Pourquoi mettre toutes ses billes dans l’OTAN ?

Comme Canadiens, peut-on se laver les mains entièrement ?

2020/01/31

Dès le 3 janvier, à la radio torontoise de CHOQ-FM, le professeur américain Norman Cornett, qui a étudié la théologie à l’université de Dallas au Texas, décrit la conjoncture de l’assassinat du commandant de la section guerrière des Gardes Révolutionnaires iraniens Qasem Soleimani ainsi : Personnifiant l’archange Saint-Michel, Trump offre la tête d’un « démon musulman » à ses alliés évangélistes réunis à Miami au congrès King Jesus International Ministry ! Comme l’observait le stratège chinois contemporain de Socrate, Souen Tseu, dans L’Art de la guerre : « Les guerres se gagnent dans les temples, quarante ans avant de se gagner sur les champs de bataille ». 

Peut-on qualifier ainsi l’assassinat du général Soleimani, présent en Irak pour des pourparlers de paix, à l’invitation du premier ministre irakien ayant obtenu la permission préalable des Américains, qui ont profité du renseignement pour l’éliminer ? 

Norman Cornett rappelle combien cet assassinat par drone, qui a aussi tué un commandant chiite irakien et un responsable du Hezbollah (le Parti de Dieu !) déjà dans la mire du Mossad israélien, a aussitôt été appuyé par la plupart des Démocrates américains obnubilés par la défaite aux mains de Ronald Reagan du président Jimmy Carter, à cause des 52 otages états-uniens retenus les yeux bandés à Téhéran en 1979. 

Le machiavélique Trump a mis en garde le régime iranien contre toutes représailles en menaçant de bombardement cinquante-deux sites iraniens. Heureusement, il a été rabroué par Angela Merkel l’avertissant que détruire des sites culturels reconnus de grande valeur par l’UNESCO ferait de lui un barbare encore plus immonde que l’armée de l’État islamique et les Talibans, qui ont détruit dans un passé récent un temple assyrien et des bouddhas sculptés dans la montagne. 

L’aberrante situation guerrière a amené des conséquences tragiques : un avion abattu par erreur par les défenseurs iraniens au maximum des tensions, après l’envoi de frappes – ciblées pour ne pas tuer – sur des cibles irakiennes. Pourquoi diable ont-ils permis la réouverture de leur espace civil aérien, moins de deux heures après la fin de leurs frappes sur deux bases militaires irakiennes ? Les responsables ukrainiens éclairciront ces circonstances en premier lieu, mais sauront-ils remonter les dominos de respon-sabilités ? 

• Celle première de Gardes Révolutionnaires énervés par le brouillage de leurs communications les empêchant de confirmer ou infirmer l’identité des cibles mouvantes sur leurs radars ?
  
• Celle importante sur la psyché iranienne de la monstrueuse menace états-unienne. Car, Trump, exacerbé par l’accumulation de revers mérités subis en Afghanistan, en Irak et en Syrie, a averti que sera punie sévèrement toute attaque contre des intérêts américains.

Quand on sait que 10 % du personnel militaire américain, près de 200 000 hommes, sont déployés à l’étranger dans 800 bases militaires déclarées en 177 pays (en comptant les corps de garde des ambassades), la définition des « intérêts américains » déborde tout cadre décent. 

On m’accusera de succomber à la facilité de critiquer les Iraniens, qui arment des milices terroristes au Yémen, en Irak et en Syrie et répriment brutalement leurs manifestations étudiantes, mais n’est-ce pas une conséquence de leur part de se faire porte-étendard de la religion chiite, au détriment de leurs intérêts premiers iraniens ?

L’ONU reléguée aux oubliettes 

Les Américains élisent des brutes qui veulent vivre et périr par la guerre. Comme pacifistes, on ne pleurera pas non plus la mort de Soleimani, même si on déplore qu’elle ait eu lieu. Mais comme Canadiens peut-on se laver les mains entièrement, alors que Harper dans sa rigidité évangéliste, héritée de Preston Manning, a sciemment coupé tout lien diplomatique avec l’Iran ? Et Trudeau l’a-t-il rétabli de 2015 à 2020 ? Non, il a continué à gaspiller plus d’une centaine de milliards de dollars en dépenses militaires, obéissant à l’OTAN armée de bombes nucléaires, via son ministre de la Défense traumatisé par son passé militaire en Afghanistan. Et le Canada intervient militairement en Irak d’où il a peureusement (mais sagement) retiré ses troupes pour les rediriger vers le Koweït. 

Plutôt que mettre toutes ses billes dans l’OTAN, pourquoi ne favorise-t-il pas avec son nouveau ministre des Affaires étrangères des opérations de Casques bleus de l’ONU en prônant le retrait de TOUTES les armées étrangères de Syrie, d’Afghanistan et d’Irak et en s’objectant au projet impérialiste d’Erdogan en Libye ? 

Rappelons aussi que Chrystia Freeland a décidé d’emprisonner Meng Wanzhou, no 2 de Huawei, il y a plus d’un an, pour obéir servilement à Washington qui avait jugé la Chinoise coupable d’avoir péché contre son diktat anti-iranien. Or, signé par Obama, par toutes les puissances européennes ET LE CANADA, ce traité avec l’Iran qui a accepté de ne pas enrichir son uranium au-delà d’un chiffre critique où il pourrait le convertir en arme nucléaire, fait encore force de loi, davantage que l’humeur belliqueuse de Trump qui l’a déchiré, pour plaire à Israël et à l’Arabie Saoudite. 

Si Trudeau et l’Europe avaient défendu avec vigueur l’avancée diplomatique de paix de leur allié Barack Obama, Trump aurait-il pu poursuivre l’Iran de sa haine militariste, alors que ce pays selon l’Agence Internationale d’Énergie Atomique respecte encore la clause principale de non-enrichissement, même s’il augmente le nombre de ses centrifugeuses ?
 
Et si l’ONU, vaillamment représentée par son secrétaire général Antonio Guterres, était défendue autrement que par des eunuques diplomates ayant peur à leurs postes ? Le nouveau ministre des Affaires étrangères François-Philippe Champagne pourrait commencer à réparer les dommages freelandesques, en déléguant la responsabilité accaparante de s’occuper des familles des 57 victimes collatérales canadiennes du vol #PS752 à qui on désire offrir nos plus sincères condoléances.

L’auteur est artiste pour la paix