Ne pouvant publier cette année son palmarès des écoles privées, faute de mise à jour des données par le gouvernement, le magazine L’Actualité compense avec la publication d’un article de Jean-Pierre Proulx intitulé « 7 idées pour démocratiser l’école privée ».
Ancien président du Conseil supérieur de l’éducation, Jean-Pierre Proulx juge « politiquement irréaliste » de mettre fin au financement public à hauteur de 60 % de l’école privée, ce qui, après tout, ne ferait que mettre le Québec sur le même pied que l’Ontario où le gouvernement ne subventionne pas les écoles privées.
Jean-Pierre Proulx invoque un soi-disant « consensus suffisant dans l’opinion publique sur le financement de l’école privée » et le fait que cette pratique est inscrite « les préambules des lois de 1964 ».
Un défaitisme étonnant de la part de celui qui a mené la bataille pour la déconfessionnalisation de l’école Notre-Dame des Neiges et a, plus tard, présidé le Groupe de travail sur la place de la religion à l'école qui a mené à, ce qui semblait impossible à l’époque, soit un amendement constitutionnel pour remplacer les commissions scolaires confessionnelles par des commissions scolaires linguistiques.
La proposition en sept points de Jean-Pierre Proulx pour « démocratiser » l’école privée peut se résumer en trois points.
Premièrement, obliger les écoles privées subventionnées à accepter tous les élèves, même en ceux en difficulté, et hausser leurs subventions pour prendre en charge ces élèves.
Deuxièmement, éliminer la sélection pour donner une chance égale à tous les parents d’y inscrire leurs enfants, quitte à accorder des bourses d’études aux familles à faibles revenus.
Troisièmement, priver de subventions les établissements qui n’accepteraient pas les « clauses de ce contrat social ».
Jean-Pierre Proulx dénonce le fait que l’école privée soit « un privilège lié au talent » et on reconnaît l’ancien président du Conseil supérieur de l’éducation lorsqu’il prône l’égalité des chances.
Mais on s’étonne qu’après toutes ces années, il n’ait pas remarqué que l’école privée était surtout « un privilège lié à l’argent ». Il a été démontré, à partir du palmarès de L’Actualité que, dans 86 % des écoles privées, les revenus des parents étaient supérieurs à 60 000 $ et inférieurs à ce montant dans 75 % des écoles publiques.
Les enseignantes et les enseignants des écoles publiques trouveront particulièrement insultante la proposition d’augmenter les subventions aux écoles privées pour l’accueil d’élèves en difficulté, alors que l’école publique agonise à cause du manque de ressources pour s’occuper adéquatement de ces élèves.
On voit mal également comment les écoles privées abandonneraient la sélection. Jean-Pierre Proulx propose pour « gérer l’offre et la demande » un mécanisme comme « le tirage au sort », régi par un organisme de coordination approprié!
Pense-t-il sérieusement que le collège Jean-de-Brébeuf va recruter ses étudiants sur la base d’un tirage au sort ! ? Proulx va nous rétorquer qu’en cas de refus, le collège sera privé de subventions faute d’avoir accepté les « clauses de ce contrat social ». Difficile d’imaginer, encore là, une réaction positive du collège de l’élite québécoise.
Se pose aussi la question des écoles privées confessionnelles. Il est ironique de voir Jean-Pierre Proulx qui s’est battu pour la déconfessionnalisation du système scolaire, qui est un des promoteurs du programme d’éthique et de culture religieuse sermonner les écoles privées religieuses en citant Jean-Paul II demandant aux écoles catholiques « d’être au service de tous les élèves et non seulement de ceux qui sont les plus brillants ».
De quoi nous rappeler que Jean-Pierre Proulx est détenteur d’un doctorat en théologie pastorale et qu’il a été chroniqueur religieux au journal Le Devoir !
En fait, la proposition Proulx est tellement alambiquée qu’on se demande si elle n’a pas tout simplement pour but de faire ressortir les contradictions qui étranglent notre système d’éducation.
Mais, attention, nos élites sont si obsédées par l’école privée que certains trouveront des vertus à sa proposition qui, si elle était mise en vigueur, signifierait un retour en arrière de 50 ans et, à toutes fins pratiques, l’abolition de l’école publique.
Soyons positif ! Faisons le pari que c’est un canular.
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