En hommage à mon camarade et compagnon d’armes, Marc Laviolette (1949-2024)

Vous trouverez ci-bas une seconde version de notre infolettre, car les deux derniers paragraphes étaient absents dans notre envoi précédent. Merci de votre compréhension.


 

Marc tenait le micro…

En hommage à mon camarade et compagnon d’armes, Marc Laviolette (1949-2024)

 « Pierre tient le stylo, moi je tiens le micro. » Marc avait inventé cette formule pour décrire la répartition de nos tâches au sein du SPQ Libre. Oui, Marc tenait le micro… le micro que lui tendaient généreusement les journalistes aux instances du Parti Québécois, assurés d’obtenir une déclaration franche, claire, honnête, loin du discours formaté des politiciens traditionnels.

Avec d’autres syndicalistes et progressistes, nous avions innové, avec l’accord de Bernard Landry, en faisant inscrire dans les statuts du PQ la reconnaissance de clubs politiques au congrès de 2005. Le plan prévoyait la création de plusieurs clubs politiques. Le SPQ Libre ouvrait la marche et d’autres étaient en gestation (gens d’affaires, écologistes, membres de minorités culturelles, etc.). Mais la malencontreuse démission de M. Landry a tout remis en question.

Le PQ s’est alors doté d’un nouveau chef, André Boisclair, opposé à l’existence des clubs politiques, hostile au programme progressiste adopté au congrès, et dont l’entourage s’inspirait du New Labour de Tony Blair, en mettant en évidence sa rupture avec le monde syndical. « Finis les soupers bien arrosés avec les chefs syndicaux », déclarait démagogiquement Boisclair.

Au SPQ Libre, nous nous sommes alors retrouvés en opposition carrée avec le chef, convaincus que cette voie était suicidaire, ce que la déroute électorale de Boisclair a confirmé. Marc Laviolette a été le principal ténor de notre dissidence, cette fois aux micros des instances du parti. À plusieurs reprises, nous avons réussi à faire battre des résolutions à saveur néo-libérale ou à faire adopter des politiques progressistes contre l’avis de la direction du parti.

Je me souviens plus particulièrement d’un conseil national où les délégués avaient défié le chef en adoptant aux deux tiers une résolution prônant la nationalisation de l’éolien, malgré des interventions contraires de François Legault et Rita Dionne-Marsolais.

Cependant, nous étions conscients que les jours du SPQ Libre étaient comptés. L’expérience des clubs politiques ne pouvait reposer sur l’existence d’un seul et résister à la désapprobation de la direction du parti. Notre contribution a été le maintien pendant une décennie d’un discours social-démocrate au PQ, tout en maintenant le cap sur l’indépendance. Un discours que Marc et moi, lors de nos derniers échanges, étions heureux de constater la résurgence sous la gouverne de Paul St-Pierre Plamondon.

Syndicaliste avant tout

Aujourd’hui, je revois Marc devant les journalistes qu’il aborde, avec pour chacun, son « Comment qu’il va? », son franc-parler, ses formules percutantes, son discours jamais démagogique. Jamais démagogique parce que toujours basé sur ses profondes convictions syndicales.

Car Marc était, avant tout, un syndicaliste. Il faut rappeler qu’après avoir subi la défaite à la présidence de sa centrale, il est retourné dans sa « shop », alors qu’il aurait pu se trouver une niche plus « prestigieuse ». Dernièrement, il me faisait parvenir avec une grande fierté les textes de ce qui va constituer un petit livre sur l’histoire de son syndicat, le Syndicat national des produits chimiques de Valleyfield (SNPCV-CSN).

Nous avons, Marc et moi, signé de nombreux articles dans les journaux, publiés dans le recueil Sans référendum, pas de souveraineté (ERQ, 2008) et Le SPQ Libre et l’indépendance du Québec. Dix ans de lutte au sein du Parti Québécois (ERQ, 2013).

Aujourd’hui, cher Marc, cher camarade, c’est avec une profonde tristesse, que je signe seul ce texte, d’autant plus affligé qu’il n’y aura pas de micro tendu pour y donner vie, comme tu savais, à nul autre pareil, le faire.