Les cinéastes Jean-Pierre Roy et Michel Breton nous offrent une version allongée de leur documentaire La Langue à terre en format DVD. Nous republions l’article que notre chroniqueure Ginette Leroux a consacré au film lors de sa sortie en 2013.
Après « Questions Nationales », primé à Barcelone en 2009, dans lequel il est question d’indépendances nationales, Jean-Pierre Roy, documentariste engagé et Michel Breton, artiste en cinéma d’animation, prennent une direction tout aussi actuelle que controversée. Les cinéastes proposent, cette fois, une réflexion stimulante et solide sur l’anglicisation déferlante qui envahit Montréal et menace le Québec tout entier. Les questions, très documentées et posées avec précision aux principaux acteurs de la société québécoise, connus pour leurs opinions arrêtées sur la langue, tournent et retournent les raisons politiques, historiques et économiques qui pourraient, à la longue, conduire à la disparition du français, l’avenir même de la nation québécoise.
Les Charles Castonguay, spécialiste de la langue et collaborateur à « l’aut’journal », Josée Legault, journaliste et politologue connue pour ses positions fermes, l’historien Serge Bouchard, l’ex-premier ministre Bernard Landry, les écrivains Yves Beauchemin et Victor-Lévy Beaulieu, le comédien et politicien Pierre Curzi, l’ex-ministre péquiste Louise Beaudoin, le grand défenseur de la langue Yves Michaud et Biz de Loco Locass livrent des témoignages parfois acérés, souvent colorés, mais toujours justes et éclairants.
Viennent en porte-à-faux ceux qui ont pour mission de mettre des bâtons dans les roues, dont l’objectif, disent-ils, est de préserver leurs droits acquis. Entre autres représentants de ces anglophones intransigeants, le réputé dur à cuire William Johnson, le modéré John Parisella et Sylvia Martin-Laforge, véritable dame de fer, immuable dans ses convictions.
La francisation et l’intégration des immigrants sont passées sous la loupe par Pierre Georgeault du Conseil supérieur de la langue française du Québec, la députée bloquiste d'Ahuntsic Maria Mourani et Tania Longpré, enseignante en francisation et auteure du livre « Québec cherche Québécois pour relation à long terme et plus » qui vient de paraître.
Les réalisateurs québécois nous font traverser l’Atlantique pour se rendre dans la mère-patrie. Bernard Pivot, les cinéastes Cédric Klapish et Patrice Leconte ainsi que le sénateur Jean-Pierre Raffarin contribuent à élargir le débat en donnant l’heure juste sur les conséquences de l’intrusion de l’anglais dans la langue quotidienne des Français. Vont-ils résister au « globish », une forme moderne de la lingua franca?
Véritable historique de la langue française au Québec, le film de Jean-Pierre Roy et Michel Breton ne se perd jamais dans les détours. La question est clairement posée; les réponses éclatent et éclairent une problématique dans laquelle le Québec et sa langue s’enlisent depuis que le oui et le non n’en finissent plus de coexister.
D’ailleurs, l’ultime extrait confirme et résume de façon géniale tous les propos tenus dans ce film. Où donc les cinéastes ont-ils trouvé cette pierre précieuse?