La vérité à propos de la bataille de Vimy

2017/06/20

Tout comme Stephen Harper avant lui, Justin Trudeau a présenté la bataille de Vimy comme l’acte fondateur du Canada.

On se rappellera qu’en 2007, le gouvernement de Stephen Harper avait, lui aussi, commémoré avec un faste exceptionnel le 90e anniversaire de l’assaut de la crête de Vimy par les troupes canadiennes lors de la Première Guerre mondiale. 

Pour la première fois de l’histoire, quatre divisions canadiennes unissaient leurs efforts pour un assaut commun. La presse anglophone, se faisant l’écho de plusieurs manuels d’histoire canadiens-anglais, a présenté l’événement comme étant rien de moins que l’acte fondateur du Canada. 

À l’époque de Harper, la commémoration de Vimy faisait partie d’une intense campagne de propagande du gouvernement canadien pour justifier la guerre en Afghanistan. Elle coïncidait avec le lancement de la télésérie La Grande Guerre, qui mettait en vedette nul autre que Justin Trudeau dans le rôle de Talbot Mercer Papineau ! 

Malgré cette campagne d’intoxication, particulièrement intense au Canada anglais, il s’était trouvé néanmoins des journalistes pour dégonfler le mythe de Vimy. Dans le Globe and Mail du 7 avril 2007, le journaliste Michael Valpy rappelait qu’il n’y a qu’au Canada où l’assaut de la crête de Vimy est célébré comme un important fait d’armes. 

Il soulignait également que, bien qu’il soit vrai que les soldats canadiens aient remporté une victoire tactique, celle-ci avait été préparée par des stratèges militaires britanniques, que les troupes canadiennes étaient composées en majorité d’immigrants britanniques de fraîche date, commandées par des officiers britanniques et qu’elles bénéficiaient du soutien logistique de l’artillerie britannique. 

Michael Valpy précisait que la reconnaissance par le Canada de l’importance de cette bataille est venue de la presse… anglaise et américaine ! Il raconte que le premier ministre Borden a écrit dans son journal personnel : « Tous les journaux louent les Canadiens. Le New York Times a déclaré que la bataille “sera dans l’histoire canadienne... une journée de gloire qui servira d’inspiration aux jeunes Canadiens pour des générations à venir” ». 

Avec à leur tête le leader nationaliste Henri Bourassa, les Québécois se sont opposés à une participation à cette guerre en rappelant le Règlement 17 en Ontario, qui privait les Franco-Ontariens de leurs écoles françaises. À l’époque, lorsque les lourdes pertes subies lors de la bataille de la crête de Vimy forcent le gouvernement Borden à mettre en vigueur la conscription, le Québec se révolte et des émeutes font quatre morts dans la ville de Québec.

C’est pour combattre l’opposition à la guerre que les autorités fédérales sortent alors de leur manche Talbot Mercer Papineau, un arrière-petit-fils de Louis-Joseph Papineau. Talbot Mercer Papineau, un anglo-protestant d’origine américaine, fait paraître dans The Gazette un texte qui s’en prend au pacifisme d’Henri-Bourassa qui, rappelons-le, était le petit-fils de Louis-Joseph Papineau. 

Son texte, nous rappelait Normand Lester dans un article publié dans Le Devoir (2 août 2006), sera utilisé à des fins de propagande impérialiste jusqu’en Angleterre. Le Times de Londres le publie sous le titre The Soul of Canada.

En regardant Justin Trudeau déclarer que la bataille de Vimy était « l’acte fondateur du Canada », souvenons-nous que ces événements ont conduit à la crise de la conscription et, en réponse à la campagne de haine menée contre le Québec dans la presse anglophone à cette occasion, au dépôt à l’Assemblée législative du Québec d’une motion par le député J.-N. Francœur qui stipulait que le « Québec serait disposé à accepter la rupture du pacte fédératif de 1867 ». 

C’était la première fois que la question de l’indépendance du Québec refaisait surface sur la scène politique depuis les Patriotes de 1837-1838.