Denis Coderre veut privatiser la gestion de l’eau à Montréal. Cet engagement, que peu d’observateurs ont remarqué, est pourtant contenu dans la plateforme de sa formation, fait savoir André Bouthillier, ex-président de la Coalition Eau Secours pour une gestion responsable de l’eau, une organisation citoyenne qui lutte contre la privatisation de l’eau. Ce dernier vient de publier un dossier étoffé à ce sujet sur MétéoPolitique.com, un site d’information et d’analyses politiques dont il est le webmestre. On se souvient qu’Eau Secours! s’était opposé avec succès, à la fin des années 1990, aux tentatives de l’administration du maire Pierre Bourque de privatiser la gestion de l’eau à Montréal en la confiant à la multinationale La Lyonnaise-des-eaux. Par la suite, Eau Secours! a convaincu le maire Gérald Tremblay, en 2003, de ne pas privatiser l’eau. Mais la menace est vite revenue sous une autre forme: vendre l’expertise de la Ville à des firmes d’ingénierie conseil telles Tecsult, SNC-Lavallin ou Dessau dont les dirigeants ont avoué devant la commission Charbonneau, il y a quelques mois, avoir trempé dans la collusion et la corruption qui afflige Montréal. BRP Ingénierie, la compagnie qui avait obtenu le scandaleux contrat des compteurs d’eau que l’administration Tremblay a dû annuler par la suite, était également dans le portait. Cette dernière a même acquis les services du directeur du Service de l’eau de la Ville afin de se positionner favorablement. Coïncidence, le responsable du dossier de l’eau au comité exécutif de la Ville était alors Alan De Sousa, maire des l’arrondissement St-Laurent sous l’étiquette Union Montréal qui a été réélu au même poste pour la formation de Denis Coderre. André Bouthillier souligne que la formulation de la plateforme de ce dernier ressemble à s’y méprendre au plan mis au point par De Sousa avec l’aide du haut fonctionnaire qui a quitté la Ville pour aller travailler chez BRP. Bouthillier se dit aussi surpris que le maire de St-Laurent n’ait pas été convoqué par la commission Charbonneau pour expliquer son rôle dans le dossier des compteurs d’eau. Sortir la gestion de l’eau de la gouverne de la Ville Quoiqu’il en soit, le plan de De Sousa, qui est devenu celui de Coderre , est de privatiser le Service de l’eau pour en confier la gestion à une société para-municipale dirigé par un conseil d’administration dont aucun élu ne ferait parti. C’est-à-dire, comme dans le cas du scandale du Faubourg Contrecoeur, sortir l’activité de la gouverne de la Ville. Il est d’ailleurs question de cette société para-municipale depuis 1997. C’est donc dire que la vision de Denis Coderre correspond exactement à celle de Pierre Bourque, de Vision Montréal, et de Gérald Tremblay, d’Union Montréal. Bouthillier qualifie d’ailleurs les deux ex-maitres de «rabatteurs d’affaires favorisant le développement de firmes d’ingénieurs conseil qui ont profité de la situation pour se livrer à la collusion et à la corruption». De façon plus spécifique, la plateforme de Coderre propose de s’appuyer sur le «partenariat public-universités-privé» existant pour faire avancer les recherches dans les technologies de l’eau et, à moyen terme, créer un secteur d’activité stratégique des infrastructures de l’eau et développer un parc industriel dédié. «On a une bonne expertise de l’eau pourquoi ne pas servir de cette carte de visite », a demandé le candidat à la mairie qui a confié ce dossier à Chantal Rouleau, mairesse de l’arrondissement Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles ayant quitté Louise Harel pour se joindre à Coderre afin de briguer le même poste. Cette dernière a renchéri : «Il y a un marché extraordinaire qui s’ouvre à nous: aux États-Unis, c’est plus de 1000 milliards$ pour les 20 prochaines années. Il faut profiter de cet immense marché. Grâce à l’expertise que nos firmes de génie ont acquise dans les technologies de l’eau, il sera possible de transformer nos investissements colossaux dans notre réseau d’aqueducs et d’égouts en levier de développement économique». Dans son dossier, André Bouthillier explique que l’astuce ici est d’ajouter le mot «universités» entre public et privé pour que ca ne soit pas assimilé à la réingénierie de l’État de Jean Charest. Mais en réalité il s’agit bien du concept des «PPP». La véritable solution serait de renforcer l’expertise interne de la Ville, prône plutôt l’ex-président d’Eau Secours.
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