Un référendum à tous les 15 ans, obligatoire et à date fixe
par Pierre Dubuc
Comment réunir au sein d’un nouveau parti politique des fédéralistes et des souverainistes, sans qu’aucune des deux familles politiques n’abdiquent ses positions? Ce qui semblait jusqu’à maintenant être la quadrature du cercle n’était après tout que le cube Rubik s’il faut en croire Michael Fortier.
Dans le journal La Presse du 30 septembre, il propose sa solution : Un référendum statutaire tous les 15 ans ! Entre-temps, écrit-il, cela « ouvrirait la porte à une plus forte concentration de talent au sein d’un même parti au Québec ».
Que l’ex-sénateur conservateur Michael Fortier lance aujourd’hui cette idée saugrenue n’est évidemment pas un hasard. Elle s’inscrit de toute évidence dans les préparatifs du lancement d’un mouvement politique qui pourrait servir de rampe de lancement à un nouveau parti politique de droite, prévu initialement pour la mi-octobre.
Déjà, Joseph Facal a annoncé sur son blogue qu’il mettait de côté le projet indépendantiste, le temps de faire le ménage dans les finances publiques, la santé et l’éducation. Ce qui lui a valu la supplique de Jean-François Lisée d’y penser à deux fois.
Le programme de Facal était également celui de François Legault lorsqu’il démissionna du Parti québécois en juin 2009.
C’est essentiellement la même orientation que nous propose maintenant Michael Fortier. Il écrit : « Les services que rend l’État aux malades, aux étudiants ou aux commerçants occupent un grand espace dans l’action gouvernementale. Ils méritent d’être confiés à des gens compétents qui les superviseront, comme il se doit, sans égards à leurs allégeances constitutionnelles ».
C’est comme si les difficultés du Québec – et surtout les solutions à y apporter – n’avaient aucun rapport avec la situation du Québec au sein de la fédération canadienne.
Le bon timing ?
Lancer un nouveau parti n’est pas une tâche facile, mais ses promoteurs jugent sans doute qu’ils ne pourront trouver un meilleur timing. L’ADQ ne va nulle part. Le Parti libéral est englué dans une telle mélasse de corruption qu’aucun détergent connu ne permettra de faire maison nette.
Quant au Parti Québécois, il est incapable, sous la gouverne de Mme Marois, de profiter de la débandade du Parti libéral. Les sondages lui octroient 40% des votes, mais ce résultat est miné par le fait qu’il y a toujours un 40% d’indécis.
Plus significatif, comme le révèle un sondage CROP publié dans La Presse du 30 septembre, Mme Marois n’est pas plus populaire que Jean Charest ! Si la cote de Charest est passé de 43% à 25% depuis le mois de janvier dernier, celle de Mme Marois est restée collée à 26% !
De plus, comme Mme Marois refuse de prendre un engagement ferme en faveur d’un référendum, on voit difficilement comment elle va empêcher les membres de l’aile droite de son parti de ne pas être sensible aux beaux yeux que leur feront leurs anciens collègues Facal, Legault et compagnie.
L’étiolement : causes et remèdes
De toute évidence, la grande coalition souverainiste continue de s’étioler, malgré les efforts de certains – on pense, entre autres, au Conseil de la souveraineté – pour réunir tout le monde sous la même grande tente.
En fait, il faut questionner l’approche. Trop bureaucratique. Pas assez dynamique.
À la fin des années 1960, Pierre Bourgault n’a eu d’autre choix que de dissoudre les RIN et joindre le Parti Québécois parce que, sous le leadership de René Lévesque, le mouvement souverainiste avançait d’un pas décidé. Même les créditistes du Ralliement national ont alors compris qu’il valait mieux embarquer le plus rapidement possible dans le train en marche, s’ils ne voulaient pas être laissés en plan sur le quai de la gare.
Au milieu des années 1990, lorsque Jacques Parizeau a mis sur la table un échéancier clair et précis pour la tenue du référendum, toutes les organisations souverainistes, syndicales, populaires et féministes ont rapidement vu la nécessité de joindre les Partenaires pour la souveraineté si elles ne voulaient pas être condamnées à regarder passer la parade.
Chacun de ces rendez-vous historiques avait la particularité d’être… un rendez-vous !
Sans l’échéance d’un référendum, le mouvement souverainiste est condamné à la dispersion, au fractionnement, à l’étiolement. Seul le rendez-vous référendaire oblige à cibler sur l’essentiel, à mettre de côté l’accessoire et à sonner le rappel des troupes.
Seule la convocation du peuple à un choix décisif permet de vaincre les forces de l’inertie, de l’habitude et de la routine et de chambouler l’ordre social et politique.
À défaut d’un objectif clair, d’un engagement ferme, d’un leadership déterminé dans le camp souverainiste, il y en a qui trouveront des vertus à l’idée du fédéraliste Michael Fortier d’un référendum à tous les 15 ans!
En sommes-nous rendus là !?