L’auteur est président du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec
Le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ) a noté de nombreuses contradictions dans l’annonce faite par le président du Conseil du trésor, le 25 novembre dernier, en lien avec la réduction de la taille de l’État. En bref, Martin Coiteux veut imposer une réduction des effectifs de la fonction publique d’au moins 2 % en 2015-2016, tout en s’affranchissant de la sous-traitance de façon importante.
Visant les ministères et les organismes (M/O), la diminution minimale de 2 % du nombre d’effectifs – environ 1 150 postes en moins – pourrait varier d’une organisation à l’autre. Certaines pourraient donc augmenter leurs effectifs, tandis que d’autres seraient soumises à un régime spartiate impliquant une réduction supérieure à 2 % de leurs effectifs.
Sur la sous-traitance, M. Coiteux mentionne que « le gouvernement souhaite aussi réduire de façon significative la dépendance contractuelle donnée à l'externe. Nous allons faire plus avec moins et mieux à l'interne, avec de meilleurs moyens ».
Selon le SPGQ, faire mieux avec moins nécessiterait de la formation supplémentaire, mais les ministères ne peuvent dépenser plus en formation que le 1 % exigé par la loi. Puis, comment le gouvernement entend-il reprendre le contrôle à l'interne, d’autant que le taux de dépendance envers le secteur privé est énorme ? Il dépasse 50 % dans le secteur des ressources informationnelles (RI) pour l'ensemble des M/O depuis 10 ans !
Malgré des budgets titanesques consacrés à l’informatisation des services, l’appareil gouvernemental accuse un retard immense. Le Dossier santé Québec en est une belle preuve : promis pour 2011 au coût de 543 millions $, il devrait plutôt osciller autour de 1,6 milliard $ et sa livraison est reportée à… 2021! Même le ministre de la Santé si dit « découragé » par l’informatique !
Une journaliste a demandé à M. Coiteux si l’annonce de ces mesures n’était pas une façon de placer les syndicats devant le fait accompli, alors que les négociations avec eux ont à peine débuté. M. Coiteux a répondu : « Je crois, au contraire, qu'il faut discuter, dans le cadre de la réalité, les négociations vont se faire dans le cadre des paramètres qui sont les mêmes pour tous, pour l'ensemble des Québécois, incluant les employés de l'État. » Hors de question de reporter l'atteinte de l'équilibre budgétaire, a-t-il ajouté.
Comme toujours, M. Coiteux ne précise jamais que le gouvernement devrait baigner, dans les faits, dans une situation de surplus budgétaire l’an prochain, surplus qui sera investi dans le fonds des générations (1,6 milliard $ dès 2015-2016, 2,2 milliards $ en 2016-2017 et 2,8 milliards $ en 2017-2018). Pour leur part, les coupes d’effectifs anticipées représentent une masse salariale d’environ 100 millions $, soit seize fois moins que le surplus budgétaire anticipé en 2015-2016.
Le 26 novembre dernier, comme l’a fait récemment l’économiste Pierre Fortin, l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) nous rappelait que l’état de la dette du Québec n’a rien de dramatique. Des pays comme les États-Unis, la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne et les Pays-Bas font nettement moins bien que le Québec.
Si l’étude de l’IRIS convient que la dette du Québec est plus importante que celle des autres provinces canadiennes, elle relativise les choses comme suit : « Affirmer que la situation est alarmante et que le Québec s’apprête à rejoindre des pays comme la Grèce ou le Portugal par son niveau d’endettement est une fabulation ».
M. Coiteux a donc parfaitement raison lorsqu’il dit qu’il faudra discuter dans le cadre de la réalité. Mais encore faudrait-il qu'il s'agisse d'une réalité basée sur les vrais chiffres pertinents qu'utilisent Pierre Fortin, l'IRIS et les milliers d'économistes, de comptables et d'actuaires que représente le SPGQ.
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