeps et les universités. La somme de 63,5 millions $ a été retranchée de l’Aide financière aux études (prêts-bourses), ce qui représente le tiers des sommes totales versées en bourses chaque année. À la fin avril, le ministre de l’éducation Pierre Reid annonçait que, dès septembre prochain, l’endettement des étudiants du Québec doublera.

Au Québec, près de 40 % des étudiants poursuivant des études post-secondaires ont recours aux prêts et bourses. En région, le pourcentage atteint 60 %. Dans le système de l’Aide financière, les bourses sont octroyés selon les revenus des parents. Ce sont donc les étudiants des familles à faibles revenus qui écoperont directement des compressions. En septembre, la majorité de leurs bourses se transformeront en prêts. Auparavant, le plafond annuel des prêts pour un étudiant au baccalauréat était de 2 680 $ et de 2 120 $ au cégep, le reste de l’aide financière étant versé en bourses.

À compter de l’automne prochain, les cégépiens s’endetteront à chaque année de 1 000 $ supplémentaires et les universitaires de 2 000 $. L’endettement des étudiants en technique professionnelle pourrait atteindre 9 450 $ et les étudiants détenteurs d’un bac pourront devoir plus de 20 000 $ au gouvernement au terme de leurs études. Ceux qui termineront une maîtrise pourraient s’endetter à hauteur de 32 000 $.

Le taux moyen d’endettement étudiant au Québec est actuellement de 13 100 $. Avec les mesures adoptées par les Libéraux, le Québec rejoindra la moyenne canadienne où le taux d’endettement est de 20 000 $, même si les frais de scolarité sont beaucoup plus élevés dans le reste du Canada, soit environ 2 500 $ par année de plus qu’au Québec.

Tout comme la hausse des frais des garderies à 5 $ durant les vacances d’été, la convocation du forum sur les cégeps pendant les examens, les compressions l’Aide financière ont été adoptées en catimini en pleine fin de session universitaire. Tout le milieu a été pris de court.

Personne n’avait envisagé ce scénario. Suite à la Commission sur le financement des universités, les associations étudiantes et les administrations universitaires s’attendaient plutôt à un dégel des frais de scolarité. Jamais il n’a été question que la réduction du programme des prêts et bourses serve à financer les baisses d’impôts promises par le gouvernement.

La manœuvre est d’autant plus habile que le ministre Reid respecte formellement sa promesse électorale de maintenir le gel des droits de scolarité. Non seulement les universités et les cégeps sous-financés depuis plusieurs années ne reçoivent pas un sou de plus, mais avec les 63,5 millions retranchés de l’Aide financière, le gouvernement réalise une économie nette estimée à 100 millions de dollars.

On se souviendra que certains recteurs d’université espéraient renflouer les finances de leurs universités avec une éventuelle hausse des frais de scolarité. Étudiants et administrations se sont fait jouer. Les universités devront se contenter d’un peu moins de 126 millions, c’est un manque à gagner de 149 millions.

Prises par surprise, les associations étudiantes ont vivement condamné les mesures rétrogrades du gouvernement. Pour l’instant aucune mobilisation précise n’a été décidée du côté des associations étudiantes. L’ASSÉ (Association pour une solidarité syndicale) prévoit un automne mouvementé avec la décentralisation des cégeps, les compressions dans le programme d’aide financière et l’absence de réinvestissement dans l’éducation. Les motifs de luttes ne manqueront pas !