PHOTO MARTIN MEISSNER, AP. Le 24 février, un char allégorique défile lors du carnaval de Düsseldorf, en dénonciation de quatre attentats récents en Allemagne. Il arbore une sculpture-caricature de raciste avec pistolet à la place de la langue ; sur sa joue « les mots mènent à l’acte ».
L’auteur est Artiste pour la paix
Un constat hélas objectif : haine raciste et violence en hausse
L’Agence France-Presse écrit le 27 février que « Le Conseil de l’Europe s’est alarmé de la multiplication des actes et de la banalisation des discours racistes en Europe, mettant aussi en garde contre les risques de discrimination représentés par l’intelligence artificielle. Dans son rapport annuel 2019 publié le même jour, l’organe indépendant d’experts du Conseil, chargé de combattre le racisme, l’ECRI, pointe « l’influence croissante des politiques ultranationalistes et xénophobes en Europe, un discours de haine qui donne le ton sur les réseaux sociaux ».
« L’Europe est confrontée à une terrible réalité : les actes de violence inspirés par l’antisémitisme, la haine à l’égard des musulmans et les autres formes de haine raciale se multiplient à un rythme alarmant », avertit la Secrétaire générale du Conseil de l’Europe, Marija Pejcinovic Buric, citant la fusillade qui a fait 9 morts à Hanau en Allemagne la semaine dernière : de jeunes Kurdes et Turcs assassinés froidement dans un bar par un raciste armé qui s’est ensuite enlevé la vie. Le rapport de l’ECRI pointe des problèmes récurrents de discriminations envers les musulmans, les juifs, les Roms et les personnes noires dans les 47 États membres du Conseil, jugeant nécessaire « une approche plus proactive et un soutien à une éducation inclusive ». L’organisme note aussi « un environnement de plus en plus hostile aux ONG qui œuvrent pour les groupes vulnérables », décrivant ces évolutions comme « alarmantes ». Enfin, pour les personnes LGBTQ, « si de nombreux pays ont intensifié leur action en faveur de l’égalité, d’autres ont pris la direction opposée et ces personnes continuent d’y être victimes de harcèlement, de menaces et de violence ».
Des artistes hurlent contre les loups
Contre le discours de haine qui, chez nous au Canada, accable ces jours-ci les autochtones contestataires et leurs ONG alliées harcelés en Colombie Britannique par le groupe Soldiers of Odin, un artiste allemand réagit vivement par son art. Des sculptures de loups semblent hurler de concert, évoquant chez nous, francophones, la chanson de Serge Reggiani les loups sont entrés dans Paris, créée par Albert Vidalie. Les jeunes de mai 1968 avaient acheté en grand nombre son 45 tours et réinterprété l’allégorie de l'avancée de l'armée allemande nazie dans Paris en 1940, en une ode à TOUTES résistances.
PHOTO INA FASSBENDER, REUTERS
Des sculptures de l'artiste Rainer Opolka, installées place du marché à Dresden en Allemagne en mars 2016. Les sculptures de loups (dont cinq font le salut nazi) composent un ensemble intitulé « Les loups sont de retour », dénonçant l'extrémisme d'extrême droite.
Rainer Opolka est une figure fascinante. Devenu millionnaire après avoir inventé avec son frère jumeau une application LED pour lampes de poche et fondé une usine de fabrication, dont il a revendu des parts en 2011 à la firme américaine Leatherman Tool Group, il peut travailler librement sans pression financière comme sculpteur. Ses loups ornent des places publiques à Chemnitz et à Dresden, en opposition symbolique à l’extrême-droite dont il craint la résurgence observée et sa richesse lui a même permis, avant les élections de l’automne 2019, de financer le parti socialiste allemand et son organe de presse SPD-Wahlkampfzeitung „Wir für Woidke“ - journal d’élections en faveur de Woidke.
Qui est Dietmar Woidke? Socialiste né en Allemagne de l’Est en 1961, il travaille comme ministre au sein de plusieurs coalitions gouvernementales jusqu’aux élections 2019 où son parti de gauche ne recueille que 26,2 % des voix, ne devançant que de trois points la fasciste et montante Alternative pour l'Allemagne (AfD) dont le nationalisme fasciste n’empêche pas l’adhésion à l’OTAN et au populiste suprématiste blanc Donald Trump. Woidke délaisse alors son alliance désormais minoritaire avec Die Linke, parti similaire à Québec Solidaire : près de huit semaines après le scrutin assombri par la montée de l’extrême-droite, il annonce le 24 octobre avoir conclu un accord avec la CDU, le parti de centre droit chrétien d’Angela Merkell et les Grünen (les Verts), pour former un gouvernement de coalition. Les partisans québécois d’un nouveau mode de scrutin plus représentatif des votes exprimés seraient sans doute bien avisés de publiciser ce genre de tractations qui réussissent à maintenir un pouvoir populaire démocratique, contre les extrêmes-droites unies aux capitalistes populistes favorisés par le laxisme des médias, car Woidke a été réélu ministre-président du Landtag de Brandebourg par 47 voix contre 37 et trois abstentions. Les temps sont durs, il faut s’adapter…
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