Cité Mémoire convie à la poésie et à la réflexion

Mission accomplie pour les réalisatrices Janice Zolf et Sylvie Van Brabant

2020/12/04

C’est avec l’étrange sentiment d’être passé à côté d’un grand rendez-vous artistique, historique et social, que nous avons visionné le très beau documentaire Au cœur de Cité Mémoire, des cinéastes Janice Zolf et Sylvie Van Brabant. Ce film à la fois touchant et fascinant nous transporte dans l’univers créatif du tandem Michel Lemieux et Victor Pilon qui, une fois de plus, ont uni leurs efforts pour produire Cité Mémoire, une œuvre audiovisuelle monumentale consacrée à l’histoire sociale et politique de la ville Montréal. 

Accompagnés par le dramaturge Michel Marc Bouchard dans cette aventure plus grande que nature, Lemieux et Pilon ont conçu une installation de projection géante permanente racontant les 400 ans de Montréal à travers des personnages ayant marqué l’imaginaire collectif.  

Des exploits sportifs de Jackie Robinson et de Maurice Richard à la procession funéraire de Jos Beef, le tenancier de taverne nourrissant les pauvres, en passant par la condamnation de Marie-Josèphe-Angélique, une esclave noire accusée d’avoir incendié Montréal, ces personnages hantent les murs de pierre du Vieux-Montréal la nuit venue, à travers des tableaux géants qui offrent aux passants une expérience visuelle et sonore exceptionnelle. Explorant à travers des histoires profondément humaines des thèmes tels le racisme, la pauvreté, la solidarité et l’identité, Cité Mémoire convie à la fois à la poésie, à l’émerveillement et à la réflexion. 

Et il faut le souligner, la caméra de Janice Zolf et de Sylvie Van Brabant a su saisir toute la majesté et toute la poésie de cette installation visuelle. Les images aériennes de la ville habitée par ces êtres issus d’un autre temps sont époustouflantes, parfois même émouvantes, comme ce tableau de la danseuse aquatique, diaphane Suzanne, muse de Leonard Cohen, s’élevant lentement sur la tour de l’horloge au-dessus du Saint-Laurent. Et que dire des images des visages des spectateurs, arrêtés au pied de ces géants animés. Visages souriants, fascinés. Dans un espace qui semble hors du temps.        

En plus de nous offrir cette immersion visuelle et sonore, les cinéastes nous ouvrent une fenêtre sur le processus de création de cette grande fresque historique. Les rues du Vieux-Montréal deviennent lieux de confidences, où les trois créateurs déambulent en nous expliquant la genèse et la mise en œuvre de ce projet. Il est d’ailleurs très beau de voir la complicité entre ces trois hommes et le respect qui les animent tous.  

Les réalisatrices nous convient également sur les lieux de création, offrant des images inédites de certaines séquences ayant mené au projet final. On observe l’équipe s’affairant à filmer dans une piscine la fabuleuse danseuse aquatique ou encore nous découvrons comment des artistes de cirque donnent vie avec humour et brio à une anecdote concernant Maurice Richard. Et que dire de la mise en scène en studio des funérailles de Jos Beef, avec cheval et une centaine de figurants déambulant devant un écran vert. Fascinant.

Dans le dossier de presse accompagnant le film, Sylvie Van Brabant soulignait qu’il était impératif pour elle « de raconter l’histoire du processus créatif de Cité Mémoire […] et de dévoiler le savoir-faire impressionnant de ces trois grands créateurs de chez nous, en mettant de l’avant les grandes valeurs humanistes qui les animent ». C’est véritablement mission accomplie. Au cœur de Cité Mémoire offre au spectateur un voyage riche, qui permet de prendre la pleine mesure du travail accompli.

Au cœur de Cité Mémoire, Janice Zolf et Sylvie Van Brabant, 2020. On peut visionner la bande-annonce du film en suivant ce lien : https://vimeo.com/472063927